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Financer la mobilité : les péages urbains, un choix ou une nécessité ?

Alors que les débats actuels autour de la Loi d’orientation des mobilités laissent entrevoir la possibilité pour les collectivités de mettre en place des péages urbains afin de réduire la place de l’automobile en centre-ville et financer la mobilité, La Fabrique de la Cité a souhaité réinterroger le rôle et la capacité de cet outil. Le péage urbain est-il une solution réellement efficace pour réduire la circulation automobile en centre-ville et financer les infrastructures et services de mobilité de demain ?

Pourquoi le péage urbain apparaît aujourd’hui dans le débat public ? Quel effet cet outil peut-il avoir sur la circulation automobile, le financement de la mobilité et la forme urbaine ? Dans le cadre du lancement de son projet d’étude sur le financement de la mobilité, La Fabrique de la Cité réunissait, le 15 octobre 2018, Jean Coldefy, directeur du programme Mobilité 3.0 à l’ATEC ITS et Yves Crozet, économiste et professeur émérite à Sciences Po Lyon et membre du Laboratoire Aménagement Économie Transport (LAET), pour répondre à ces différentes questions.

Rappel historique sur les péages 

Le péage urbain n’est pas nouveau. Déjà expérimenté depuis plus de 70 ans en Norvège et mis en place dans des villes comme Londres, Stockholm et Milan, le péage urbain constitue un outil de régulation d’accès à une zone par l’instauration d’une redevance à l’entrée de celle-ci. Sous ses différentes formes, le péage urbain a tantôt été utilisé pour réduire la place de l’automobile dans une zone, tantôt pour financer de nouvelles infrastructures et services de mobilité.

Sans qu’un tel modèle ait été mis en place en France, cette transformation s’inscrit dans le sillage de la transformation des amendes de stationnement en redevance d’occupation de l’espace public au début de l’année 2018 en France. Cela avait amené au paiement à l’usage pour qui occuperait l’espace public, denrée rare dans nos villes.  Si cette transformation n’avait pas tant suscité de débats lorsqu’il s’agissait d’une voiture immobile, le péage urbain sera lui amené à être au cœur des débats des futures élections municipales. Bien que ces outils aient été éprouvés dans d’autres métropoles et qu’ils constituent une évidence pour les économistes, leur implantation ne recueille généralement pas l’assentiment de la population.

 

Un choix ou une nécessité ?

Le péage urbain, en effet, n’est pas un outil indolore. Selon Yves Crozet « il y aura plus de perdants que de gagnants ». Toutefois, les péages urbains constituent l’instrument le plus efficace pour lutter contre les deux principales problématiques que les villes connaissent aujourd’hui : l’étalement urbain et l’impératif de durabilité de nos déplacements.

Jean Coldefy et Yves Crozet étaient par ailleurs unanimes sur un point : la mise en place d’un péage urbain implique un travail pédagogique important. Il est nécessaire de faire comprendre que l’espace public est une ressource rare dont la consommation nécessite le paiement d’une redevance d’usage. Le péage urbain est un choix de société important à l’heure où les enjeux durabilités écologique et économique sont mis à rude épreuve. Sans qu’il soit nécessaire de mettre en place une redevance aussi extrême que la Congestion charge londonienne (équivalant à 15 euros par jour), un péage urbain coûtant un ou deux euros pourrait déjà permettre de financer de nouveaux services et infrastructures de mobilité chaque année.

Un outil au service d’une politique de mobilité plus large 

En favorisant le recours au covoiturage et au report modal vers des modes collectifs, le péage urbain constitue un outil efficace qui a permis à des villes comme Londres et Milan de réduire la circulation en leur centre-ville de près de 30%. Toutefois, le principal défi que devra surmonter le péage urbain est celui de son acceptabilité. Celle-ci est, pour Jean Coldefy, fortement conditionnée par la capacité des collectivités à proposer des alternatives efficaces et crédible à l’autolisme. Mais si efficace soit-il, un péage urbain seul ne saurait se suffire. Il convient donc à la fois de réfléchir à la manière de mettre en place un tel outil mais aussi de concevoir de nouveaux services et infrastructures efficaces afin de favoriser le report modal de l’autosolisme vers des modes collectifs. En cela, le péage urbain doit s’ancrer dans une politique de mobilité bien plus large qui favorisera le développement de ces alternatives à l’autosolisme.

Jean Coldefy, Yves Crozet - Financer la mobilité : les péages urbains, un choix ou une nécessité ? - 15 octobre 2018

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La Fabrique de la Cité

La Fabrique de la Cité est le think tank des transitions urbaines, fondé en 2010 à l’initiative du groupe VINCI, son mécène. Les acteurs de la cité, français et internationaux, y travaillent ensemble à l’élaboration de nouvelles manières de construire et reconstruire les villes.

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