Note

Les promesses du sous-sol pour une ville durable

« L’architecture est partie prenante de tous les mythes de l’univers souterrain (…). Elle n’est que la partie visible et le reflet déformé de ce que l’humanité imagine sous terre. » Jean-Jacques Terrin, architecte, directeur de la médiation du Musée du Louvre et commissaire de l’exposition Mondes Souterrains ? 20 000 lieues sous la Terre au Louvre-Lens (février-juillet 2024)

 

«… à regarder les projets de Paris, Tokyo, Séoul, Shanghaï, Stockholm, on est prêt à conjecturer que le XXIe siècle sera le temps des mines urbaines, du « suburb », comme le XXe siècle aura été celui des gratte-ciel et des ban- lieues. » L’environnement souterrain urbain, une mine pour la recherche, Sabine Barles, André Guillerme, Annales de la recherche urbaine, 1994

 

Et si nombre des difficultés de la fabrique urbaine pouvaient être atténuées en mettant en application à bonne échelle un principe d’apparence simple : (re) mettre le sous-sol et les espaces souterrains des villes à contribution ? Telle est, dit-on, la promesse du sous-sol. Elle est plurimillénaire, puisque déjà portée par le tunnel-aqueduc d’Eupalinos de Mégare (figure tutélaire des architectes et des génie-civilistes), conçu et réalisé au VIIe siècle avant JC. Cette promesse du sous-sol est déjà multiple à l’époque : soustraire aux regards ennemis (défense) une infrastructure d’approvisionnement en eau de source (réseau) d’importance vitale (protection de la population), de la ville de Samos (cité densément peuplée). Pour être antique et solidement éprouvée, cette promesse n’en est pas pour autant évidente à l’aube du IIIe millénaire…

 

Depuis le début du XXe siècle, des voix d’ingénieurs, d’architectes, de promoteurs s’élèvent pour désigner une solution puissante mais négligée. Celle de l’urbanisme souterrain. Partiellement soustrait à nos regards, l’espace urbain peut, en effet, être regardé dans toute sa profondeur. Loin sous le sol 1 , le sous-sol urbain est, lui aussi, un milieu déjà très anthropisé. Il renferme d’abord des siècles d’histoires humaines qui refont surface dès que des travaux de fouilles archéologiques le leur permettent, mais également une histoire contemporaine plus récente, antre des « réseaux divers » : eau potable, eau non-potable, électricité, gaz, télécom, signalisation, froid, vapeur, fourreaux en attente, tubes obsolètes, gaines à l’abandon… non seulement pour les usages de surfaces (habitations, commerces, équipements), mais aussi pour les usages souterrains (voies de circulation, métro, RER, data centers, équipements). Finalement, il renferme nombre de tunnels routiers ou ferroviaires, ou de galeries de service, construits en prévision d’extension ou déjà à l’abandon. Géo-ressources, inertie thermique, espaces résiduels, le sous-sol est donc riche de promesses.

 

En quoi le sous-sol ou les espaces souterrains peuvent-il avoir encore davantage d’impact sur nos vies urbaines ? En quoi la fabrique de la ville a-t-elle intérêt à y prêter attention, à l’heure du dérèglement climatique ? Entre principe érigé en solution quasi-miracle et nouvelles réticences à l’atteinte d’espaces vierges, que dire aujourd’hui des « promesses du sous-sol » ? Sont-elles encore porteuses d’avenir, dans l’effort d’adaptation des villes denses ? Cette note s’emploie à faire un bilan des espoirs, des savoirs et des limites en reprenant plusieurs décennies d’études et de travaux. Elle approche de façon très marginale les enjeux géopolitiques, qui appelleraient un réinvestissement stratégique des sous-sols à des fins de protection civile, et s’attache plutôt à décrypter les tendances actuellement à l’œuvre dans la conception d’une ville climatiquement résiliente.

Partie 1. L’intérêt pour le sous-sol : récent ou renaissant ?

1. Investir le sous-sol : quelles motivations, quelles attentes ?

 

Lorsque les usages de la ville s’intensifient, les espaces urbains peuvent s’avérer rares et précieux. Les espaces souterrains – et notamment les espaces déjà anthropisés – pourraient-ils être des espaces à exploiter pour des services de la ville ?

 

Les cercles professionnels, les publications techniques, les programmes de recherche évoqués dans cette note ont un point commun, celui de considérer le sous-sol comme un levier de développement urbain. En témoigne un dossier thématique de 2008 du Bureau de Recherches Géologiques et Minières (BRGM) 2 s’attachant à faire découvrir les potentialités du sous-sol à un plus large public que celui des géologues et des génie-civilistes. Il questionne : « L’avenir des villes est-il sous nos pieds ? » et titre sa Fiche de Synthèse Scientifique n°19 : « Le sous-sol. Espace urbain de demain ? » 3 . Il ouvre son propos de manière très impérative : « L’espace souterrain doit devenir un atout pour l’aménagement durable des zones urbaines. En France, il faut informer et mobiliser élus et administrations pour que le monde souterrain devienne un espace d’avenir. ». C’est en comptant sur ses compétences scientifiques que le BRGM peut être le promoteur d’aménagements urbains souterrains, car le manque de connaissance scientifique et technique du sous-sol est le premier des freins à son apprivoisement. Le second étant sans doute encore l’incomplétude ou l’inexactitude des informations concernant les réseaux ou les infrastructures historiques qu’il abrite.

 

Même lorsqu’il est mieux connu, le sous-sol est considéré comme un levier à condition qu’il soit délivré de nombreux autres obstacles, d’ordre juridique, administratif ou socio-économique (les aspects techniques sont rarement pris en compte). Or, aujourd’hui encore, si l’on regarde au-delà des réalisations purement infrastructurelles, force est de constater que les « bonnes pratiques du développe- ment urbain » ne regorgent pas d’exemples à suivre. Notons d’ailleurs l’absence ou la discrétion de cette thématique dans les enseignements d’architecture ou d’urbanisme. Pourquoi semble-t-elle rester un objet, une représentation, un imaginaire largement dévolu aux génie-civilistes ? À ce stade, le sous-sol pour la ville durable, n’est qu’une intuition.

 

Les préoccupations en matière de sobriété foncière vont interroger l’intensification de l’usage des espaces en ville. Si l’idée de concevoir massivement des logements en sous-sols paraît peu envisageable a priori 4 , il peut être question d’y intensifier des usages au service de la ville, notamment pour abriter certaines fonctions. Historiquement, la ville moderne hérite d’ailleurs de ces espaces souterrains ayant servi : à fournir les matériaux de la ville (carrières), à s’abriter temporairement (refuges), à enfouir les morts (catacombes), à assainir la vie citadine (réseaux d’eau et égouts) et à y faciliter les transports (métro).

 

Les attentes vis-à-vis de ce sous-sol sont aujourd’hui de plusieurs ordres. Dans une logique de gain d’espace, on pense d’abord à y stocker plus massivement tout ce qui encombre la ville du dessus (eau, énergie, denrées et biens, véhicules y compris véhicules légers, réserves ou archives, serveurs de données…) notamment dans les espaces souterrains disponibles, pourvu que les conditions de sécurité soient assurées. Sans certitude d’une meilleure capacité de résilience en sous-sol, l’ensemble des flux (eau, chaleur, fraîcheur, transport, communications) continue également d’y être développé en réseaux souterrains, ceci d’autant plus que les centres denses se piétonisent et que les énergies sont amenées à se décarboner. Les sous-sols aménagés (cinémas, infrastructures sportives…) ou susceptibles de l’être (délaissés, espaces souterrains en transition), peuvent abriter temporairement des populations exposées aux fortes chaleurs ou héberger des activités ponctuelles (logistique, ateliers…). Enfin, lorsque l’architecture et l’urbanisme peuvent repenser sol et sous-sol en un seul projet, émergent ces formes urbaines taillées dans l’épaisseur et la profondeur de la ville et tirant les avantages du dessus (air, lumière) et ceux du dessous (volume abrité).

 

En ce qui concerne le sous-sol urbain, persiste toujours cette dualité : avec d’un côté ce que l’on cherche à y déployer (infrastructures techniques, tunnels, parkings, stations de métro, espaces sous-dalle) et de l’autre ce que l’on cherche à en tirer (eau, géo-ressources, fraîcheur ou chaleur, foncier invisible). Relier les espaces du dessus par le dessous, stocker en dessous ce qu’on aurait peine à laisser au-dessus, profiter de l’inertie thermique de ce milieu préservé pour apporter davantage de confort aux activités pratiquées au-dessus : voilà en quoi le sous-sol est porteur d’espoir, convoité ou maîtrisé.

 

Le sous-sol est-il un refuge climatique ? Ce que nous apprennent les exemples internationaux sur les motifs de l’aménagement souterrain.

Certaines villes 5 ont une relation particulière avec leur sous-sol, qu’elles utilisent et aménagent depuis longtemps, et dont l’ampleur de l’appropriation est tout-à-fait remarquable : la « ville intérieure » de Montréal et ses espaces indépendants, Helsinki 6 et ses équipements publics dimensionnés pour y accueillir des usages multiples et réversibles .

Pourquoi dans ces villes et non ailleurs ? La question est légitime et pas totalement tranchée . D’où la valeur de l’exemple comme boussole . En la matière, les exemples produits par le groupe de travail dédié aux « espaces souterrains » de l’International Tunnel Association (ITA) 7 , sont particulièrement intéressants, faisant notamment mention des réalisations visibles à Helsinki, Hong-Kong, Séoul, Montréal, Paris, etc 8  . À Helsinki, les infrastructures souterraines étaient à l’origine pensées pour la protection civile avant tout . Ces espaces souterrains ont pris de l’ampleur dans les années 1980 et abritent depuis, non seulement des infrastructures liées aux transports, aux déchets, à l’énergie, mais aussi des lieux de culte et de loisirs, des bureaux et même des logements .

Une hypothèse liée aux conditions météorologiques extrêmes peut être soulevée pour expliquer l’intérêt de certaines villes pour leur sous-sol : Montréal, Helsinki ou Moscou pour se protéger du grand froid, Tokyo ou Singapour pour se protéger de l’humidité et de la chaleur . Sabine Barles précise au contraire, à propos des cas de Tokyo et Montréal 9 , que les conditions météorologiques ne sont pas la cause première d’une installation souterraine, même si elles peuvent jouer sur leur niveau de fréquentation en fonction des saisons .

Par ailleurs, les propriétés d’inertie thermique du sous-sol permettraient une certaine sobriété énergétique des aménagements souterrains, s’il ne fallait pas assurer également : un éclairage permanent, le traitement et le renouvellement de l’air, ainsi que le pompage des nappes phréatiques à proximité . Ces différentes contraintes rehaussent le coût d’un centre commercial souterrain, au niveau de celui d’un centre commercial de surface 10 .

« En d’autres termes, et dans les contextes urbains, le climat ne constitue pas la cause première de l’enterrement, au mieux une cause seconde, et plutôt un avantage induit » 11

 

2. Représentations et projets urbains en sous-sol : quelques jalons dans l’histoire moderne

DA VINCI, ARCHITECTE DE LA VILLE INTÉRIEURE

Leonard de Vinci, La Ville Idéale, Paris, Bibliothèque de l’Institut de France, Manuscrits B, Ms 2173

Comme c’est le cas pour l’anatomie, l’aéronautique ou encore la géographie, l’urbanisme souterrain contemporain retrouve des intuitions fondatrices dans les esquisses de « ville idéale » de Léonard de Vinci, vieilles de plus de 450 ans. Dans ces manuscrits conservés à l’Institut de France, se trouvent les plans en coupe d’une « ville intérieure » en sous-sol. Conscient des limites des grandes villes de son époque, surpeuplées et insalubres, Léonard de Vinci a travaillé à élaborer des modèles alternatifs opérant déjà la séparation des flux de circulations en les organisant sur deux niveaux. Le plan est commenté : « Et sache que si quelqu’un voulait parcourir la ville en utilisant uniquement les rues hautes, il pourrait le faire commodément ; et de même celui qui voudrait circuler en ne prenant que les basses. Dans les rues hautes ne doivent passer ni chariots, ni autres véhicules semblables : ces rues ne servent qu’aux personnes de qualité. Dans les rues basses passeront les chariots et autres transports destinés à l’usage et commodités du peuple ». Outre la distinction sociale appelée par l’époque, retenons que la ville d’agrément est laissée aux piétons en surface tandis que la logistique et les services s’enfouissent.

 

D’HAUSSMANN ET HÉNARD À UTUDJIAN

Si le baron Haussmann est essentiellement connu pour ses grandes percées dans le Paris médiéval, il faut également lui reconnaître de grands travaux souterrains pour l’organisation du système d’égouts, d’adduction et de stockage d’eau potable. Fulgence Bienvenüe a poursuivi l’aménagement du sous-sol parisien avec l’ouverture de la première ligne de métro pour l’exposition universelle de 1900.

 

Les sous-sols et les réseaux de transports

Depuis la première ligne de métro de Fulgence Bienvenüe, le sous-sol n’a cessé d’accueillir les réseaux de transport collectif. Six villes françaises disposent aujourd’hui d’un tel réseau, avec le dernier ouvert à Rennes en 2002.

Plus récemment, le Grand Paris Express a poursuivi les ambitions d’extension du transport souterrain en Île-de-France. Piloté par la Société du Grand Paris (SGP 12 ), créée en 2010, ce projet a donné lieu à la création de 200 km d’infrastructures (dont 100 km creusées, l’autre moitié réalisée par doublement de voie) et 68 gares (dont 90 % en souterrain, en zones denses). La géologie est au cœur de cette réalisation, ayant à faire avec différents types de risques : le risque carrière, le risque nappes, le risque de dissolution du gypse – une roche soluble – lié à la circulation d’eaux souterraines, le risque de retrait-gonflement des argiles.

Au-delà de la technique pure, la SGP a porté une attention particulière aux qualités architecturales des futures gares, envisagées comme véritables lieux de vie métropolitains et non comme de simples lieux de passage. L’agence Jacques Ferrier Architecture propose ainsi le concept de « gare sensuelle » pour construire « plus que des parcours », de mobiliser la lumière et les sons afin de concevoir dans chaque gare « une ambiance singulière » 13 .

Cette démarche a donné lieu à l’élaboration de trois chartes par la SGP (charte d’architecture et d’aménagement, charte de design des espaces et charte d’intégration des équipements dans leur environnement urbain), pour s’assurer du caractère homogène de ces gares, avec une attention portée à la relation dessus-dessous.

 

 

Dans les années 1900, Eugène Hénard propose dans Études sur les transformations de Paris 14 des rues à étages multiples dans lesquelles les circulations urbaines se font sous la surface.

La rue du futur d’Eugène Hénard comporte voies de chemin de fer pour collecte des déchets, transport de pondéreux et de marchandises, réseau d’air pneumatique, d’air liquide, voire d’eau de mer et « d’air pur » en dessous de la nouvelle rue urbaine envisagée au-dessus du sol naturel.

Mais c’est à Édouard Utudjian (1905-1975), architecte et ingénieur, que l’on doit la théorisation de l’urbanisme souterrain 15 . Il a en particulier fondé le Groupe d’Études et de Coordination de l’Urbanisme Souterrain (GECUS) en 1933, à 28 ans, puis en a été le secrétaire général et un ardent défenseur toute sa vie durant. Ce mouvement compte alors près de 400 membres dans le monde entier : ingénieurs, architectes, géologues, juristes, biologistes, chimistes, géotechniciens, etc. Afin de relier ces spécialistes de la construction souterraine, le Comité Permanent International des Techniques et de l’Urbanisme Souterrains (CPITUS), organise des congrès à partir de 1937 16 . Au sein de ce réseau, Utudjian a théorisé la conquête urbaine des profondeurs et été jusqu’à soutenir la supériorité de l’implantation de logements en sous-sol sur les logements de surface. Cette réflexion théorique sur le fait urbain, prônant le bien-être et la protection par l’enfouissement, peut être considérée comme le pendant « malheureux » de la Charte d’Athènes 17 .

 

Avec la création du GECUS, l’avènement de la ville « épaisse » fait des émules parmi les génie-civilistes avec la création de tunnels, parkings en ouvrages profonds, autoroutes urbaines, mais aussi, comme nous le verrons, parmi les architectes.

 

« Utudjian invente le concept d’ »urbanisme souterrain », et considère qu’il faut planifier la ville dans son « épaisseur » : l’avenir du sous-sol ne peut se concevoir sans celui de la surface mais la réciproque est également vraie. Toute sa vie, il promeut inlassablement sa thèse et obtient quelques brillantes réussites. Sa disparition ne sonne pas le glas du recours au sous-sol mais l’urbanisme souterrain, cher à son cœur, cède de plus en plus la place au seul tunnel. La réflexion de l’architecte et de l’urbaniste est peu à peu phagocytée par celle de l’ingénieur ; l’espace souterrain s’efface devant les infrastructures souterraines. » Citation de Marc-Emmanuel Privat dans Résistance et urbanisme souterrain, Le Journal Spécial’Z n°03, École spéciale d’architecture, 2012 .

 

 

LA STRUCTURATION PROFESSIONNELLE FRANÇAISE ET INTERNATIONALE

Fondée en 1974 à l’initiative de dix-neuf nations, l’International Tunneling and underground space Association (ITA) 18 a pour mission de « conduire, défendre et faciliter le développement de solutions durables et innovantes pour une utilisation accrue, optimisée, sûre et équitable des espaces souterrains ». Ainsi, l’objectif est de fournir à l’industrie des tunnels et à ses parties prenantes :

  • Des connaissances techniques dans le domaine du creusement des tunnels et des espaces souterrains par la publication de lignes directrices, la formation et la création de plateformes d’échange d’informations et d’idées ;
  • Des meilleures pratiques en matière de santé et de sécurité, de planification, d’ingénierie, de passation de marchés, de construction, d’exploitation et d’entretien ;
  • Des outils permettant aux décideurs et aux professionnels concernés de faire des choix éclairés concernant le sous-sol ;
  • Des solutions souterraines fiables et économiques pour relever les défis de l’urbanisation et de l’environnement ;
  • Des infrastructures souterraines efficaces et résistantes pour les générations actuelles et futures.

 

Depuis lors, l’ITA 19 s’est considérablement développée. L’Association Française des Tunnels et de l’Espace Souterrain (AFTES), sa branche française, a vu le jour en 1972. Elle a créé un comité ad hoc consacré aux espaces souterrains, dans la lignée des travaux et vision d’Édouard Utudjian, et soutient la formation et la spécialisation, en conception, réalisation et aménagement techniques des espaces souterrains (notamment l’étanchéification, sujet majeur).

 

 

LE SOUS-SOL REMIS AU GOÛT DU JOUR POUR TRANSFORMER LA VILLE

Les travaux et programmes de recherche qui, depuis le début du XXe siècle, ont structuré l’intérêt autour des sous-sols, ont été suivis dans les cinquante dernières années, par des travaux d’architectes (notamment ceux de Dominique Perrault), des programmes de recherche internationaux et français ou des opérations d’aménagement de grande ampleur (le Grand Paris Express).

 

 

LE GROUNDSCAPE, LE CONCEPT PRÉCURSEUR DE DOMINIQUE PERRAULT

Avec plus d’une cinquantaine de projets mettant en relation l’espace du dessus et l’espace du dessous, Dominique Perrault fait figure de précurseur en la matière. La première esquisse date de 1985 avec le concours pour l’Université de Droit et Lettres à Angers. Depuis presque 40 ans, Dominique Perrault Architecture (DPA) développe sa pratique du groundscape, ce néologisme composé de « ground » (sol, dans sa profondeur) et de « landscape » (paysage et action de le modeler).

 

L’agence réalise des bâtiments emblématiques qui jouent avec les profondeurs, ou plutôt avec l’idée d’épaisseur, pour créer des lieux ciselés permettant d’accueillir des usages précis. Bien souvent, le sol devient le toit du bâtiment, et il suffit de descendre pour trouver les nouveaux volumes créés, des nouveaux paysages intérieurs. Parmi les plus célèbres : la Bibliothèque François Mitterrand, avec ses tours mais surtout ses espaces en gradins subtilisant à la vue les salles de lecture et sa forêt intérieure, l’Université féminine Ewha de Séoul et ses étages gagnés en profondeur de la grande faille, le vélodrome et la piscine olympique de Berlin, totalement soustraits aux regards au milieu d’un verger de 500 pommiers » 20 .

 

 

L’architecture doit disparaître

« L’architecture doit disparaître » est l’accroche quelque peu provocatrice du texte d’ouverture du MOOC que Dominique Perrault a dirigé en 2020, avec l’École Polytechnique Fédérale de Lausanne (EPFL) et le SUB (laboratoire de recherche en architecture souterraine) . Ce texte dénonce une sous-exploitation de l’architecture souterraine, réservée à des bâtiments techniques et invite les professionnels à abandonner l’idée d’une architecture d’objet pour celle d’une architecture de lieu .

« Derrière le radicalisme de cette affirmation se cache quelque chose de crucial pour l’avenir de l’architecture. L’architecture en tant que discipline ne doit plus penser en termes d’objets. Les murs, les façades, les structures ne sont que des modalités de l’architecture, mais jamais sa finalité. Le design vient après. Après quoi ? Après les situations. Les architectes traitent des situations» 21 .

 

 

DEEP CITY, LE PROGRAMME INTERNATIONAL DE RECHERCHE SUISSE

La Suisse entretient une relation particulière avec le sous-sol. Pays de montagnes et de tunnels, mais aussi de bunkers souterrains dédiés à la protection civile » 22 , la Suisse a récemment légiféré sur le sujet du sous-sol (voir infra).

 

En 2005, le Fonds national suisse pour la recherche scientifique a lancé un programme sur le développement durable de l’environnement construit. Une proposition de recherche de ce programme était consacrée au sous-sol et a donné naissance au projet « Deep City » (2005 – 2009) qui, dans la mouvance de l’ITA, a exploré le développement urbain non plus comme surfacique, en deux dimensions, mais en trois dimensions. Ces travaux se sont fondés sur l’intuition qu’une richesse méconnue des urbanistes se trouvait en sous-sol et était gâchée… par ignorance» 23 . Ce programme cherchait aussi à répondre aux défis posés par sur des contextes historiques, climatiques, économiques et géographiques très divers : Paris et son métro, Mexico City et l’évolution de ses nappes d’eaux souterraines, ainsi que des cas d’étude au Sénégal, en Chine, à Hong Kong.

 

Parmi les hypothèses de travail de ce programme figurent deux grandes orientations :

  1. Pour peu qu’on le connaisse mieux et que cette connaissance soit intégrée par les aménageurs, le sous-sol est en mesure d’apporter de grands services à la ville durable et n’est pas seulement une source de danger et de complexité ;
  2. Les erreurs commises en matière d’exploitation du sous-sol sont fort coûteuses et rarement réversibles. Et pourtant, elles existent et auraient pu être évitées ou atténuées, avec davantage d’études, mais surtout de dialogue interprofessionnel 24 .

 

Il en a résulté un plaidoyer des géologues et hydrogéologues pour une meilleure intégration de la géologie au développement urbain. Avec la précaution oratoire « Le sous-sol, pas n’importe où, pas n’importe comment », Deep City a contribué à combler la méconnaissance réciproque, dangereuse entre le monde essentiellement souterrain des génie-civilistes et le monde essentiellement surfacique des aménageurs et promoteurs, qui se méfient du sous-sol, généralement comme source de problèmes financiers et de sécurité. C’est avant tout l’approche sectorielle qui est critiquée car elle ignore les conflits d’usage que peut subir l’espace souterrain.

 

Le programme a cherché à qualifier la nature-même du sous-sol urbain, qui peut être compris comme une ressource :

  • d’espace pour construire et densifier ;
  • en géomatériaux, avec les produits d’excavation à valoriser ;
  • en géothermie et géocooling, pour décarboner le chauffage et le refroidissement des bâtiments de surface ;
  • en eau potable

 

Les altérations causées par le développement urbain souterrain

En plus des connaissances sur la nature même des sous-sols, Deep City a contribué à rappeler l’importance des altérations causées par le développement urbain sur les profondeurs :

  1. Suppression des sols naturels et de leur fonction de nettoyage des eaux de surface,
  2. Fuites de canalisations d’eaux usées provoquant la pollution diffuse et généralisée des aquifères peu profonds,
  3. Accidents polluants (hydrocarbures, eaux usées industrielles, etc .),
  4. Excavations peu profondes entraînant une réduction de la protection des aquifères,
  5. Excavations plus profondes conduisant à plusieurs effets négatifs comme la rétractation à long terme de la nappe phréatique, le passage entre les eaux de surface (potentiellement polluées) et les eaux souterraines, l’obstacle à l’écoulement naturel des eaux souterraines, etc .

 

 

Ainsi, les tenants et héritiers de Deep City soutiennent que la géologie mérite une approche holistique et une réflexion sur la préservation et l’accès aux ressources sur plusieurs siècles. Cette préoccupation se doit d’être multidisciplinaire, axée sur la décarbonation et ancrée dans la gestion à long terme en prenant simultanément en compte les différents usages urbains de mobilité, de chauffage et de refroidissement des bâtiments. Ils posent la question de l’arbitrage à organiser de façon à dépasser l’adage « premier arrivé, premier servi » qui règne encore en maître sur le sous-sol suisse, et invitent à la planification de l’usage de ce milieu et de ses ressources.

 

Clé de Sol – Projet national pour le développement des galeries multi-réseaux (1999 – 2005)

Les galeries multi-réseaux sont des installations qui regrouperaient les réseaux urbains dans un même habitacle visitable, réduisant alors l’encombrement du sous-sol et les coûts d’entretien. Or elles sont peu développées au cours du XXe siècle, en raison de la complexité de conception de telles infrastructures . Un projet national consacré aux galeries multi-réseaux a été lancé en 1999 pour fournir aux maires et acteurs de la ville un guide pratique . Le conseil général des Ponts et Chaussées, l’université Lyon III, la ville de Paris, l’APSYS-EADS, VINCI Concessions, Egis et l’IREX ont codirigé le projet, qui a donné lieu à des publications telles que le Guide pratique des galeries multi-réseaux, un colloque international et des articles dans la revue Travaux .

Ces travaux marquent une volonté d’équiper les acteurs de la ville et les élus d’outils pour appréhender certaines infrastructures souterraines . Ils ont abouti à un apport certain en matière d’aménagement du sous-sol, mais de nombreuses autres dimensions restent à explorer .

 

« VILLE 10D – VILLE D’IDÉES », LE PROGRAMME FRANÇAIS

L’AFTES et plus particulièrement le groupe de travail COMES (Comité Espaces Souterrains) soutient l’idée d’une utilisation raisonnée et optimale de l’espace souterrain pour contribuer au développement d’un nouvel urbanisme. Cette nouvelle pensée urbaine est résumée dans son titre-slogan : « Différentes Dimensions pour un Développement urbain Durable et Désirable Décliné Dans une Dynamique Dessus-Dessous ». Également appelé « ville 10d – ville d’idées », le programme visait bien à amener des idées opérationnelles nouvelles, différentes des réflexes établis dans un dialogue entre espaces urbains de surface et espaces souterrains.

 

Le programme d’études destiné à mieux cerner les contributions possibles du sous-sol à la ville durable est ainsi lancé en 2012 25 avec l’appui de l’Institut pour la Recherche appliquée et l’EXpérimentation en génie civil (IREX). Avec 31 partenaires mobilisés pour promouvoir l’utilisation et la valorisation urbaine du sous-sol dans le contexte d’une métropole durable, et un budget prévisionnel de 5,3 millions d’euros, la question n’est pas tant « faut-il ? » mais « comment investir le sous-sol ? », et surtout « comment lever les obstacles et les réticences à son utilisation ? ».

 

Le programme de travail s’est articulé autour de cinq dimensions :

  • La dimension socio-économique : le surcoût des excavations et de ce qu’elles entraînent (issues, aérages ) peut-il être compensé et au-delà par des avantages directs et indirects de l’aménagement du sous-sol, monétaires et non-monétaires ? Une des retombées possibles de cette étude en coût global est de mettre en exergue les usages préférentiels du sous-sol dans la planification urbaine.
  • La dimension environnementale : permettre d’évaluer et de maîtriser l’impact des projets souterrains à l’échelle du projet et du territoire. Il s’agit de mettre en évidence les spécificités des aménagements souterrains et d’apporter les éléments d’évaluation et de bilans environnementaux qui permettront de justifier de leur caractère durable.
  • La dimension psycho-sociale : comment garantir l’acceptabilité et la qualité des aménagements ? Cet axe interroge les conditions grâce auxquelles les espaces urbains implantés en sous-sol pourront s’articuler avec la ville pour répondre aux attentes d’usage et d’agrément.
  • Les enjeux de visibilité, connaissance et gestion des données : comment rendre accessible le sous-sol aux différents acteurs en adaptant la lisibilité des données à leur niveau de besoin, et apporter les outils nécessaires à la connaissance du sous-sol, aux croisements de ses enjeux et à la maîtrise de  l’ensemble des risques inhérents à l’utilisation de l’espace souterrain ? Il s’agit de contribuer à la mise en forme et à l’expression en trois dimensions des stratégies retenues par la planification.
  • Les aspects juridiques : quelles seraient les évolutions souhaitables du cadre juridique pour mieux l’articuler à celui du « sursol » (droit de l’urba- nisme notamment) et faciliter un usage plus optimisé et plus durable de l’espace souterrain ?

 

Ces cinq dimensions se sont articulées autour d’objets urbains qui correspondent à quatre morphotypes urbains : la réutilisation de cavités existantes, la conquête de l’intérieur d’un plateau, l’urbanisme de dalle, le projet combiné à des infrastructures de transport existantes ou en projet.

 

Dans le dernier rapport d’étape remis en mars 2017, une question s’imposait : « Comment évaluer l’alternative souterraine ? ». La logique socio-économique dominante impose en effet de prouver l’intérêt des solutions techniques avant d’en valider la décision. En 2017, les outils conceptuels étaient encore à l’étude : « Ville 10d a pour objectif de proposer des outils pour évaluer l’intérêt socio-économique et social d’une réalisation souterraine. Il s’agit de mettre en évidence les usages préférentiels du sous-sol, d’évaluer les coûts et les surcoûts des aménagements souterrains, d’évaluer les avantages et inconvénients directs et indirects de ces aménagements. Un état de l’art des outils d’évaluation socio-économique a été réalisé afin de recenser les pratiques en France et à l’étranger et les outils et les démarches existantes en la matière. » 26 .

 

Ainsi, après avoir établi un état des lieux de l’aménagement de l’espace souterrain, les chercheurs et entreprises partenaires avaient à cœur d’élaborer des propositions et recommandations pour lever les obstacles à l’usage urbain du sous-sol et pour améliorer les conditions de son aménagement. L’ouvrage présentant l’ensemble des résultats est à paraître en 2024.

 

Finalement, si les exemples internationaux et l’histoire des théories de l’aménagement souterrain témoignent d’une ambition et d’une activité intellectuelle continue, le sous-sol demeure néanmoins un espace mal connu dont les usages sont rarement pensés dans une stratégie globale. D’autant que les connaissances du sous-sol, à faible comme à grande profondeur, sont insuffisantes pour permettre l’élaboration d’une stratégie globale et donc d’une articulation cohérente entre ses différents usages possibles.

 

À faible profondeur, il existe peu de cartes et de modèles 3D, la localisation des réseaux techniques n’étant pas toujours connue. Le risque d’effondrement, d’au- tant plus fort que les sous-sols sont mal connus, complique les potentiels projets d’aménagement. À grande profondeur, les connaissances géologiques peuvent être très précises, mais aussi très localisées et fragmentaires. Les connaissances existent, à différentes échelles – de 1/1000ème à 1/80000ème 27 – mais on manque de données harmonisées, – et donc opérationnelles. Un chantier pour agréger les données géologiques du Bassin parisien est en cours, notamment car il recouvre un fort potentiel de géothermie urbaine.

 

Au-delà de la conception des réseaux techniques et des recherches qui y sont consacrées, les sous-sols ne sont pas réellement intégrés dans des stratégies d’aménagement, des documents d’urbanisme, qui restent des outils de planification de la surface. Ce qui s’explique par le manque de précision dans la connaissance du sous-sol, mais également par des considérations juridiques, qui rendent son aménagement complexe. En effet, la propriété de la surface emporte la propriété du sous-sol, et ce jusqu’au centre de la Terre 28 . La plupart des réseaux dépendant du droit des chaussées, des infrastructures souterraines qui ne suivraient pas le plan de celles en surface feraient face à une complexité administrative supplémentaire.

 

Pour toutes ces raisons, l’appropriation du potentiel et le développement des usages des sous-sols n’ont jamais été massifs. Ce sont pour l’instant des expérimentations, qui doivent faire preuve d’inventivité pour surmonter ces difficultés. D’un côté, les penseurs et les utopies, de l’autre, la mise en œuvre et l’exploration concrète des infrastructures en sous-sol, nécessitant des expérimentations.

Ces expérimentations donnent vie – dans des proportions pour l’instant très mesurées – à cette folle idée de la ville souterraine, en étudient les qualités et les contraintes, et permettent d’en illustrer les différents usages. À ce propos, une approche stratégique globale sur l’utilisation du sous-sol s’avérera nécessaire pour arbitrer et définir quelles en seront les priorités face aux obstacles financiers, juridiques, administratifs, mais aussi de la préservation des sols, etc.

 

Partie 2 – Des utopies à une utilisation stratégique du sous-sol

Le sous-sol apparaît aujourd’hui de plus en plus comme un sujet urbain. D’une forme d’opportunité technique à saisir, il semble être en passe de devenir une nouvelle nécessité, une option pour répondre aux nombreux défis de la ville adaptable et résiliente. Après le temps des promesses, il semble que nous en- trions dans une dynamique d’appropriation, orientée vers la mise en œuvre et l’expérimentation.

 

La transition et l’intensification de ce foncier invisible souterrain pourra faire partie de la réponse à des enjeux aussi forts que la production de la ville com- pacte, le développement de la logistique urbaine du dernier kilomètre, la création de solutions de chauffage ou de fraîcheur urbaine décarbonées. Les exemples que l’on présente dans cette partie abordent successivement les sujets de reconversion d’espaces souterrains désaffectés (§1), l’intensification des usages (§2), le sous-terrain comme refuge face aux épisodes caniculaires (§3), le tout interrogeant l’opportunité de l’élaboration d’une stratégie globale d’ampleur, notamment en France (§4).

 

1. DES EXPÉRIMENTATIONS ET DES USAGES TACTIQUES DU SOUS-SOL

ASSURER LA TRANSITION D’ESPACES SOUTERRAINS « DÉSAFFECTÉS »

 

Lorsque le foncier disponible est déjà rare, lorsqu’il s’agit de limiter l’extension de la ville au-delà de son périmètre actuel, il est utile de chercher des espaces à reconquérir. Confrontée à la densité de son tissu, Paris est particulièrement concernée. Les espaces existants et non affectés sont en cela extrêmement intéressants et la logique de leur reconversion semble désormais s’imposer. Et c’est là tout l’intérêt des expérimentations et autres innovations amenées par les appels à manifestation d’intérêt.

 

Fort du succès et des résultats obtenus par l’appel à manifestation d’intérêt « Réinventer Paris » en 2014 29 avec 23 sites parisiens propriétés de la Ville de Paris (ou de ses partenaires) livrés à la sagacité et à l’appétit créatif d’acquéreurs-investisseurs, c’est dans ce même esprit qu’une sélection de lieux a été proposée pour « Réinventer Paris 2 » axé, cette fois-ci, sur la transformation des souterrains sur 31 sites. En janvier 2021, la Ville de Paris dévoilait au Pavillon de l’Arsenal les 20 nouveaux lauréats. 217 projets avaient été proposés, démontrant ainsi l’attractivité de la démarche auprès de porteurs de projets qui ont « redoublé de créativité pour réaménager des parkings, des tunnels ou encore des stations de métro désaffectés » 30 .

 

Parmi ces lauréats, beaucoup de projets sont teintés d’une forte dimension culturelle, festive, commerciale ou hôtelière. Le projet-lauréat du site du Grenier Saint-Lazare retient particulièrement l’attention tant par son objectif que par son montage économico-juridique très spécifique afin de passer d’une fonction de stationnement à une fonction de logistique urbaine de proximité. Il s’agit en outre de l’unique réalisation livrée à ce jour de l’opus « Réinventer Paris 2 ».

 

« L’IMMEUBLE INVERSÉ » DU GRENIER SAINT- LAZARE (SOGARIS) : INITIATIVE PIONNIÈRE ?

Le rue du Grenier Saint-Lazare est une petite portion de rue située entre la rue Beaubourg et la rue Saint-Martin dans le IIIe arrondissement de Paris. Dans ce lieu particulièrement dense de la capitale 31 se trouvait un parking en infrastructure d’un ouvrage, par monte-charge, sur six niveaux de profondeur. L’exploitant, Indigo, n’ayant jamais rencontré son public ni la rentabilité attendue, ce site était en déshérence et voué à désaffection. « Réinventer Paris 2 » a permis au groupe- ment mené par Sogaris de faire une proposition de mutation pour faire de ce lieu une surface de logistique de proximité offrant des espaces de remisage pour les commerçants environnants (mobilier de terrasse, petit matériel et denrées non périssables) et un espace de logistique urbaine classique orientée cyclo-logistique avec dépalettisation, dispatch et organisation des colis-cyclo.

 

Visible depuis l’espace public, un kiosque contemporain fait de verre et de bois pour recevoir les locaux d’une conciergerie de quartier, un escalier pour rejoindre les locaux de l’entreprise de cyclo-logistique (bureaux, vestiaires…) et une « salle à la demande », destinée à être louée à des riverains ou pour des activités sportives urbaines. Un petit édicule, situé de l’autre côté de la voirie, reçoit une issue de secours et complète le dispositif.

 

Les six niveaux de sous-sol organisés de part et d’autre d’une grande « nef » et son monte-charge sur rail pour y déposer les véhicules ont été fondamentalement transformés. D’abord en comblant cette nef par le prolongement des planchers, faisant passer la surface à 1 475 m². Mais transformer des espaces souterrains n’est pas sans peine et plusieurs sujets d’ordres techniques, juridiques et administratifs, ont ponctué les différentes étapes du projet.

 

Techniquement, soulignons qu’il est important pour tout espace logistique d’avoir une certaine hauteur sous-plafond et une certaine portance au sol, d’autant plus quand le mètre carré bâti coûte cher. Dans le grenier inversé, il n’y a ni l’un ni l’autre. Il fallait donc trouver des solutions pour optimiser l’efficacité et la rentabilité de ces espaces (taille et accessibilité des ascenseurs et des cellules de stockage en sous-sol). Par ailleurs, il était exclu d’envisager toute modification notoire de la structure externe. L’application de la réglementation incendie a été déterminante. Les sous-sols étant considérés comme des espaces à risques, les services départementaux d’incendie et de secours (SDIS) sont particulièrement vigilants quant aux mesures prises pour endiguer les risques et en limiter les incidences.

 

Juridiquement, la manière de se rendre acquéreur des lieux a constitué un enjeu : car avec les appels à manifestation d’intérêt « Réinventer Paris », la Ville de Paris avait bien pour objectif de vendre du foncier. Ce parking de la rue du Grenier Saint-Lazare appartenait à la Ville de Paris et faisait l’objet d’une délégation de service public. L’ouvrage étant intégralement surplombé par la voirie et la propriété du dessus emportant la propriété du dessous, la vente du parking était délicate. L’AMI a ainsi été l’occasion de « réinventer » le droit et de faire évoluer la doctrine notariale 32 . Sogaris fut rendu acquéreur d’un volume d’air à l’intérieur de la structure, qui elle, restera propriété de la Ville.

 

Administrativement, restait le sujet du permis de construire. Le futur maître d’ouvrage devait obtenir le permis sous condition de la description de l’activité du futur exploitant. En l’occurrence, le Grenier Saint-Lazare s’est conformé à la même réglementation que pour du personnel de maintenance de parking : pas de « poste de travail » à proprement parler en sous-sol.

 

Ces constats posent la question d’une possible réplication de ces aménagements, alors que la logique de décarbonation de la logistique urbaine inviterait volontiers à reproduire ce type de réalisations de proximité 33 . L’Atelier Parisien d’URbanisme (APUR) a ainsi contribué à recenser les zones qui pourraient être (re)converties en espaces logistiques 34 dans le cadre de l’élaboration du PLU-Bioclimatique devant définitivement voir le jour en 2025. À ce stade, c’est surtout le potentiel d’évolution qui est pressenti. L’approche quantitative et qualitative du « réservoir » de lieux mutables n’est pas encore totalement disponible.

 

Notons tout de même que le groupe Indigo indiquait gérer environ 1,5 million de m² de surface de stationnement souterrain. « C’est la surface cumulée de 13 tours Montparnasse », indiquaient-ils en 2020 dans l’étude commandée à DPA-X avec Dominique Perrault Architecture 35 . Même si l’automobile et d’autres moyens d’acheminement et de livraison sont encore loin de disparaître de nos villes, ces surfaces de stationnement représentent une ressource potentielle pour la transition urbaine.

 

« LA CATHÉDRALE » ET LES ESPACES SOUS-DALLE (LA DÉFENSE) : L’ÉVÉNEMENTIALISATION COMME VECTEUR DE TRANSITION ?

Les espaces qui n’ont pas de fonctions attitrées font des curieux, c’est le cas des espaces souterrains de La Défense, qui figurent parmi les lieux d’investigation du programme national « ville 10d – ville d’idées ». Leur sous-exploitation étonne. Quelle pourrait être une contribution de ces espaces à la ville durable ?

 

Le quartier de La Défense a été pensé et construit dans une logique d’expansion progressive, envisageant dès les origines le déploiement, voire le doublement, de certains de ses espaces, notamment de transport. Des boulevards et autres salles d’échanges ont ainsi vu le jour sans pour autant être mis en service.

D’autres connaissent une déprise et sont moins utilisés que par le passé, comme les vastes surfaces de parkings souterrains. Il en résulte de très importants espaces souterrains résiduels, posant des problèmes d’occupation et de gestion 36 , et qui attirent bien des convoitises.

 

Souvent considérés comme « une manne souterraine enfouie et inexploitée » 37 , ces lieux rencontrent un courant de pensée qui prône « l’urbanisme de transformation » 38 . Jusqu’ici, les sous-sols de La Défense ont surtout été mobilisés pour des occupations artistiques plus ou moins officielles ou détournées. En février 2024, l’espace sous-dalle « Cathédrale » a accueilli la 6e édition d’une exposition d’art contemporain proposé par le collectif « Les Interstices » et baptisé « Les Extatiques » 39 .

 

L’exposition d’art contemporain, « Les Extatiques », offre l’occasion d’explorations urbaines et de découvertes de lieux méconnus : l’espace sous-dalle « Cathédrale » à Paris La Défense. Imaginée par le collectif Interstices, le festival Extatiques explore les thématiques de l’urbanisme contemporain : «l’artificialisation des sols, du gaspillage du bâti, ou encore de la consommation» 40 .

 

Les organisateurs ne s’y sont pas trompés, l’intérêt du public est massif et l’ex- position se déroule à guichet fermé à chaque édition. La question reste pourtant posée, au-delà de l’événementiel, de la transition possible de ce type d’espaces atypiques et contraints en d’autres fonctions et usages. Restaurants (cf. Square Table, initiative de food court de luxe lancée en 2020) ? Usines urbaines ou laboratoires (tirant parti de la facilité de desserte et de l’écosystème de La Défense) ? Le destin des sous-sols de La Défense sera inévitablement lié à la dynamique de ce quartier d’affaire dans les prochaines années. Mais cette indétermination a priori est assez révélatrice de notre relation aux espaces souterrains.

 

CE QUE LES OPÉRATIONS TEMPORAIRES NOUS APPRENNENT SUR LE RAPPORT DES CITADINS AU SOUS-SOL

Les climathons et les opérations d’investissement exploratoires des espaces souterrains, les festivals et les approches artistiques et culturelles des sous-sols (galerie d’art dans les tunnels, soirées de la petite ceinture, food court dans les stations de métro fantômes) : toutes ces initiatives soulignent le besoin de composer avec les imaginaires. Le sous-sol fait peur et attise les curiosités : en témoignent le succès des soirées (souvent clandestines) sous terre et la fascination des cataphiles. Pour réduire les aspects anxiogènes des sous-sols, et rendre ces espaces agréables au quotidien (parkings, couloirs du métro), il est nécessaire de maîtriser de nombreux paramètres. Outre les caractéristiques techniques (renouvellement de l’air, prévention des incendies et des inondations), une attention particulière est portée à l’ambiance générale des lieux : propreté, aménagement de l’espace, lumière, acoustique, signalétique, parfums. Les exploitants d’espaces souterrains commerciaux (notamment parking) ont en la matière une expérience de quelques décennies. En ce sens, les aménagements souterrains temporaires, à défaut d’être directement « transitoires », permettent de mieux percevoir les attentes des usagers.

 

INTENSIFIER L’USAGE DU FONCIER

Le sous-sol est la troisième dimension, celle de la verticalité vers les profondeurs. Elle est logiquement évoquée lorsque la question de la densification et de l’intensification des usages du sol est abordée. Le Schéma directeur de la région Île-de-France (SDRIF-E), ouvre son chapitre 3 par la thématique « intensifier le renouvellement urbain » et évoque sans plus de détail les aménagements en sous-sol comme une piste pour y prétendre. Comment cela peut-il se traduire et s’ancrer dans les pratiques ?

 

Le travail de bilan réalisé à l’occasion de cette note fait apparaître deux figures fortes, l’une par une approche patrimoniale et foncière (la transformation des
centres-bus RATP), l’autre par une approche thématique (les lieux de pratique sportive urbaine).

 

DE CENTRE-BUS À CENTRALE DE MOBILITÉ (RATP) : QUAND UN SITE EST TRAVAILLÉ EN PROFONDEUR

En regroupant en 2021 les activités de ses filiales sur l’énergie, l’immobilier, les télécommunications, la logistique et les nouvelles mobilités sous la bannière unique RATP Solutions Ville, le groupe RATP a affiché ses intentions de faire valoir son expertise plurielle. Des opérations de maintenance majeures étant nécessaires tous les 25 à 50 ans sur ses centres de maintenance et remisage de bus, le groupe a saisi l’opportunité d’appliquer une logique d’optimisation foncière et de création de valeur. Ainsi, le centre bus Belliard, dans le XIIIe arrondissement de Paris va totalement se transformer à l’occasion de sa conversion à l’électrique. En effet, le site monofonctionnel d’un hectare au sol est en passe de devenir 41 une « centrale de mobilité », créant alors de l’espace pour les activités de maintenance et de remisage, la création de logements (en lien avec Paris Habitat), de bureaux, de commerces, d’activités logistiques avec équipement sportif privé et jardins partagés, etc. Cela demandera l’excavation de deux niveaux. Le besoin de départ était clair : optimiser un lieu plein à craquer la nuit et totalement vide en journée en créant le maximum de valeur, tout en proposant un urbanisme contemporain propre à garantir le maintien d’une activité industrielle et logistique en plein centre urbain.

 

Ce n’est certes pas la première fois qu’une telle opération voit le jour dans le giron de la RATP 42 , mais c’est la première fois que l’usage du foncier est ainsi intensifié avec l’intégration d’une activité de logistique urbaine utilisant le sous- sol. Désignés à la suite d’un appel à manifestation d’intérêt incluant des critères sociaux et environnementaux, Amazon et Chronopost se chargeront des activités de cross docking compatibles avec le voisinage 43 .

 

Ce type d’expérimentation d’intensification du foncier est aujourd’hui renouvelée dans le cadre de l’AMI Réinventer Paris 3, consacré aux locaux tertiaires vides. RATP Solutions Ville a en effet été déclaré lauréat aux côtés de BNP Paribas Real Estate, pour inventer l’avenir des 25 000 m² de l’ancien siège de l’APHP 44 face à l’Hôtel de Ville. Renommée « Les Arches Citoyennes » et devant se dérouler de 2023 à 2027, l’opération intègre l’îlot Sain-Martin (sous maîtrise d’œuvre Dominique Perrault Architecture) et l’îlot Victoria (sous maitrise d’œuvre Agence H2O, Agence NDBA et Agence MBL). Elle comportera là aussi une nouvelle « centrale de mobilité » faisant la part belle au vélo.

 

LE  SOUS-SOL AU SERVICE DE L’INVENTIVITÉ FONCIÈRE : L’EXEMPLE DES ÉQUIPEMENTS SPORTIFS

Dans des zones tendues, l’aménagement de nouveaux quartiers et équipements publics peut s’avérer très coûteux. L’optimisation de l’aménagement des terrains est parfois nécessaire pour équilibrer les opérations et conduit à des formes de sobriété foncière bienvenues.

 

La question de la spatialisation de la pratique sportive en Île-de-France est cruciale. En effet, les installations sportives sont souvent horizontales et l’espace réclamé se retrouve facilement en concurrence avec l’espace foncier créateur de valeur. Une étude menée par l’Institut Paris Région montre qu’un mouvement 45 est à l’œuvre chez les aménageurs et opérateurs immobiliers pour trouver des solutions d’intensification foncière qui puissent intégrer et combiner verticale- ment les besoins d’espaces d’une pratique sportive. L’une d’elles est de mobiliser le sous-sol et les toitures.

 

Par exemple, dans le cadre de la programmation d’un îlot à Saint-Denis, Sequano Aménagement a pensé l’installation d’un gymnase multisport en cour anglaise – une cour au niveau du sous-sol, encaissée entre la rue et la façade d’un bâtiment, à la base d’une résidence étudiante. Comme il n’est pas complètement souterrain, son accès indépendant à la résidence est préservé et il est visible depuis la rue. Autre exemple, le projet Chapelle Internationale, porté par SNCF Immobilier prévoit l’installation d’un gymnase semi-enterré, en dessous d’un immeuble de bureau, et sur sa toiture, des terrains de tennis et basket.

 

2. Intégrer désormais le sous-sol dans une stratégie d’ampleur

La dynamique entre le dessus et le dessous pour une ville résiliente nécessite, peut-être plus encore que d’autres sujets stratégiques, une approche globale, décloisonnée et interdisciplinaire. Jusqu’ici sans pression d’usage manifeste, les différents potentiels du sous-sol pourraient à terme réclamer des arbitrages. Le sous-sol devra donc faire l’objet d’une véritable régulation, comme le montrent nos voisins suisses.

 

LA SUISSE SE DONNE UNE STRATÉGIE POUR UNE UTILISATION DURABLE DU SOUS-SOL

En 2020, le Conseil fédéral suisse a engagé une démarche collective avec 120 partenaires pour bâtir une « Stratégie Sous-sol Suisse ». Le travail a débuté par une démarche d’interrogation prospective en ateliers de travail pour partager les enjeux et se donner du champ, qui a donné lieu à la publication d’un fascicule par le département de la Défense, de la Protection de la population et des Sports.

En 2023, elle a adopté une stratégie pour une utilisation durable du sous-sol et une loi contre le mitage urbain, qui la conduit à intensifier l’usage de l’existant, y compris les infrastructures souterraines. Dans cet État fédéral, des variations locales notables peuvent coexister d’un Canton à l’autre : certains ont interdit l’exploration des hydrocarbures et soutiennent désormais énergiquement le dé- ploiement de la géothermie. En matière de géothermie profonde, il faut noter que malgré l’engouement, les résultats ne sont pas toujours au rendez-vous. Cela est dû au plissement des Alpes : moins de porosités et de fracturations qu’ailleurs, et des eaux chaudes en quantité souvent insuffisante pour assurer une exploitation rentable des installations. Pourtant, les projets se poursuivent et s’intensifient.

 

Quatre « mégatendances » ont été explorées : changement climatique et transition énergétique ; urbanisation et mobilité ; numérisation ; opportunités et risques.

La réflexion s’est ensuite construite autour d’un constat et d’un besoin. Le constat est le suivant :

  • L’utilisation du sous-sol peu profond est désorganisée. C’est le règne du « premier arrivé premier servi ». Des tensions sont engendrées par l’utilisation du sous-sol profond ;
  • La gestion des géoressources est cruciale mais sous-estimée en ce qui concerne les eaux (80 % de la ressource en eau potable se trouve en sous-sol), les minerais et hydrocarbures, et les formes de vie microbiologiques ;
  • Il n’est pas certain que l’on disposera de suffisamment d’espaces sou- terrains pour tous les usages : stockage (d’hydrogène, de dioxyde de carbone, de déchets nucléaires), transport souterrain de personnes et de marchandises, protection civile en cas de catastrophe ;
  • La gouvernance entre échelons administratifs en matière de gestion du sous-sol doit faire l’objet d’une réorganisation ;
  • Il est important de mobiliser le savoir-faire en matière d’aménagement du sous-sol à l’échelle fédérale, mais aussi comme compétence à faire valoir à l’export.

 

Ce diagnostic conduit à une insatisfaction et met en évidence un besoin nouveau : celui d’équilibrer préventivement des tendances contraires. Les intérêts d’exploitation et les intérêts de protection n’étant pas en phase, il devient nécessaire d’élaborer une stratégie d’ensemble. Il s’agit d’être rapidement en mesure de procéder aux arbitrages entre intérêts particuliers et bien commun, ainsi qu’entre usages immédiats et approche long-terme pour les générations futures.

 

Deux grands axes dessinent les contours de cette stratégie : avoir une connaissance approfondie de la question des sous-sols et avoir une approche pluridisciplinaire et intergénérationnelle.

 

MOBILISER LE SOUTERRAIN DANS UNE LOGIQUE D’ADAPTATION : LES PRÉMICES D’UNE STRATÉGIE EN RÉGION PARISIENNE

La Ville de Paris et la région parisienne ont expérimenté ces dernières années des vagues de chaleur et épisodes caniculaires qui ont démontré l’urgence de penser l’adaptation des territoires et de poursuivre l’atténuation du changement climatique 46 . C’était le sujet du Climathon Paris 2017, intitulé « Challenge canicule : 24 h pour trouver une solution ». Une des équipes participantes s’est intéressée au sujet du sous-sol, ses aménagements pouvant en effet s’inscrire dans une stratégie de développement durable et circulaire de la ville, pour à la fois réduire les émissions de gaz à effet de serre (par exemple en y développant des mobilités décarbonées ou produire de la chaleur et du froid renouvelables) et s’adapter aux évènements climatiques extrêmes.

 

Plusieurs organismes se sont penchés sur les usages possibles du sous-sol pour lutter contre les causes ou les effets du dérèglement climatique. La mission d’information et d’évaluation du Conseil de Paris en matière d’adaptation à une trajectoire à +4°C, les travaux de l’APUR en lien avec l’INSERM, le CAUE et l’Inspection générale des Carrières ont notamment contribué à penser de manière globale ses potentiels en région parisienne.

 

PARIS À 50° – MISSION D’INFORMATION ET D’ÉVALUATION DE LA VILLE DE PARIS

Le Conseil de Paris a mené à compter d’octobre 2022 une mission d’information et d’évaluation (MIE) 47 composée de 15 élus parisiens sur le devenir de la capitale dans une trajectoire de réchauffement climatique à +4°C. La volonté était de déterminer « ce dont nous avons besoin pour vivre ensemble » plutôt que « ce à quoi il va nous falloir renoncer ». En a résulté un rapport paru en avril 2023 après six mois de travaux collectifs.

 

Sans être affiché comme une solution en soi, le recours au sous-sol traverse les recommandations élaborées. D’abord par la « négative » : lorsque le sous-sol est saturé de réseaux, il est difficile d’accéder à la pleine terre pour obtenir un bon développement racinaire et donc de végétaliser la ville. Il en va de même avec les stationnements en surface qui doivent être implantés en sous-sol pour libérer de l’espace. La géothermie de surface est aussi évoquée comme solution de rafraîchissement (géocooling), via les eaux des nappes phréatiques.

 

Enfin, l’idée de prévoir des abris thermiques en zones climatisées ou en zones naturellement plus fraîches comme le sous-sol est évoquée. Une curiosité naturelle s’exprime alors pour des lieux comme le tunnel de la Petite Ceinture ou celui de Concorde aux quais de Seine rive droite, les espaces existants sous le Jardin du Louvre ou encore la section souterraine du Canal Saint-Martin entre Bastille et République.

 

L’art et la culture, et les espaces (Établissements Recevant du Public – ERP) qui leur sont consacrés, sont aussi considérés comme de bonnes entrées en matière dans la réflexion sur les promesses du sous-sol. La question de l’accès à des lieux frais ou rafraîchis 48 grâce aux réseaux de froid, tels que des musées, des cinémas, des équipements pourrait être travaillée pour offrir un répit, voire un abri thermique aux populations en souffrance. Ces usages devraient faire l’objet d’études ad hoc.

 

 

Logement, canicules et santé : la contribution de l’Apur et de l’Inserm

L’APUR ayant conduit des travaux sur la lutte contre les îlots de chaleur urbains et l’adaptation du bâti 49 , elle a été partie prenante de séances de travail et visites pour alimenter les réflexions de la mission d’information et d’évaluation .

À ce titre, l’APUR et l’INSERM se sont lancés dans une collaboration pour étudier la variation des effets sanitaires d’une canicule en fonction du type de logement habité . L’été 2023 a permis de commencer à sérier les situations suivant les caractéristiques du logement occupé, et a confirmé le potentiel de l’inertie thermique de la pleine-terre . Quelques figures-types se dessinent, et le pavillon avec sous-sol semi-enterré et non-isolé est le grand gagnant en matière de fraîcheur . Pendant l’été 2024, une cohorte de 200 personnes mettront à contribution leurs données de santé .

 

 

« VERS PARIS 2050 » – AFFRONTER ENSEMBLE LES DÉFIS DE NOTRE SIÈCLE ET EN CONSTRUIRE LE RÉCIT

La démarche Paris 2050 est conduite par la Ville de Paris et le CAUE pour « se mettre en scène en 2050 », en « partant des récits des Parisiennes et des Parisiens » 50 . C’est à partir de consultations étudiantes, d’ateliers pédagogiques, d’appels à projets artistiques et d’ateliers d’écriture, menés de septembre 2022 à mars 2024, que s’est enclenchée cette dynamique prospective.

 

La thématique du sous-sol a été abordée lors d’une des quatre soirées de l’exposition au Pavillon de l’Arsenal 51 , ce qui a permis de pointer l’appétence des Parisiens pour les espaces naturellement frais et d’interroger les conditions de leur mobilisation en période de chaleur extrême.

 

 

Une lecture des limites et précautions

L’Inspection Générale des Carrières (IGC) est un service de la Ville de Paris rattaché à la direction de la Voirie et des Déplacements . Créée dès 1777 pour gérer les vides creusés sous la ville depuis le Moyen-Âge, l’IGC a une mission de prescription régalienne sur le périmètre de Paris et sa première couronne . Elle a pour vocation de veiller à ce que les anciennes carrières et les cavités naturelles ne créent pas de désordre en surface, et doit donc connaître les risques, – à travers la tenue d’une cartographie fine, au 1/1 000e ainsi que les niveaux des nappes phréatiques . Finalement, elle doit surveiller l’évolution des zones de dissolution du gypse antéludien 52 , des retraits-gonflement d’argiles et l’état des anciennes carrières .

Notons que l’IGC n’est maître d’œuvre pour le compte de la Ville de Paris que lorsqu’il est nécessaire d’intervenir sur des cavités se trouvant au droit des voiries ou des jardins publics, – puisque lorsqu’un problème survient sur une cavité située sous une propriété privée, c’est cette dernière qui en a la charge .

 

 

Les contributions de l’Inspection Générale des Carrières permettent d’évaluer le potentiel des espaces souterrains de la région parisienne en fonction de la faisabilité de certains projets et de l’état de la connaissance de ces espaces. Parmi les sujets évalués, la désimperméabilisation des sols. Les eaux pluviales génèrent des circulations d’eaux souterraines – plus qu’une diffusion homogène – qui peut causer des désordres en surface 53 . Certaines collectivités commencent à enregistrer des contentieux impliquant la désimperméabilisation 54 . S’il paraît tentant d’utiliser des espaces souterrains comme refuges, la possible dégradation des qualités thermiques lors d’une intervention de mise aux normes ou certains risques menaçant les espaces souterrains peuvent les rendre inutilisables.

 

« SOUS-SOL, BIEN COMMUN », LE PEPR FRANÇAIS

À une échelle nationale, et dans cette même intention d’appréhender le sous-sol d’une façon plus intégrée, un Programme et Équipement Prioritaire de Recherche (PEPR) a été lancé début 2023. Porté par le BRGM et le CNRS et intitulé « Sous-sol, bien commun », ce programme de recherche a pour objet l’utilisation et l’exploitation responsable et durable du sous-sol. Avec un budget de 71 millions d’euros sur 7 ans et un point de chute attendu pour 2030, ses objectifs font écho à la démarche suisse. Car il n’est de stratégie qui ne s’appuie sur un socle commun de connaissances, le PEPR forme ce premier maillon.

 

En effet, la connaissance du milieu souterrain est centrale dans le programme et fait l’objet des work package 1 (connaissance géologique et géotechnique du sous-sol) et work package 2 (maquette numérique 3d du sous-sol). Les questions de stabilité, d’hydrologie, de stockage souterrain ou de réserves profondes feront également partie des problématiques étudiées. L’intégration des maquettes BIM du réseau RATP, et leur couplage au modèle géologique fera partie du deuxième package.

 

Le PEPR cible cinq chantiers géographiques auxquels sont liés des types de ressources et des usages spécifiques du sous-sol. L’un de ces chantiers comporte une dimension urbaine prononcée, celui du centre du Bassin parisien 55 .

 

Le work package 3, ville souterraine durable, prend le nom de « projet S-Pass » à Paris et sous le sol parisien. Mobilisant 3 millions d’euros sur 7 ans, il démarre en 2024 et rassemble 10 partenaires (dont l’École des Ponts, la RATP, l’Université Paris Saclay, le CETU, la Métropole du Grand Paris et la Société des Grands Projets). Son périmètre d’étude est calé sur l’emprise du Grand Paris Express et explorera les possibilités sur une profondeur de 0 à 100 m. Il tirera parti des résultats du projet national « ville 10d – ville d’idées » et comportera un volet développement durable (évaluation des espaces souterrains et leurs contributions à la ville durable) et un volet sociétal (perception et avis des citoyens sur la ville souterraine).

 

Le work package 4 s’intéressera à la réutilisation des terres excavées (en visant notamment la valorisation des terres argileuses en agrégats fertiles pour la renaturation) et à la géothermie 56 . Là où l’utilisation des déblais pose la question du poids carbone des opérations – les évacuations se faisant encore très largement par noria de camions – la géothermie est porteuse de beaucoup d’espoirs pour décarboner l’important poste d’émission que représente le chauffage des équipements et des habitations.

 

Connaissance, modélisation numérique, évaluation de la ville souterraine et intérêt pour ce qui peut être exploité tant en chaleur qu’en matériaux, ce PEPR est un programme exploratoire du Plan d’Investissement d’Avenir (PIA4), propre à structurer le recours au sous-sol dans une trajectoire à +4°C, à horizon 2030.

Conclusion : Quel avenir pour le sous-sol ?

L’exercice de bilan-perspectives auquel nous nous sommes livrés traverse plus d’un siècle. Il permet de pointer certaines caractéristiques du sujet du sous-sol urbain. En premier lieu, notons la permanence du sujet au fil du temps. Loin d’être une préoccupation récente (telle que la qualité et la nature des sols par exemple), l’intérêt pour les espaces souterrains semble cyclique et connaît ces dernières années une certaine accélération de phase et/ou un accroissement d’amplitude.

 

Le sous-sol est de ces sujets essentiellement techniques relevant d’une doc- trine urbaine du dessus et du dessous. Nous observons aujourd’hui une approche plus profane et pragmatique cherchant avant tout à répondre à des enjeux sociaux et environnementaux. Le sous-sol est ainsi convoqué sur des sujets tels que le devenir des biens communs des profondeurs, la lutte contre le réchauffement climatique, la densification urbaine verticale incluant le dessous, le développe- ment d’une logistique urbaine plus adaptée, etc…

 

Des réalisations exemplaires voient ainsi le jour, souvent estampillées du sceau de l’innovation. De nouveaux réflexes d’aménageurs commencent à s’ancrer pour porter un nouveau type d’inventivité foncière et de nouveaux programmes de recherche s’attachent à compléter une connaissance encore très imparfaite et à prototyper une ville durable incluant des espaces souterrains. La dynamique est visiblement en mouvement, posant le sujet de l’identification des conditions nécessaires et suffisantes à la démultiplication de toutes ces initiatives. Et si ces démonstrateurs se révèlent finalement être des exceptions, cela ne permettra pas d’accéder à la nécessaire bifurcation de nos manières de produire et de vivre l’espace urbain, car c’est bien de réplicabilité adaptée et de changement d’échelle que nous avons collectivement besoin. D’où notre intérêt pour les pratiques pionnières.

 

S’affranchissant à la fois de tout dogmatisme et de tout angélisme, il apparaît utile de poursuivre l’examen de ces questionnements et d’interroger le plein potentiel des initiatives contemporaines.

Acronymes

AFTES : Association Française des Tunnels et Espaces Souterrains

BRGM : Bureau de Recherche Géologique et Minière

CNRS : Centre National de la Recherche Scientifique

ITA : International Tunnel Association

PEPR : Programmes et équipements prioritaires de recherche

PLOC : Périmètre de LOCalisation logistique, du SDRIF-E

SDRIF-E : Schéma Directeur de la Région Île de France, Environnemental

Sources

Entretiens

  • Laëtitia d’ALOÏA-SCWARTZENTRUBER, ingénieure génie-civiliste au CETU
  • Sabine BARLES, professeure des Universités, Paris 1 Panthéon-Sorbonne
  • Bruno BARROCA, professeur des Universités, Université Gustave Eiffel
  • Florent BIGORGNE, chargé de mission APUR
  • Michel DUFFAYET, ancien Directeur Général du CETU et de l’AFTES
  • Honorine FANELLI, directrice de la maîtrise d’ouvrage, SOGARIS
  • Alexandre FLORENTIN, conseiller de Paris
  • Baptiste GAUTIER, Fédération nationale des SCoT
  • David HANNOYER, adjoint à la Responsable de l’Inspection Générale des Carrières, Paris
  • David MANGIN, architecte, SEURA
  • Aurèle PARRIAUX, professeur émérite EPFL, ancien directeur du programme Deep City
  • Valère PELLETIER, directeur général de RATP Solutions ville

Bibliographie

d’ALOÏA-SCWARTZENTRUBER L ., L’Analyse du Cycle de Vie (ACV) appliquée aux ouvrages souter- rains, AJCE volume 40, 2022

APUR, Les outils au service de la logistique urbaine dans les PLU – l’exemple du Plan Local d’Urba- nisme de Paris, note n°170, janvier 2020

APUR, Les sites de logistiques actuels et potentiels – contribution du groupe de travail immobi- lier pour la stratégie logistique parisienne, note n°1999, juin 2021

BARLES S ., GUILLERME A ., L’Urbanisme souterrain, Paris, PUF, 1995

BARLES S ., JARDEL S ., L’urbanisme souterrain – étude comparée exploratoire, Paris, APUR, 2005 BARROCA B . (sous la direction de), Penser la ville et agir par le souterrain, Paris, Presses des Ponts, 2014

BRGM : Le sous-sol : l’espace urbain de demain ?, dossier thématique 2008, https://www.brgm.fr/fr/actualite/dossier-thematique/sous-sol-espace-urbain-demain

DPA-X avec Dominique Perrault Architecture, commande d’Indigo Group, Le futur du parking. Opportunités dans les sous-sols. Analyse de l’architecture des parkings souterrains. Valorisation, diversification et intégration au sein des dynamiques urbaines contemporaines, Paris, 2020

IAU, L’incontournable inventivité foncière – du toit au sous-sol, dossier de juillet 2020 issu du Cahier n°177 « Bouger ! Le sport rythme la ville »

La Fabrique de la Cité, Leonard, Helsinki, portrait de ville – planifier l’innovation et la résilience, Paris, 2022

MANGIN D ., GIRODO M ., avec SEURA, Mangroves urbaines – du métro à la ville – Paris, Mon- tréal, Singapour, Paris, La Découverte, Carré, 2016

PARRIAUX A ., Le projet Deep City : vers un urbanisme tridimensionnel, article dans la Revue « XYZ » n° 132, 3ème trimestre 2012

Pavillon de l’Arsenal, SGP, JFA, SCS, catalogue de l’exposition « Grand Paris Express, construire l’identité du nouveau métro », décembre 2013, 25p

PRIVAT, Marc-Emmanuel, Résistance et urbanisme souterrain, le Journal Spécial’Z n°3, École Spéciale d’Architecture, 2012 https://fr.slideshare.net/archi-criture/rsistance-urbanisme-souterrain-15704698

Région Île-de-France, Objectif 2040 – synthèse non technique du SDRIF-E : https://www.registre-numerique.fr/sdrif-e/voir?document2=93965

Mondes souterrains : 20 000 lieux sous la terre – Exposition et catalogue de l’exposition du Louvre Lens (février-juillet 2024)

Ressources audios et audiovisuelles

Dominique PERRAULT à Bartlett School of Architecture de Londres en novembre 2012 : https://vimeo.com/54443805

MOOC « Groundscape architecture design lab » avec Dominique Perrault, Juan Fernandez-Andrino, Ignacio Ferrer Rizzo, Richard Nguyen dont tous les contenus pédagogiques sont encore accessibles sur inscription : https://learning.edx.org/course/course-v1:EPFLx+GROUNDSCAPEx+3T2019/

Michel DUFFAYET sur BFM : « la tech’ au service des souterrains », 03/10/23, émission Tech & Co, la quotidienne

https://www.bfmtv.com/economie/replay-emissions/tech-and-co/jean-baptiste-huet-journaliste-bfm-business-et-michel-deffayet-president-de-l-association-francaise-des-tunnels-et-de-l-espace-souterrain-03-10_EN-202310030952.html

https://www.aftes.fr/fr/actualites-fr/itw-de-michel-deffayet/

https://actu.epfl.ch/news/using-heat-from-underground-parking-lots-to-warm-3/

Remerciements

Marie-Claire BARRÉ tient à exprimer sa reconnaissance à Céline ACHARIAN et Marie DÉGREMONT pour la confiance qu’elles lui ont témoignée, ainsi qu’à l’ensemble des relecteurs de l’équipe de La Fabrique de la Cité, notamment Marianne LALOY BORGNA .

L’autrice remercie, également, chaleureusement toutes les personnes sollicitées dans le cadre de la réflexion et de l’élaboration de cette note ; en particulier les personnes rencontrées lors d’entretiens approfondis :

  • Laëtitia d’ALOÏA-SCHWARTZENTRUBER – CETU
  • Sabine BARLES – Université Panthéon-Sorbonne
  • Bruno BARROCA – Université Gustave Eiffel
  • Julien BIGORGNE – APUR
  • Michel DEFFAYET – AFTES
  • Honorine FANELLI – SOGARIS
  • Alexandre FLORENTIN – conseiller à la Ville de Paris
  • Marc HANNOYER – Ville de Paris – Inspection Générale des Carrières
  • David MANGIN – Architecte co-Fondateur de SEURA
  • Aurèle PARRIAUX – ex EPFL
  • Valère PELLETIER – Directeur Général de RATP Solutions Ville
  • Dominique PERRAULT – DPA

 

Notes

[1] Le sol fera l’objet d’une autre étude de La Fabrique de la Cité en partenariat avec La Fabrique Écologique.
[2] Le BRGM, service géologique national français, est l’établissement public de référence dans les applications des sciences de la Terre pour gérer les ressources et les risques du sol et du sous-sol
[3] BRGM, « Le sous-sol : l’espace urbain de demain ? », dossier thématique, https://www.brgm.fr/fr/actualite/dossier-thematique/sous-sol-espace-urbain-demain
[4] D’après le Code de la santé publique, article L1331-22 – un sous-sol est impropre à l’habitation : https://www.legifrance.gouv .fr/codes/article_lc/LEGIARTI000037671633/2020-01-01
[5] Ces exemples touchent notamment à la figure étudiée par David Mangin et Marion Girodo, celle de la « mangrove urbaine » et rassemblés dans l’ouvrage Mangroves urbaines – du métro à la ville – Paris, Montréal, Singapour, Paris, La Découverte, Carré, 2016
[6] Pour plus d’information, Cf . Helsinki, portrait de ville – planifier l’innovation et la résilience, La Fabrique de la Cité, Leonard, Paris, 2022 https://www.lafabriquedelacite.com/publications/helsinki-innovation-resilience/
[7] ITA Working Group 20 : Urban problems, underground solutions, ITA Report n°32, avril 2023 .
[8] En plus des très nombreuses réalisations d’ordre infrastructurel en de nombreux points du globe (métros, tunnels, ouvrages de gestion de crues…)
[9] L’urbanisme souterrain – étude comparée exploratoire, 2005, Sabine BARLES et Sarah JARDEL, pp 22-23
[10] Ibid . p 23
[11] Ibid . p 23
[12] Aujourd’hui « Société des Grands Projets », pour poursuivre ses activités au-delà du Grand Paris Express et mener des opérations auprès de la SERM de Lille (barreau ferroviaire Tourcoing-Lille) et à Bâle-Mulhouse, Bordeaux et Toulouse étant encore en discussion.
[13] https://ferriermarchetti.studio/fr/project/les-gares-du-grand-paris-2024
[14] Études sur les transformations de Paris, Eugène Hénard, 1903-1909
[15] Marc-Emmanuel Privat, « Edouard Utudjian et l’urbanisme souterrain », séminaire Ville, École Spéciale d’architecture, 2012 : https://fr.slideshare.net/archi-criture/edouard-utudjian-lurbanisme-souterrain
[16] Paris en 1937, Rotterdam en 1948, Bruxelles en 1949, New York en 1964, Varsovie en 1965, Madrid en 1968 .
[17] Créée elle-aussi en 1933, autour du triptyque air-soleil-verdure comme fondement de l’architecture moderne, la Charte d’Athènes, sera infiniment plus suivie et prolifique que les tenants de l’urbanisme souterrain .
[18] Également appelée Association Internationale des Tunnels et des Espaces Souterrains (AITES), son siège est en Suisse.
[19] ITA, underground solutions for a better world – « think deep! » : “ITA believes in an urban underground future. The urban under- ground space in our experience is an often-overlooked asset of cities. As such underground space should play a vital role in the quest, many cities are undertaking to combat lack of space. Cities need space for housing, for infrastructure and public spaces” . Actuellement, l’association regroupe 79 pays membres et 219 entreprises ou membres individuels affiliés .
[20] Traduit de l’anglais depuis https://archiveweb.epfl.ch/sub.epfl.ch/
[21] Il existe de nombreuses autres réalisations et projets : Gare de Villejuif Institut Gustave Roussy, Grand Paris Express ; réaménagement du gouffre de Padirac ; musée la Vega Baja à Tolède ; centre de conférence Usinor-Sacilor à St Germain-en-Laye ; centre de création d’art contemporain de Cordoue ; musée des beaux-arts et de la photo à Lausanne ; piazza Garibaldi et gare grande vitesse de Naples; cité de la culture de Galice à Saint-Jacques-de- Compostelle ; cité de la culture et des arts, à Yeosu (Corée du Sud) ; la mission « île de la cité – le cœur du cœur » ; musée Dobrée à Nantes (qui connut quelques vicissitudes avec le Tribunal Administratif). En projet : le projet « Light Beam » à Gangnam, qui permet de créer un lieu de déambulation piétonne underground libérée de l’intensité du trafic routier et de créer du lien entre deux lignes de métro existantes, en mobilisant la lumière du jour, ou le musée Giacometti à Paris .
[22] Sur les Abris de protection civile suisses : https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2022/04/08/la-suisse-cham-pionne-du-monde-des-bunkers_6121112_4500055.html ou https://www.youtube.com/watch?v=xmgGG2HN9D0
[23] « Le projet Deep City : vers un urbanisme tridimensionnel », Aurèle Parriaux, Revue XYZ n°132, 3e trimestre 2012, p . 61-64 https://www.aftopo.org/wp-content/uploads/articles/pdf/article413211.pdf
[24] À titre d’exemple, la surexploitation des eaux souterraines de Mexico City et ses conséquences sur les mouvements de terrains impactant jusqu’à sa cathédrale ; l’atteinte des nappes phréatiques par de l’eau de mer, les rendant alors impropres à la consommation, dans des villes côtières chinoises ; des décisions de travaux non coordonnés obérant les développements futurs (champs de géothermie profonde empêchés par la présence d’un tunnel ou vice-versa) .
[25] Ce Programme National est présidé par Jean-Claude Boucherat (alors président du CESER de la Région Ile-de- France), dirigé par Monique Labbé (dirigeante des Ateliers Monique Labbé) et Jean-Pierre Palisse (alors directeur général adjoint de l’IAU) .
[26] Extrait du rapport d’étape ville 10d – ville d’idées, mars 2017, sous la direction de Jean-Pierre Palisse, p 19 et 22 . Informations issues du Thème 1 : SOCIO ECONOMIE, boîte à outils d’évaluation de projets souterrains & état de l’art des outils d’évaluation socio-économique et de la monétarisation des externalités environnementales, juillet 2014, R02
[27] 1/1000 : échelle de surveillance fine de l’Inspection générale des Carrières . 1/80000 : échelle de cartes plus pédagogiques.
[28] L’article 552 du Code civil stipule en effet que « La propriété du sol emporte la propriété du dessus et du dessous ».
[29] https://www.paris.fr/pages/reinventer-paris-4632
[30] https://www.paris.fr/pages/reinventer-les-sous-sols-parisiens-85-finalistes-selectionnes-5582/
[31] L’agence SYVIL ARCHITECTURE, maître d’œuvre de l’opération, décrit ainsi le contexte et les besoins : « Le quartier du Grenier-Saint-Lazare, situé au cœur du IIIe arrondissement de Paris, rassemble près de 30 000 habitants au km², soit environ 22 000 foyers résidant dans un rayon de 700 m autour de l’édicule d’accès à l’ancien parking du Grenier Saint-Lazare. Le quartier présente également un tissu commerçant local dense et qualitatif, avec près de 10000 entreprises présentes dans l’arrondissement. La densité du bâti et des populations entraîne un manque de surfaces disponibles dans les logements, les locaux commerciaux ou d’activités. Confrontés d’une part au renchérissement du prix de ces surfaces et d’autre part aux nuisances générées par la congestion et la pollution, les pouvoirs publics doivent déployer des solutions d’avenir pour équiper les quartiers de nouveaux outils collectifs et espaces partagés». https://syvil.eu/fr/projets/l-immeuble-inverse
[32] . En 2016, Maître Michèle Raunet, notaire-associée de l’Étude Cheuvreux ayant travaillé sur l’acte de vente du Grenier Saint-Lazare, déclarait déjà : « Inventons la métropole suppose un impressionnant travail notarial » . Un article de mai 2019 de la revue juridique N°1 intitulé « Réinventer la vente avec les appels à projets urbains » concluait « Autrement dit, ces appels à projets urbains ne changent pas nos ventes… ils les réinventent ! » .
[33] En effet, la part des émissions de GES en ville associée à la logistique urbaine est estimée à 25 % . Verdir le dernier kilomètre est donc crucial pour réduire les émissions de GES urbaines. https://presse.ademe.fr/2024/03/logis-tisque-reduire-limpact-carbone-du-dernier-km-grace-a-lextreme-defi-logistique.html
[34] Les PLOC : périmètres de localisation logistiques
[35] DPA-X avec Dominique Perrault Architecture, commande d’Indigo Group, Le futur du parking . Opportunités dans les sous-sols . Analyse de l’architecture des parkings souterrains . Valorisation, diversification et intégration au sein des dynamiques urbaines contemporaines, Paris, 2020
[36] Dont celles des occupations de fait par des populations marginalisées en grande difficultés . Travail d’enquête « sous la dalle de La Défense avec les sans-abris » : https://services.la-croix.com/webdocs/pages/longform_ladefense/ ou https://www.francetvinfo.fr/societe/sdf/paris-la-vie-des-sdf-sous-la-dalle-de-la-defense_3109355.html
[37] « La Cathédrale », « Les Bassins », « L’Atelier », « La Fnac » et « Le Plateau », soit plus de 20 000 m² d ’espaces « cachés » sous la dalle .
[38] Dossier sur les sous-sols de La Défense, in numéro de septembre-octobre 2023 de la Revue Urbanisme, « Les res- sources cachées du renouvellement urbain » .
[39] https://parissecret.com/exposition-sous-sols-la-defense/ et https://parisladefense.com/fr/actualites/agenda/exposition/extatiques-2024
[40] https://www.hauts-de-seine.fr/toutes-les-actualites/detail/les-extatiques-dans-les-sous-sols-de-paris-la-defense
[41] L’équipe de maîtrise d’oeuvre, Marc MIMRAM Architecture & Ingénierie, l’Atelier JBMN et la paysagiste Ana MARTIBARON, a démarré la mission en 2021, le projet immobilier devrait se dérouler dès 2024. La livraison prévisionnelle est programmée dès la fin 2025.
[42] Opérations des Ateliers Jourdan-Corentin-Issoire (XIVe arrondissement) en 2017, des Ateliers d’Italie (XIIIe arrondis- sement) en 2022, ou Ateliers Vaugirard (XVe arrondissement) prévus pour une livraison en 2029 .
[43] Arrivées par petits camions électriques, dispatche en triporteurs électriques .
[44] L’équipe est menée par BNP Paribas Real Estate, associant Apsys et RATP Solutions Ville, les architectes DPA – Dominique Perrault, H2O, Martinez Barat Lafore, Nicolas Dorval Bory, et l’Atelier Roberta (paysagiste) .
[45] Cahier « L’incontournable inventivité foncière », extrait de Bouger ! Le sport rythme la ville, cahier n°177, juil- let 2020, Institut Paris-Région https://www.institutparisregion.fr/amenagement-et-territoires/amenagement/lincontournable-inventivite-fonciere/
[46] Cela a notamment été l’objectif avec « Sense-City », un équipement d’excellence du Programme d’investissements d’avenir, financé par l’Agence nationale de la recherche . Ce projet doté d’un budget de 9 M€ pour la période 2011- 2019 a été piloté par l’Institut français des sciences et technologies des transports, de l’aménagement et des ré- seaux (Ifsttar) avec pour partenaires : l’école d’ingénieurs ESIEE Paris, le Laboratoire de physique des interfaces et des couches minces du CNRS-Polytechnique, le Centre scientifique et technique du bâtiment, I’Institut national de recherche en informatique et en automatique et l’Université Paris-Est-Marne-la-Vallée .
[47] Sous l’égide d’Alexandre Florentin – groupe Les écologistes (Président), et de Maud Lelievre – groupe MoDem, démocrates et écologistes (rapporteure) : https://www.paris50degres.fr/
[48] L’activité de l’entreprise délégataire de service public « Fraicheur de Paris », créatrice et gestionnaire de réseaux de froid, est à ce titre très intéressante. De même que le programme de recherche « Freshway » porté par l’Ademe .
[49] On fait ici particulièrement référence aux travaux menés notamment par Julien Bigorgne, chargé de mission à l’APUR sur les questions d’adaptation.
[50] Déclaration d’Anne Hidalgo dans le préambule du dossier de presse de la démarche.
[51] « Paris souterrain – Comment investir les sous-sols de Paris pour de nouveaux usages d’ici 2050 ? », Mercredi 28 février 2024, de 19h00 à 21h00
[52] Paris et une partie de la Seine-Saint-Denis sont construites sur une roche, le gypse, dans laquelle des cavités peuvent se former par dissolution à cause des eaux d’infiltration . Le Ludien est un âge géologique, entre -38 et -33,9 millions d’années.
[53] L’IGC défend le fait que le « Plan Pluie » de 2015, qui prône l’infiltration in situ des eaux pluviales, doit s’appliquer de manière étudiée. Une infiltration dans des qualités de sol qui ne craignent pas le tassement est une aubaine . Mais cela peut être plus.
[54] Voir l’étude de La Fabrique de la Cité sur les villes perméables, à venir.
[55] Le Massif central (potentiel minéral et géothermique) ; le Fossé rhénan (potentiel géothermique profond); le Bassin aquitain (stockage de subsurface, géoressources émergentes et usages énergétiques); le centre du Bassin parisien (portant la plupart des enjeux socio-économiques en termes de gestion du sous-sol urbain); la Guyane française (combinant un écosystème extraordinaire mais fragile, un sous-sol riche et méconnu): https://www.brgm.fr/fr/programme/sous-sol-bien-commun-programme-recherche-utilisation-exploitation-responsable-durable
[56] On distingue la géothermie dite « de surface », c’est-à-dire de faible profondeur au sens du code minier (jusqu’à 200 m) et la géothermie profonde, allant jusqu’à 1 000 ou même 2 000 pour puiser la chaleur dans le Dogger en Île-de-France

La Fabrique de la Cité

La Fabrique de la Cité est le think tank des transitions urbaines, fondé en 2010 à l’initiative du groupe VINCI, son mécène. Les acteurs de la cité, français et internationaux, y travaillent ensemble à l’élaboration de nouvelles manières de construire et reconstruire les villes.

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