Relancer la France – et les villes moyennes ?
Mardi 12 octobre, Emmanuel Macron annonçait en détail le plan France Relance qui prévoit 30 milliards d’euros pour une dizaine de secteurs prioritaires, dont 8 milliards promis pour la décarbonation de l’économie, 7 milliards pour la santé, 4 milliards pour les transports et 2 milliards pour l’agriculture.
En réponse directe à la crise du Covid-19, qui a révélé les vulnérabilités d’une économie dépendante de chaînes d’approvisionnement mondiales, ce plan entend apporter des éléments de réponse à la sécurisation de l’approvisionnement énergétique en France. Pour limiter la dépendance au pétrole et au gaz, il soutient notamment l’énergie nucléaire, produite par des réacteurs de plus petite taille qu’à l’accoutumée, ainsi qu’il cherche à créer des débouchés pour convertir la production électrique en énergie utilisable pour le transport, permettant d’en améliorer le bilan carbone. Des investissements importants sont ainsi prévus dans de nouvelles usines françaises de batteries pour permettre la production de deux millions de voitures électriques et hybrides d’ici à 2030 ainsi que dans la production d’hydrogène notamment pour encourager le développement de l’avion bas-carbone. Ce sujet n’est pas strictement français et les pénuries logistiques qui touchent le Royaume-Uni, la Chine, et l’ensemble du G7 le montrent bien. Londres en appelle même à une réunion internationale pour s’armer de mesures d’urgence. Pour mener à bien ces objectifs, plusieurs conditions sont établies, et notamment sécuriser l’apport et le recyclage de matériaux rares, ainsi que la production française de composants électroniques. En effet, il est primordial d’assurer une complémentarité d’usage entre les énergies produites et la technologique nécessitant cette énergie. En d’autres termes, produire en France une énergie renouvelable pour soutenir les innovations françaises. Les batteries des nombreux véhicules et outils à venir ou encore l’avion bas-carbone sont deux cibles privilégiées. La formation de la population active et la création de nouvelles filières s’ajoutent à la liste de mesures nécessaires pour emmener l’ensemble de la société dans un changement durable de paradigme.
Et les villes, dans tout ça ?
Alors que les métropoles ont été les championnes de l’économie tertiaire et de l’économie de la connaissance, les villes moyennes, on l’oublie souvent, ont participé activement au développement de l’appareil industriel français jusque dans les années 1970 où elles sont devenues les symboles de la désindustrialisation. Les villes moyennes pourraient-elles ainsi devenir les nouveaux acteurs clé de ce plan de relance qui cherche à réarmer le tissu industriel français ?
À ce sujet et en écho aux objectifs publics, La Fabrique de la Cité organise la deuxième édition des Rencontres des Villes Moyennes, les 26, 27 et 28 octobre à Cahors, et va s’intéresser aux réalités territoriales de ces villes d’équilibre et tenter de décrypter leurs évolutions.
La deuxième table ronde des rencontres porte sur la nouvelle géographie des implantations des entreprises dans les villes moyennes, avec Cyrille Coutansais, directeur de recherche au Centre d’études stratégiques de la marine, Emmanuel Tremouille, consultant chez EY et spécialiste de l’Action Cœur de Ville, Olivier Jallabert, PDG d’Amplitudes, à Valence, et Adrien Nivoliez, PDG de Biose, à Aurillac. Cette table ronde souligne que les villes moyennes, autrefois pointées du doigt pour leur enclavement et leur manque d’attractivité provoquant la fuite des talents, mettent aujourd’hui en avant des atouts différenciants (connectivité, prix du foncier, qualité de vie etc.) et parviennent à s’inscrire dans une nouvelle dynamique qui fait précisément écho au plan France 2030. À titre d’exemple, Aurillac accueille Biose Industrie, leader mondial dans la production clinique et commerciale de micro-organismes et a vu Europe Service, un des leaders de la fabrication de véhicules de voirie, relocaliser une partie de sa production dans la commune. Douvrin, Béthune et Lens accueilleront la future gigafactory de production de batteries françaises, qui produira environ 10% du marché européen en 2030. Cahors compte dans ses rangs trois entreprises innovantes, leaders européens, dans le véhicule autonome (Soben), la gestion de services informatiques (I-Médias) ou la machinerie dans le secteur agroalimentaire (FCD). La liste pourrait s’allonger encore.
La troisième table ronde des Rencontres des villes moyennes porte sur la formation comme levier essentiel de l’attractivité et de l’innovation. Elle accueille Catherine Soldano, chercheuse spécialisée dans la formation et les politiques publiques d’enseignement supérieur, Khaled Bouabdallah, recteur délégué pour l’enseignement supérieur, la recherche et l’innovation de la région académique Occitanie, Bernard Delpech, Vice-Président du Grand Cahors en charge de la formation, Marie-Hélène Thoraval, maire de Romans-sur-Isère engagée dans l’innovation, Frédéric Cros, directeur du Pôle Image Magelis, pôle de développement économique de la filière Image en Charente et enfin le professeur Posselt, chercheur en innovation, création de connaissance et transfert de technologies. Clef de la durabilité des mesures de relance et de transition, la formation se trouve elle aussi au cœur du projet France 2030 et est à cet égard soutenue par une enveloppe de 2,5 milliards d’euros. Pour les villes moyennes, il s’agit là d’une opportunité pour repenser les liens entre formation(s), transferts de connaissance nourrissant les stratégies d’innovation industrielle et le développement territorial d’entreprises innovantes, avec en toile de fond l’objectif de proposer des emplois localement. Que peut-on réellement attendre de la territorialisation de l’offre de formation en termes d’effets sur l’emploi ? Peut-elle aussi permettre d’inverser le regard porté sur le territoire et d’attirer davantage de populations qui s’y installeraient par choix et non par défaut ?
Les quatre autres sessions que nous vous invitons à suivre en ligne poseront les questions de la coopération territoriale entre villes moyennes et métropoles, des impacts du tourisme et de l’attractivité des villes moyennes, de la protection du patrimoine et son évolution, et, enfin, du numérique, de sa mise en place et de ses atouts.
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La Fabrique de la Cité
La Fabrique de la Cité est le think tank des transitions urbaines, fondé en 2010 à l’initiative du groupe VINCI, son mécène. Les acteurs de la cité, français et internationaux, y travaillent ensemble à l’élaboration de nouvelles manières de construire et reconstruire les villes.