En question

Renaissance des centres et retour de l’économie en ville : la fin de l’urbanisme fordiste ?

Au cours des Trente glorieuses, le modèle de développement fordiste de l’urbain a conduit à privilégier l’étalement des villes et les aménagements périphériques, donnant lieu à l’émergence de la banlieue (ou suburb). Dans un rapport binaire centre-périphérie, ce modèle a conduit à un appauvrissement démographique, fonctionnel, infrastructurel voire budgétaire des centres urbains, confrontés à un effet ciseau : une fuite en périphérie des populations, des activités et des infrastructures, avec tout ce que cela représente de pertes fiscales pour les communes centrales ; le maintien voire l’accroissement des charges de centralité liées à la présence de services et d’activités difficilement déplaçables des centres-villes. En outre, la construction, dès les années 1970, de centres secondaires a largement contribué à l’appauvrissement des centres historiques et des villes. L’ampleur du phénomène a conduit à l’émergence de travaux sur les shrinking cities (villes en contraction), dont une partie explique ce déclin par une redistribution de la population, des richesses et des activités des municipalités centrales vers l’échelle supérieure des aires urbaines. Cette intense recomposition de l’échelle locale explique le passage de la notion de ville, monocentrique et dense, à celle d’aire urbaine, polycentrique et plus diffuse [1].

La dynamique dépréciative des centres-villes à partir des années d’après-guerre et jusqu’aux chocs pétroliers et au-delà a conduit à une réelle crise de la centralité urbaine dans les années 1980 et 1990. Si la fin des villes telle que l’entendait Françoise Choay tendait à décrire le passage à l’urbain généralisé comme nouvelle catégorie spatiale, la notion aurait très bien pu renvoyer également à la fin des centres-villes. À partir des années 1980, un réel retournement spatial commence toutefois à s’observer : celui d’un lent retour des populations, des activités et des capitaux en ville et dans les centres historiques, sous la forme, timide d’abord, d’une gentrification résidentielle et/ou commerciale puis, plus récemment, d’équipements majeurs. Ce mouvement s’est accéléré dans les années 2000, donnant lieu, en 2020, à un bilan plus nuancé dans lequel les périphéries résidentielles urbaines apparaissent comme les grandes perdantes des deux dernières décennies d’aménagement et de politiques publiques, dont la crise des gilets jaunes serait en partie l’expression. Comment le retour de l’économie en ville se manifeste-t-il ? A quoi est-il dû ? S’observe-t-il partout en France et dans le monde ? Résulte-t-il d’un phénomène structurel (et si oui, de quelle nature) ou d’un pur produit de l’histoire récente, appelé à s’interrompre rapidement ?

À ce titre, la crise sanitaire du coronavirus et l’expérience difficile du confinement en ville tendent à replacer les débats sur le retour de l’économie en ville dans des considérations plus larges et plus anciennes, souvent hygiénistes voire anti-urbaines, sur une fin de la centralité urbaine et la promotion d’un retour à la « nature » ou à la « campagne ». Les économies d’agglomération qui poussent les populations et les investissements vers les centralités sont-elles négativement et durablement affectées, voire annulées, par l’involution sanitaire de la COVID-19 ?

 

Le retour de l’économie en ville : de quoi parle-t-on ?

En aménagement, on distingue différentes catégories économiques : l’économie présentielle ou résidentielle (les dépenses ordinaires de la population) par opposition à l’économie de passage (liée au tourisme par exemple) ; les différentes économies sectorielles ; les investissements, sous forme matérielle (immobilière et infrastructurelle) de la part de la puissance publique comme du secteur privé, ou sous une forme immatérielle (comme les investissements directs étrangers ou les investissements boursiers) ; enfin, on oppose aussi économie de base (basic activity en anglais, soit les activités rares qui font la spécialisation économique d’un territoire, à l’image d’Airbus à Toulouse) et économie « non basique » (non-basic activity [2], soit les activités ordinaires, comme les petits commerces de proximité, que l’on trouve de façon quasi ubiquiste sur l’ensemble du territoire). La liste n’est pas exhaustive.

Parler d’un retour de l’économie en ville, c’est donc évoquer un phénomène complexe. Tout type d’économie n’est pas pertinent aux sujets de la dévitalisation et de la revitalisation urbaine. Deux catégories intéressent ici l’essentiel du propos : l’économie urbaine ordinaire, dite aussi présentielle ou résidentielle, qui renvoie à la non-basic economy anglo-saxonne ; l’économie métropolitaine, c’est-à-dire les activités, les professions, les populations, les investissements qui font la spécificité du tissu économique des métropoles – et, en l’occurrence, de leur cœur. Dans certains cas, économie ordinaire et économie métropolitaine peuvent se retrouver en tension par des dynamiques d’exclusion mutuelle. Ces cas sont toutefois rares, tant ces deux économies sont, de fait, complémentaires. Le confinement imputable à la COVID-19 en 2020 a ainsi montré l’importance de l’économie ordinaire dans le bon fonctionnement de l’économie métropolitaine, mise en télétravail dans une situation parfois assez précaire tandis que la première fonctionnait à plein régime.

Le sujet du retour de l’économie en ville pose, enfin, la question de la ville. Outre sa remise en question par de nombreux travaux, il convient ici de se demander de quelle ville on parle. S’agit-il des grandes métropoles ? Des villes petites et moyennes ? Des villes matures ou des « booming cities » en forte croissance ? Des villes françaises et européennes ou des villes d’ailleurs ? L’idée de ville est ainsi tout aussi imprécise et complexe que celle d’économie. Le questionnement portant sur le retour d’une certaine économie dans un certain type de villes varie ainsi grandement d’une situation à l’autre. Quels constats peut-on donc émettre en France et en Europe au tournant des années 2020, dans un contexte fortement marqué par les incertitudes imputables à la COVID-19 ?

 

L’involution de la géographie commerciale ?

Depuis le tournant des années 2010, une nouvelle dynamique commerciale se fait jour. Des géants du commerce comme Ikea, King Jouet, Mr Bricolage ou Leclerc, habituellement implantés dans les périphéries, ont inauguré des magasins dans les centres-villes, dans un format différent de ceux prévalant dans le périurbain traditionnel. D’après Sébastien Bourdin, enseignant-chercheur en géographie économique et doyen délégué de l’École de Management de Normandie, ce mouvement centripète a débuté en Europe avec Ikea en 2014, lorsque l’entreprise suédoise a ouvert un magasin au cœur de la ville de Hambourg, en Allemagne, avant d’en inaugurer d’autres à Southampton, Birmingham et New York. D’ici 2021, 30 ouvertures de magasins, de taille plus réduite et adaptée à l’espace disponible en centre-ville, sont prévues [3]. Philippe Dugot rappelle, à ce titre, le vieil adage allemand selon lequel « le commerce, c’est le changement »[4].

Ne pourrait-on pas en dire autant de la ville et de l’urbain et en particulier de leurs centralités ?

On observe les mêmes phénomènes en France. En mai 2019, Ikea a ainsi inauguré un point de vente à la station de métro Madeleine à Paris. D’une surface de 5 400 m², soit quatre fois moins que ses magasins en périphérie, ce magasin répond à différentes logiques partagées par ce même type de nouveaux points de vente centraux : se rapprocher des consommateurs habitant en ville, notamment ceux qui n’ont pas de voiture [5], s’adapter au souhait des clients de voir et tester les produits avant de les acheter, conserver leur compétitivité face aux enseignes d’e-commerce, notamment parmi les jeunes consommateurs [6], ou encore de tester de nouveaux formats pour pallier la saturation de l’offre commerciale en périphérie et maintenir la croissance de l’enseigne [7]. Associant commerce physique et e-commerce, ce nouveau business model repose sur un terme nouveau : le phygital [8].

Néanmoins, Pascal Madry, directeur de l’Institut pour la Ville et le Commerce [9], interrogé par le magazine La Gazette des Communes [10], ne voit pas dans ces mouvements une nouvelle tendance commerciale mais plutôt un « épiphénomène »[11]. Pour lui, cette dynamique ne sera valable que pour les métropoles et non les villes petites ou moyennes. Il explique que « [l]’alimentaire a ouvert la marche, avec des groupes comme Carrefour, Casino… suivi par le sport, le bricolage, et l’ameublement[…]. Isolément, on pourrait croire à une tendance sociétale forte derrière, mais ce sont des tests de nouveaux formats pour toucher des clientèles qui jusqu’ici ne venaient pas à eux».

Si le mouvement d’investissement des centres par les grandes enseignes du périurbain concerne surtout les métropoles et les grandes villes, le commerce de centre-ville de certaines villes moyennes semble toutefois lui aussi mieux se porter. En février 2019, le journal Les Échos titrait un article : « Le commerce de centre-ville se rebiffe »[12]. Si le constat d’un certain ralentissement de l’activité commerciale dans les centres-villes est vérifiable par le taux global de vacance, ce dernier ne tient pas compte des anomalies statistiques, c’est-à-dire des cas qui contrastent avec la tendance globale. En effet, certaines villes moyennes comme Le Havre, Pontarlier ou encore Tours ont maintenu ou réussi à impulser à nouveau une activité commerciale importante.

Parmi ces centres-villes, la ville de Mulhouse a retenu l’attention du journal britannique The Guardian, qui a érigé cette commune alsacienne de presque 109 000 habitants [13] en parangon de la revitalisation des cœurs de villes moyennes. Le journal cite pour preuve qu’après avoir été « la ville la plus sinistre de l’est de la France » et « le symbole de la mort des rues commerciales européennes », Mulhouse, anciennement industrielle, s’est profondément renouvelée en une dizaine d’années sur le plan commercial et est devenue l’une des villes françaises qui compte plus d’ouvertures que de fermetures de boutiques. Le ratio y est de deux ouvertures pour une fermeture de local commercial, taux assez exemplaire en France. En tout, plus de 470 nouveaux commerces y ont ouvert au cours des huit dernières années. Le quotidien britannique explique cette renaissance urbaine par la mise en place par la commune d’un plan intégré, sur six ans, mêlant logements, transports (nouveau système de tram, plan pour le vélo, parking abordable et mise en place de navettes), espaces publics et espaces verts, qui a mis fin à une approche en silo de ces différentes composantes urbaines essentielles.

Cette dynamique favorable du commerce de centres-villes dans des agglomérations où il était en crise constitue-t-il le signal faible d’un retournement durable ? Le palmarès Procos [14] 2019 des centres-villes commerçants [15] est plus nuancé et parle au sujet de la vacance commerciale de centre-ville d’un « constat préoccupant mais pas une fatalité ». Ainsi, le taux moyen de vacance commerciale en centre-ville en France est passé de 7,2 % en 2012 à 11,9 % en 2018. Toutefois, les magasins de centre-ville sont ceux qui ont connu la baisse de fréquentation la moins aiguë parmi la totalité des ensembles commerciaux, périphéries urbaines comprises. La fédération explique cela par l’augmentation des achats en ligne, par la « modification des modes et parcours de consommation » (à savoir, par exemple, que les consommateurs se renseignent sur les articles avant de les acheter) et par la concurrence induite par une croissance de la population plus faible que celle des surfaces commerciales.

Enfin, prendre la mesure du dynamisme du commerce en centre-ville via l’évolution des taux de vacance a-t-il toujours un sens, en particulier dans le cas des métropoles ? Ainsi, contre toute attente, la ville de New York, perçue comme un pôle commercial et financier mondial, est-elle aussi concernée par l’augmentation d’un taux de vacance commerciale déjà élevé. Selon des données du Department of Small Business Servicesde la ville, le taux moyen de locaux commerciaux vides y est de 8,9 % [16] – ; il est même de 20% à Manhattan, notamment sur certaines artères prestigieuses comme Madison Avenue [17]. Serait-ce le signe d’une nouvelle crise ou d’une transformation du commerce physique traditionnel ? Car, dans le même temps, les taux de consommation par habitant n’ont pas baissé, loin de là. L’une des clés du retour du commerce en centre-ville pour les métropoles est donc moins quantitative que qualitative. L’enjeu n’est-il pas partagé par les villes petites et moyennes, marquées elles aussi à la fois par des formes de gentrification commerciale et d’urbanisme événementiel (avec le cas de plus en plus répandu des commerces éphémères) ?

Une concentration de capitaux et d’investissements dans les centres historiques

Contrairement à ce que l’on a pu observer dans les agglomérations nord-américaines, il n’y a pas eu en France ou en Europe d’effondrement de la valeur des centres-villes au profit des périphéries urbaines. Ces derniers ont continué à concentrer les prix fonciers et immobiliers parmi les plus élevés au sein de leurs agglomérations, tant aux niveaux résidentiel que commercial. C’est même justement en raison d’un foncier plus cher en centre-ville que les grands aménagements commerciaux périphériques, nécessitant de fortes emprises au sol en particulier pour les parkings, ont été aménagés loin des centres, à la fois trop chers et pas assez accessibles pour les voitures. Toutefois, il est notable qu’une partie du desserrement caractéristique de l’étalement urbain des Trente glorieuses s’est inversé dans les années 2000 et 2010. On en observe des manifestations avec l’immobilier verticalisé oul’aménagement de grands équipements publics.

Le retour des tours dans les centres-villes européens : enjeux politiques, économiques et symboliques

L’équipe du géographe Manuel Appert, professeur à l’École nationale supérieure d’architecture de Lyon [18], a mis en lumière la multiplication de projets de tours résidentielles et de bureaux dans les centres-villes européens depuis les années 2000. De très nombreuses villes du Vieux continent connaissent ainsi un phénomène de verticalisation de leurs centres-urbains, comme Londres, Francfort, Milan, Vienne, Madrid, Barcelone ou encore Varsovie. Pour Manuel Appert, « [l]a tour est devenue une des modalités architecturales d’une urbanisation continue, d’une métropolisation des fonctions et des actifs dans le contexte de mondialisation et, à grands traits, d’une montée en puissance des acteurs de marché dans la fabrique urbaine. »

En France, ce mouvement de retour des tours dans les centres a débuté avec le projet Euralille [19], qui compte une programmation mixte de bureaux et de logements, ainsi qu’un hôtel, un pôle multimodal, un immense centre commercial, des salles de concerts et un palais des congrès et des expositions. On trouve des projets similaires de verticalisation à Lyon dans le quartier de la Part-Dieu et celui de la Confluence, à Marseille avec Euroméditerranée ou encore à Toulouse avec la tour Occitanie. Dessinée par l’architecte américain Daniel Libeskind et le cabinet français Kardham Cardete Huet Architecture, cette dernière mesure 153 mètres et sera construite sur le site de la gare Matabiau, dans le cadre d’un projet de redéveloppement plus large de la zone en quartier d’affaires. Le permis de construire a été signé le 23 juillet 2019 et la livraison de la tour est prévue pour 2023 [20]. Les 30 000 m² seront occupés par des locaux de la SNCF, un hôtel Hilton, des commerces, des appartements haut de gamme ainsi qu’un café-restaurant panoramique. Pour le maire Jean-Luc Moudenc, cette tour est « la signature architecturale à la hauteur de l’ambition d’une métropole européenne » [21].

De tels projets de verticalisation du bâti de centre-ville sont proprement métropolitains et se rencontrent très rarement dans les aires urbaines petites et moyennes, à l’exception de cas spectaculaires et emblématiques, comme Malmö [22] et sa tour Turning Torso. Ils traduisent, en France mais aussi dans de nombreux pays développés, un mouvement très contemporain de dé-verticalisation des périphéries – consécutivement au dynamitage des barres et des tours des cités de banlieue en France – et de re-verticalisation des centres. Ce processus n’est pas que spatial, il est aussi sociologique, politique et symbolique.

Turning Torso à Malmö

La grande hauteur a ainsi été associée dès les années 1960 aux périphéries urbaines européennes, aux logements sociaux construits à une cadence industrielle – celle de la ville fordiste – et à un urbanisme à l’origine amène mais ayant très rapidement présenté les signes d’une dégradation précoce tant physique que sociale. On parle alors de « bétonnite » pour désigner ces opérations rapides de construction de logements de masse peu chers et de « sarcellite »[23] pour ses caractéristiques sociales dégradées. La verticalité et les tours sont alors associées aux classes populaires [24], à la périphérie urbaine et aux maux de la ville fordiste, ce qui explique leur disparition progressive du paysage urbain européen au cours des années 1980 et 1990.

Quartier verticalisé de la Part Dieu à Lyon

Les années 2000 sont toutefois le théâtre d’un renversement spatial et social de la grande hauteur, avec l’essor des condominiums et autres tours résidentielles luxueuses dans les centres [25] et la destruction des tours des cités de banlieue. On assiste ainsi à un transfert de verticalité des périphéries ramenées au niveau du sol aux centres qui s’élèvent à mesure de l’envolée des prix du foncier et de l’immobilier résidentiel et tertiaire. L’Europe n’est pas la seule à connaître un tel retournement. À Montréal, ce type de développements immobiliers a vu son nombre et son prix augmenter considérablement dans un laps de temps très court : en 2012, les tours résidentielles représentaient 56 % des chantiers dans le Grand Montréal tandis que les constructions de maisons stagnaient [26], et leur prix a augmenté de 10 % entre 2017 et 2018 [27]. Cette évolution touche également l’immobilier commercial et de bureaux, qui promeut une programmation urbaine mixte et engendre des investissements financiers colossaux. Ceux-ci soulèvent de nombreuses questions sur les nouvelles logiques de fabrique de la ville et notamment, selon les géographes Renaud Le Goix et Ludovic Halbert, sur « le rôle croissant des marchés financiers et bancaires dans le financement, le développement et l’exploitation des espaces urbains »[28].

Une préférence des agents de la financiarisation de la fabrique urbaine pour la centralité

Les acteurs de la finance, à commencer par les banques, ont toujours été présents dans la construction et l’aménagement des villes. Parler de financiarisation de l’urbain ne renvoie donc pas à une irruption récente mais rend plutôt compte de nouveaux montages, de nouveaux produits et du rôle de courroie de transmission de certains investisseurs institutionnels entre les dynamiques financières des marchés et les dynamiques immobilières des villes. La financiarisation de la ville découle donc du comportement d’acteurs institutionnels appartenant au monde de la finance et qui considèrent les actifs urbains comme des produits financiers ordinaires : investir dans l’urbain relève à présent d’un arbitrage rentabilité-risque qui met la fabrique de la ville en concurrence avec des placements dans d’autres actifs, dont les produits financiers.

L’environnement bâti représente ainsi depuis les années 2000 un placement privilégié pour les acteurs de la finance. Une étude internationale récente [29] a montré le rôle clé des foncières cotées dans la financiarisation des dynamiques urbaines et en particulier des dynamiques centrales métropolitaines. Mesurant leur béta (c’est-à-dire leur degré de corrélation avec l’évolution des marchés financiers), l’étude distingue les stratégies spatiales des foncières cotées au béta proche des marchés et dites par conséquent « financiarisées » aux stratégies spatiales des foncières cotées au béta éloigné des marchés. À quelques exceptions près, il est apparu que les premières adoptent des arbitrages d’investissement en faveur des centres des métropoles européennes, tandis que les secondes privilégient soit les périphéries métropolitaines, soit les cœurs des villes petites et moyennes. À partir de l’exemple des foncières cotées, l’étude infère une corrélation forte entre logiques d’investissement urbain financiarisées, métropolisation et polarisation des actifs dans les centres. En raison de la valeur assurantielle [30] plus élevée des cœurs des grandes métropoles, la financiarisation accompagne bien un retour au centre des valeurs, des investissements et des actifs financiers.

Le retour au centre des grands équipements publics ?

La valeur assurantielle des centres-villes (et en particulier des métropoles) n’est pas uniquement le fruit d’une pure représentation de la part des investisseurs ou d’une logique de marché. C’est aussi une construction politique et économique plus vaste encouragée par la puissance publique. Cette dernière dispose de deux leviers pour renforcer la valeur assurantielle des centres : le guidage d’investissements publics dans les centres-villes avec la création d’équipements culturels, académiques, éducatifs, ou infrastructurels qui influent positivement sur les valeurs foncières et immobilières réelles ; la mise en place de politiques spatialisées dédiées aux cœurs de villes [31].

La création d’équipements publics dans les centres urbains accentue leur attractivité et participe du mouvement de retour au centre des investissements. C’est le cas du Centre Pompidou, pionnier de ce type de transformation dès les années 1970, qui ouvre un front de gentrification résidentielle puis commerciale dans le Marais, à Paris. Les exemples se multiplient plus récemment dans les années 2000 et 2010, comme le MUCEM à Marseille ou le centre Pompidou-Metz, situés en plein centre-ville. D’autres grands projets ont pour objectif d’étendre les centralités existantes en générant un nouveau pôle culturel sur ses franges : c’est le cas du Musée Confluence à Lyon, qui prolonge le centre-ville vers le sud au-delà de l’opération Confluence, située de l’autre côté de la gare de Perrache, ou le musée Louvre-Lens situé juste derrière la gare centrale. C’est également le cas d’autres équipements, comme l’Université de Perpignan, qui relocalise une partie de son campus périphérique dans le centre de la ville grâce au don par la mairie d’un ancien couvent. Situé au carrefour des quartiers Saint-Jean, Saint-Jacques et de La Réal, le nouveau campus se situe alors à la frontière de l’avancée maximale d’une dynamique de gentrification de Saint-Jean vers les pentes de Saint-Jacques, que poursuivent les travaux du nouveau campus avec la construction et la réhabilitation d’un bâti à destination des étudiants et, dans une moindre mesure, des enseignants et du personnel administratif [32].

Musée des Confluences, à Lyon

La gentrification : retour des habitants en centre-ville ou simple remplacement ?

Contrairement à ce que l’on a pu observer dans les agglomérations nord-américaines, il n’y a pas eu d’équivalent du white flight américain en Europe (abandon par les populations blanches des centres au profit des banlieues pavillonnaires aisées). Toutefois, on y a observé au cours de la seconde moitié du XXèmesiècle un phénomène de desserrement des classes sociales aisées en périphérie et de perte de population de certains centres-villes, en particulier concernant les aires urbaines moyennes comme Pau, Narbonne ou encore Dunkerque. Ce mouvement a culminé dans les années 1980 avant qu’apparaisse un phénomène socio-spatial nouveau : la gentrification des centres.

C’est la sociologue britannique Ruth Glass qui utilise la première ce terme, en 1964, pour décrire un phénomène de substitution, dans le centre de Londres, d’une population de classe moyenne supérieure à une population d’ouvriers. Commentant ses travaux, la géographe Catherine Bidou-Zachariasen reprend l’expression pour décrire un « processus à travers lequel des ménages de classes moyennes avaient peuplé d’anciens quartiers dévalorisés du centre de Londres, plutôt que d’aller résider en banlieues résidentielles selon le modèle dominant jusqu’alors pour ces couches sociales [33]». La gentrification procède ainsi à rebours du phénomène d’étalement urbain caractéristique de la ville fordiste.

Souvent démographique, la gentrification peut aussi être commerciale. Dans ce cas, elle ne renvoie pas à l’arrivée d’une population sociologiquement plus aisée mais qualifie le remplacement d’une offre commerciale ordinaire, adaptée à la catégorie de population vivant dans un quartier, par une offre commerciale de standing plus élevé, à destination d’une population exogène (touristes ou frontaliers plus fortunés dans le cas des villes de la frontière suisse, comme Annemasse). En France, on trouve des formes de gentrification commerciale dans le Marais parisien mais aussi dans le Vieux Lille ou encore à Perpignan, dans le quartier Saint-Jean, où on observe la présence de très nombreuses galeries d’art et de commerces haut de gamme qui contrastent avec le quasi désert de Saint Jacques et l’offre ordinaire de la Réal.

 

Gentrification et art dans le Vieux Lille, rue des Trois Molettes.

Si la gentrification résidentielle ou commerciale se traduit par l’arrivée de richesses plus importantes dans les centres, elle n’a pas forcément pour effet une augmentation quantitative du nombred’habitants ou du nombre de commerces. La gentrification résidentielle peut parfois même s’accompagner d’une baisse du nombre d’habitants, avec le départ de catégories sociales plus fragiles constituées de familles nombreuses et l’arrivée de jeunes couples de cadres supérieurs ou de retraités fortunés. Et si la gentrification commerciale génère quant à elle des flux économiques plus importants dus à la montée en gamme des produits, elle ne se traduit pas forcément par plus d’établissements commerciaux. Ce retour de l’économie en centre-ville qui s’observe avec la gentrification commerciale et/ou résidentielle est donc dû à des transformations qualitatives et non quantitatives.

 

La fin de la ville fordiste et du déclin des centres historiques ?

Selon l’urbaniste Françoise Choay, auteure de l’article Le règne de l’urbain et la mort de la ville, la transformation des dynamiques urbaines et l’urbanisation massive des territoires sont dues aux mutations des systèmes productifs, elles-mêmes liées aux révolutions industrielles. Des géographes spécialistes d’économie politique comme David Harvey ont mis en lumière à ce sujet l’existence de deux circuits de circulation du capital et des richesses au sein desquels l’urbain occupe une place pivot. Le premier circuit concerne les systèmes productifs, dans lesquels les surplus engendrés par le capitalisme industriel sont partiellement réinvestis, alimentant alors sa croissance. Le second circuit est celui de l’immobilier et de l’aménagement de l’espace, via la construction d’infrastructures et de bâti.

Lorsque le premier circuit entre en crise, c’est-à-dire lorsque le capital disponible est plus important que les besoins en investissements et que le système productif entre par conséquent en surproduction, le second circuit sert de déversoir : il évite ce faisant à la valeur du capital circulant disponible de se déprécier. Ce surplus de capital est alors investi dans l’immobilier, alimentant la croissance des infrastructures et du bâti, ce qui engendre de ce fait une urbanisation rapide des territoires et des espaces. Dans cette logique, la ville fordiste correspond à un temps de l’urbanisation du monde associé à la croissance des systèmes productifs fordistes. En raison de ses caractéristiques spatiales, c’est la ville fordiste qui explique les mécanismes de déclin des centres-villes au cours du XXèmesiècle. La renaissance des centres s’est donc opérée en partie à la suite de l’entrée en crise des logiques fordistes d’urbanisation.

 

La ville fordiste, parangon des Trente glorieuses

La ville dite fordiste a pour modèle les dynamiques industrielles et urbaines de la Rust Belt nord-américaine, où a prospéré l’industrie automobile des années 1920 aux années 1970. La ville fordiste est le produit de trois grands facteurs :

  • Un système productif : marqué par l’industrie automobile, il est organisé selon les canons du taylorisme (travail à la chaîne) ;
  • Un mode de vie : il résulte de la combinaison d’un type de profession (« culture » de vie), d’un niveau de salaire associé (niveau de vie), d’un espace (environnement de vie) et d’un niveau de confort matériel permis par le salaire et la taille du logement (conditions de vie) dépendants du volet social du fordisme.
  • Un espace urbain spécifique : la production de la ville est industrialisée et rationalisée à la suite de la transposition des logiques fordistes de l’industrie automobile à celles de la construction et de l’aménagement, créant des formes urbaines et des logiques d’aménagement de l’espace dites « fordistes ».

Et le fordisme créa l’urbain…

Le fordisme s’inscrit dans la continuité du taylorisme en lui ajoutant la dimension sociale des salaires. Il organise les systèmes productifs selon une organisation scientifique du travail, de laquelle découlent la spécialisation des tâches, l’optimisation des déplacements des ouvriers comme des produits et des composants et la constitution de chaînes de production qui en résultent. L’optimisation tayloriste de l’industrie automobile dégage d’immenses surplus réinvestis dans le système productif mais aussi dans l’urbanisation permise par la dimension sociale que le fordisme ajoute au taylorisme : plutôt que de réinvestir l’ensemble du surplus dans l’appareil de production, le fordisme en injecte une partie dans le salaire des ouvriers, qui sont alors mieux payés (leur rémunération suivant la croissance des profits industriels). L’objectif est d’en faire des consommateurs, en particulier des voitures qu’ils produisent, influant de ce fait sur les modèles urbains via les mobilités motorisées.

En faisant des ouvriers des consommateurs, le fordisme et le système politique qui en soutient la dynamique vont permettre d’en faire aussi des propriétaires de véhicules et de logements. Le gouvernement fédéral des États-Unis soutient alors les politiques d’acquisition de logements – essentiellement des pavillons de banlieue – pendant que les gouvernements fédérés et surtout municipaux organisent l’équipement des périphéries : émergent alors les suburbs, directement issues du fordisme.

Les relations entre aménagement des suburbs et fordisme se déploient à trois niveaux. Au niveau individuel, les salaires plus élevés, qui permettent l’endettement et l’acquisition de logements, constituent une redistribution invisible des profits nés de la croissance du système productif fordiste. Au niveau de l’équipement urbain et de la construction des suburbs, les fonds publics mobilisés sont issus des prélèvements divers permis par la richesse créée par le fordisme (impôts sur les sociétés, sur les revenus, sur la croissance de la consommation permise par l’augmentation des salaires…). Au niveau fédéral, le soutien public à l’accession massive à la propriété est permis par les rentrées fiscales au budget public et par le surplus de capital dont dispose le système financier à la suite de la croissance des industries fordistes.

Par ces trois niveaux, le fordisme alimente une croissance urbaine effrénée qui conduit à la multiplication des suburbs. Ces dernières sont rendues accessibles financièrement par les salaires et physiquement par la généralisation des transports automobiles. Le fordisme fait ainsi entrer les villes de la Rust Belt dans l’ère de la suburb et de la consommation de masse via l’achat de voitures et de logements, dont la taille module la capacité d’accumulation des ménages et donc leur capacité de consommation de biens légers et courants.

… ainsi que l’étalement urbain

Dans cette dynamique vertueuse, l’accessibilité financière des suburbs est la clé du modèle de la ville fordiste. Cette accessibilité n’est pas qu’une question de salaire et de capacité d’achat et d’endettement des ménages : elle est aussi une question de coût, et en particulier de coût foncier et de construction. L’industrie de l’immobilier et, au-delà, de l’aménagement urbain s’est alors inspirée des logiques de rationalisation fordiste de la production pour industrialiser les processus d’urbanisation. Ainsi, des lotissements entiers sont standardisés et démultipliés à l’infini. L’aménagement de ponts, d’autoroutes, d’équipements publics (comme les écoles, les piscines, les centres commerciaux) a lui aussi été rationalisé et standardisé, ce qui en a fait fortement baisser le coût de revient et donc de financement pour les collectivités et/ou d’achat. Le fordisme a ainsi rendu accessible la suburbà ses ouvriers – ainsi qu’à l’ensemble de la classe moyenne – grâce à un abaissement des coûts de l’aménagement urbain et de la construction pavillonnaire. C’est ce même phénomène d’industrialisation et de coûts faibles que l’on observe en France dès les années 1950 avec l’aménagement des cités de banlieue selon la logique du chemin de grue et de la préfabrication d’éléments standardisés – système d’inspiration fordiste par excellence.

Alors qu’en France la banlieue fordiste s’est verticalisée, en Amérique du nord elle s’est étalée : la ville fordiste est donc une ville du mitage périurbain et de l’étalement, fortement consommatrice de ressources foncières et environnementales. De la même façon, en favorisant un usage automobile par l’aménagement d’espaces périurbains sur de longues distances et avec de faibles densités (disqualifiant la rentabilité des transports en commun), la ville fordiste et ses suburbs sans fin ont rendu l’urbain dépendant de la voiture et donc, mécaniquement, du pétrole.

La suburb fordiste de Los Angeles, en Californie

La ville fordiste et la crise de la centralité

La ville fordiste est une ville de la périphérie étalée et du transport automobile individuel. Elle s’est traduite, aux États-Unis, par un évidement des centres, en particulier de la part des classes moyennes et des classes aisées que le sociologue Thomas Schelling a qualifié de white flight. L’incitation publique et les investissements privés dans l’aménagement des suburbsainsi que les mouvements migratoires des classes solvables des centres vers les périphéries ont contribué à un appauvrissement des centres et à une crise de la centralité urbaine. Cette crise est triple : sous-investissement public et privé ; perte de populations solvables ; déclin commercial et serviciel associé – ce dernier étant à la fois dû au départ des classes moyennes, aux coûts et charges plus élevées dans les centres historiques et à leur moindre accessibilité aux voitures.

La ville fordiste a ainsi conduit à une mise en concurrence spatiale et fonctionnelle des suburbset des centres historiques, ces derniers ressortant largement perdants de la confrontation. Les chocs pétroliers des années 1970 et les tensions qu’ils impliquent sur le fonctionnement de la ville fordiste et sa grande dépendance au cours bas du pétrole infléchissent ponctuellement la tendance, en impulsant les premiers mouvements de gentrification et de retour d’une certaine population dans les centres dégradés et paupérisés. Le mouvement est toutefois très timide et il faut attendre les années 1980 et 1990 pour que la gentrification sélective des espaces centraux prenne véritablement de l’ampleur. Entre temps, des centralités périphériques nouvelles ont été aménagées. En Amérique du nord, il s’agit de ce que le journaliste Joel Garreau appelle les edge cities [34] (villes lisières) : des centralités périurbaines peu denses faites de centres commerciaux et de pôles d’activité tertiaire. En Europe et en particulier en France, il s’agit de centralités essentiellement commerciales articulées autour de centres commerciaux structurés par une enseigne de la grande distribution (les hypermarchés et leurs galeries marchandes), de centres d’affaires excentrés comme La Défense à Paris ou de centres de recherche couplés à des campus universitaires comme Mériadeck à Bordeaux ou le campus Via Domitia à Perpignan. Dans certain cas, des combinaisons sont possibles, comme à Lyon avec l’aménagement à Bron du campus Porte des Alpes et du centre commercial éponyme. L’aménagement très contemporain à la fin des années 2010 et au tournant des années 2020 du plateau de Saclay, en région parisienne, s’inscrit dans cette logique, démontrant la grande vitalité des logiques fordistes de construction de l’urbain y compris de nos jours.

 

Dépasser l’héritage des villes fordistes : pour un soutien des centres historiques

Si, en France, les centres-villes des métropoles ont su plutôt bien résister à la concurrence fonctionnelle des banlieues, ceux des villes petites et moyennes en ont beaucoup souffert au cours des Trente glorieuses et jusqu’aux années récentes. C’est particulièrement le cas de l’offre commerciale et servicielle des centres historiques [35]. Comment lutter contre la dévitalisation de centres consécutive à l’érection fordiste des banlieues ?

Action Cœur de Ville [36] : un dispositif inédit de soutien des centres des aires urbaines petites et moyennes

Depuis les années 1980, de nombreuses mesures se sont multipliées soit pour préserver autant que faire se peut la vitalité des centres-villes, soit pour limiter l’aménagement de centralités commerciales périphériques. La posture qui consiste à soutenir les centres-villes, comme celle qui aidait autrefois les périphéries, relève d’un choix purement politique. Derrière cet arbitrage, se trouvent des enjeux très variés : électoraux bien entendu, mais aussi économiques, écologiques (rappelons que l’étalement urbain gourmant en ressources et sa grande dépendance aux énergies fossiles ne participe pas à la transition écologique des territoires urbains), idéologiques, parfois dogmatiques… Les politiques urbaines et leurs traductions spatiales relèvent de l’esprit complexe de chaque époque. Dernier né des initiatives en faveur des centres, le programme « Action Cœur de Ville » est lancé en 2017 par le Ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Il poursuit un double objectif :

  • Améliorer les conditions de vie des habitants des villes moyennes – en particulier de leur centre, en renforçant les facteurs de la centralité ainsi que les aménités afférentes (le plaisir d’être en centre-ville). Pour ce faire, les projets urbains innovants adaptés aux marchés et aux besoins locaux, favorisant la transition écologique et l’inclusion sociale et valorisant le patrimoine architectural, paysager et urbain sont privilégiés.
  • Conforter le rôle de moteur de ces villes dans le développement du territoire, ce qui revient à recréer des aires de chalandise correspondant à l’attraction des activités et fonctions des centralités urbaines historiques.

Ce programme de financement public concerne en tout 222 villes moyennes, pour un montant total de 5 milliards d’euros sur 5 ans, assurés principalement par la Caisse des dépôts pour 1 milliard d’euros (en fonds propres), par des prêts octroyés par la Banque des Territoires pour 700 millions d’euros, par Action logement pour 1,2 milliard d’euros et par l’Agence nationale de l’habitat pour 1,2 milliard d’euros. Le programme est d’abord partenarial. Il associe l’État (par le biais du préfet), le préfet de région et le Commissariat général à l’égalité des territoires (devenu par fusion l’Agence nationale de la cohésion des territoires), les trois partenaires financiers nationaux (la Banque des territoires, Action logement et l’Agence nationale de l’habitat), l’association Villes de France, les municipalités des villes moyennes, les acteurs des intercommunalités ainsi que des partenaires publics et privés régionaux et locaux.

Les actions de revitalisation sont menées dans le cadre d’un projet de territoire qui engage à la fois la commune centrale et l’ensemble de son intercommunalité.

Les 222 territoires bénéficiaires du programme Action cœur de ville. Source : Ministère de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales,www.cohesion-territoires.gouv.fr/programme-action-coeur-de-ville

Cinq axes d’action concrète sont privilégiés par les financements :

  • La réhabilitation-restructuration de l’habitat en centre-ville ;
  • Le développement économique et commercial ;
  • L’accessibilité, les mobilités et connexions ;
  • La mise en valeur de l’espace public et du patrimoine ;
  • L’accès aux équipements et services publics.

Malgré le succès de certains projets, des voix se sont toutefois élevés pour mettre en lumière les limites du programme Action cœur de ville. Aurélien Delpirou, maître de conférences à l’École d’urbanisme de Paris, s’interroge sur la mobilisation du programme au regard des enjeux des territoires : « Alors que s’ouvre la phase opérationnelle du plan, Action cœur de ville semble en effet handicapé par trois principaux obstacles : une approche strictement développementaliste des villes moyennes ; une échelle et des modalités d’action qui laissent de côté la question des concurrences territoriales ; un risque de standardisation des projets.[37] »

Les centres des grandes métropoles souffrent aussi : le cas des États-Unis

Le commerce de centre-ville de certaines grandes métropoles connaît lui aussi une crise. C’est le cas en particulier dans les métropoles nord-américaines, plus touchées que leurs homologues européennes par la fuite des activités et des populations en périphérie. Afin d’atténuer l’ampleur de la dévitalisation, de nouvelles formes de commerce et de gouvernance voient le jour. L’hebdomadaire Libre-Service Actualités (LSA) écrivait en janvier 2019 qu’à New York, « la créativité du commerce est intacte » et que la ville « reste une très grande ville de commerce »[38]. Par exemple, les digitally native vertical brands (comme Warby Parker, Casper, Bonobos, Dollar Shave Club, ou Glossier), qui sont nées du web, y ouvrent des boutiques physiques avec des expériences d’achat repensées, des produits au paiement.

Dans cette lignée de magasins au concept innovant, les pop-up stores semblent se multiplier dans les grandes villes, au point que le magazine Challenges titrait un article « Les pop-up stores envahissent Paris » fin 2018. À Boston, le concept a été utilisé pour développer une « Pop-Up ‘Social Infrastructure’ », que l’on pourrait traduire par « infrastructure sociale éphémère »[39] : des magasins vacants y ont été transformés en espaces publics temporaires pour redynamiser les rues commerçantes, pallier le manque d’espace public et créer des loisirs abordables. Il faut toutefois ici distinguer les stratégies marketing et les business models d’entreprises issues du Net, des politiques publiques menées par des municipalités pour recréer de la fréquentation dans des espaces commerciaux centraux en berne, comme c’est le cas de l’initiative de Boston. Ces expérimentations montrent la plasticité des activités économiques en ville et, conséquemment, l’émergence de nouveaux types d’espaces urbains. Ces initiatives ont été également mises en place dans des villes plus petites, comme dans certaines agglomérations en décroissance d’Allemagne de l’Est ou des villes moyennes françaises ayant su rebondir après des années difficiles, comme Saint-Etienne.

 

Les périphéries urbaines : le nouvel espace des crises urbaines ?

Au cours des années 2010, le retournement spatial du soutien politique de l’aménagement des périphéries urbaines à celui de la renaissance des centres historiques a engendré une nouvelle crise : celle du périurbain. Ce retournement est essentiellement français, mais s’observe ailleurs en Europe comme en Amérique du Nord. Il est symptomatique qu’en 2008 déjà, la crise financière des subprimesait majoritairement concerné l’acquisition de pavillons de banlieue par une population à la limite de la solvabilité. La responsabilité de la puissance publique dans la dégradation de la situation et la crise qui en a résulté est double. Tout d’abord, l’absence de soutien politique à l’acquisition de logements dans le périurbain, au contraire des politiques d’aide menées au cours des Trente glorieuses, a laissé sans protection les foyers les plus fragiles, qui ont dû recourir à des emprunts hypothécaires subprimés pour acquérir leur pavillon. Ensuite, c’est le relèvement des taux directeurs décidé par la Fed (banque centrale des États-Unis) qui a conduit au défaut de paiement de nombreux ménages du périurbain, devenus soudainement incapables de rembourser leurs emprunts immobiliers dont les taux d’intérêt fluctuants (subprimés) étaient indexés sur lesdits taux directeurs. Action consciente et volontaire ou impensé des périphéries, le constat est le même : le temps du soutien étatique au périurbain a vécu, l’heure est bien au retour des politiques urbaines visant les cœurs de ville et les centralités urbaines.

La montée d’une crise des périphéries urbaines

En France, la crise du périurbain est restée longtemps silencieuse, jusqu’à l’explosion spectaculaire de colère des mouvements des gilets jaunes en novembre 2018. Lors d’une conférence organisée par La Fabrique de la Cité en mars 2019 [40], l’analyste politique Brice Teinturier, présentant une étude d’opinion sur les fractures de la mobilité commandée par VINCI Autoroutes, décrivait un périurbain souffrant d’ « un système cumulatif dans les handicaps», puisque ses habitants, qui ont quitté les centres urbains pour bénéficier d’un foncier abordable, sont contraints de se déplacer en voiture et de subir les hausses des coûts de déplacement et le retournement des politiques publiques. Ainsi, les catégories socioprofessionnelles paupérisées occupent plutôt les espaces de faible densité du périurbain, dans lesquels le retournement des politiques publiques les a partiellement enfermées, quand les plus aisées se rapprochent des centres urbains et investissent les cœurs de ville revitalisés et gentrifiés. La situation reste toutefois complexe, et le géographe Jacques Lévy nuance fortement une fracture des mobilités trop caricaturale entre centres-villes et périphéries urbaines, montrant une marqueterie plus fine des réalités socio-spatiales urbaines [41].

Il faut toutefois être très vigilant vis-à-vis de cette description d’une « fracture » territoriale entre ville dense et périphérie « éclatée »[42]. Comme l’explique une étude conduite par l’Institut Paris Région pour la région Île-de-France, opposer « deux France, celle des métropoles qui ‘gagnent’ et celle de la périphérie qui ‘perd’, sans considérer l’hétérogénéité de ces dits territoires et la diversité des espaces qui les constituent» est caricatural [43]. La crise des gilets jaunes est toutefois symptomatique d’un sentiment d’abandon d’un certain périurbain.

Pour le politologue Jérôme Fourquet, directeur du département opinion et stratégies d’entreprise de l’institut de sondages IFOP, « l’élément déclencheur de cette fronde[…] a été la hausse des prix des carburants,[symptomatique] du rapport qu’entretiennent les territoires avec la voiture. On constate une forte densité de points de rassemblement[des gilets jaunes] dans la grande périphérie des principales métropoles, zones dans lesquelles résident de nombreux pendulaires ».[44] À la fois dépendante des déplacements automobiles fortement affectés par la hausse du prix des carburants, par les mesures de limitation de vitesse ou celles de restriction de la place de la voiture dans les centres-villes et prisonnière d’un périurbain en berne (perte de commerces, de services publiques, voire d’habitants), la figure du gilet jaune apparaît alors bien comme celle du déclin de la ville fordiste. La colère est d’abord, sans doute, celle d’une population ayant joué le jeu de l’encouragement public à la périphérisation fordiste des villes, avant le brutal retournement politique en faveur des centres dont cette population est exclue en raison d’un coût d’accès à présent prohibitif.

Vers une crise de l’aménagement commercial périurbain ?

Accompagnant la fin du modèle fordiste d’aménagement urbain, on constate dans de très nombreuses agglomérations la déréliction de certains centres commerciaux et grandes surfaces périphériques [45], au point que ce phénomène a donné naissance à l’expression anglaise de dead malls [46](ou centres commerciaux « morts », vacants). Après un pic de créations-extensions de centres commerciaux en 2007 et 2008, ce rythme a été assez considérablement ralenti après la crise des subprimes [47]. Cela pourrait donner lieu à une faillite généralisée des enseignes qui les font vivre et signer la fin d’un modèle commercial et urbanistique. Les logiques spatiales de l’aménagement commercial ont changé pour tendre vers la redensification et la réhabilitation de points de vente existants plutôt que vers la création ex nihilo de centres commerciaux dans les périphéries où du foncier est disponible.

Les centres commerciaux et grandes surfaces des espaces périphériques sont ainsi souvent accusés [48] de miner le commerce de centre-ville. Les projets de création, d’extension ou de modernisation font l’objet de contestations populaires parfois véhémentes. C’est le cas du projet Val Tolosa, dans la périphérie ouest de Toulouse, destiné à être « un pôle shopping et loisirs tourné vers la nature » selon le site annonçant le projet [49]. Si le projet est lancé depuis le début des années 2000, le début du chantier était prévu en 2018 et l’ouverture pour 2020 [50]. Malgré « l’inspiration nature », la « dynamique économique » et la « dynamique citoyenne » mises en avant sur le site du projet, dont le bailleur est Unibail-Rodamco, le collectif citoyen « NON à Val Tolosa » dénonce un « grand projet inutile, imposé et illégal » qui impose d’importantes dépenses aux collectivités en matière d’infrastructures routières et prévoit de détruire un écosystème qui abrite des espèces animales et végétales protégées [51]. Après de multiples recours en justice, le projet est à nouveau à l’arrêt depuis juillet 2019, à la suite d’une décision du Conseil d’État annulant l’arrêté préfectoral qui avait autorisé la destruction d’espèces protégées [52]. On observe des difficultés similaires avec le projet EuropaCity, définitivement abandonné le 7 novembre 2019. Les difficultés rencontrées par ces projets reflètent un changement de regard sur les périphéries commerciales.

La ville fordiste n’a pas dit son dernier mot

Les années 2010 sont celles d’une renaissance des centres-villes et d’une crise des périphéries. Cela ne signifie pas pour autant la fin de l’étalement urbain. De nombreux signaux semblent très fortement nuancer la fin de la ville fordiste et laissent à penser que l’étalement urbain n’est pas près de s’interrompre et encore moins de s’inverser définitivement.

D’une part, les logiques économiques favorables à l’étalement n’ont pas disparu. C’est ainsi le cas, en Amérique du nord, des logiques assurantielles à l’œuvre dans l’achat d’un logement par les particuliers. Le géographe français Renault le Goix [53] a ainsi mis en lumière le fait que l’étalement urbain des métropoles nord-américaines était alimenté par les stratégies individuelles et collectives à l’œuvre dans la quête d’une valeur assurantielle [54] des logements, c’est-à-dire de la recherche d’un cadre géographique stable permettant d’assurer un accroissement de la valeur réelle des biens dans l’optique de pouvoir ensuite les vendre afin de financer sa dépendance et sa propre fin de vie. Dans cette logique, les lotissements périurbains sont des espaces privilégiés d’investissement car ils permettent plus facilement de contrôler les facteurs pouvant influer sur le maintien et l’accroissement de la valeur réelle d’un bien immobilier, en particulier en contrôlant l’évolution sociologique (et raciale, pour les États-Unis) du voisinage. C’est ce mécanisme qui explique en partie le white flight des centres-villes vers leurs périphéries dans les agglomérations de la Rust Belt par exemple – mouvement plus général qui se poursuit de nos jours, en particulier en Californie et dans les aires urbaines de la Sun Belt.

D’autre part, les périphéries urbaines restent des espaces privilégiés pour l’aménagement d’équipements nécessitant une forte emprise au sol, comme ceux de la logistique (les entrepôts de l’e-commerce par exemple), si bien que la fonctionnalisation des périphéries urbaines, soutenant pourtant une géographie post-fordiste du commerce en ville, est de fait fordiste du point de vue de la logistique. Dans un autre ordre d’idée, on trouve également une préférence pour le périurbain pour d’autres types d’équipements gourmands en foncier. C’est le cas des stades, qui animent des polarités urbaines de plus en plus multifonctionnelles. On observe ce mouvement partout en Europe ; la Suisse, par exemple, a entrepris de grands chantiers de restauration de ses stades devenus vétustes, ouvrant la voie à l’édification d’infrastructures multifonctionnelles très attractives.

Aujourd’hui, combiner stade de football et centre commercial est devenu une spécialité helvétique. Cette multifonctionnalité, issue du concept d’achats-loisirs, a permis aux grandes sociétés de développement-construction suisses telles que Losinger/Marazzi, Hauser Rutishauser Suter (HRS) et Karl Steiner de renouveler l’offre commerciale des deux principaux groupes de commerce de détail suisses face à une concurrence internationale accrue (notamment les allemands Aldi et Lidl), d’autant que la situation géographique de ces complexes (cœur ou lisière des villes) favorise l’attraction des investisseurs privés. La multifonctionnalité de ces complexes suisses répond également à la demande de diversification de placements immobiliers des institutions financières depuis la crise de 2001-2002. Symboles de ces nouveaux mégaprojets commerciaux financiarisés, Sihlcity à Zurich (600 millions de francs), le tout premier urban entertainment center du pays, pour ne pas dire une ville dans la ville, le Stade de Suisse à Berne (350 millions) et le Stade de la Maladière à Neuchâtel (200 millions). Le réseau d’acteurs sur le marché des projets multifonctionnels demeure néanmoins limité puisque peu d’institutions financières ont les capacités d’investir dans de tels projets, hormis celles issues du circuit intermédié et titrisé. En outre, cette reconfiguration soulève la question de la place qu’occupent les acteurs publics locaux dans ce nouveau jeu d’acteurs ainsi que de l’autorité qu’ils exercent face à des acteurs financiers puissants.

 

Conclusion – La renaissance de la centralité à l’heure de la COVID-19

La ville fordiste, caractérisée par les mobilités automobiles, l’aménagement industriel des lotissements de banlieue et l’idéal de l’accession à la propriété de la classe moyenne, a construit le périurbain européen et les suburbs nord-américaines en même temps que se vidaient les centres-villes. Soutenu par des investissements privés et des politiques publiques incitatives, le mouvement a perduré pendant toute la seconde moitié du 20ème siècle. Or s’opère au cours des années 2010 une double rupture. D’une part, 2008 traduit une crise des suburbs via celle des subprimes. D’autre part, les politiques publiques, qu’elles soient pro-métropolisation ou pro-villes moyennes, encouragent la renaissance des centres-villes. Enfin, les acteurs privés, au premier chef les acteurs « financiarisés », tendent à reconsidérer leurs arbitrages spatiaux en faveur des centres, perçus comme pourvoyeurs d’externalités positives accréditant l’idée d’une valeur assurantielle plus importante là qu’ailleurs.

S’il apparaît qu’une certaine économie semble revenir dans les centres urbains, voit-on pour autant se profiler une fin de la ville fordiste et des aménagements périphériques ? Les centres urbains sont-ils, en outre, définitivement sauvés ? Rien n’est certain. Si certaines périphéries urbaines entrent dans une crise durable, que ce soit celle des mobilités automobiles, de l’accession à la propriété privée ou de l’offre commerciale et servicielle, la périurbanisation se poursuit à peu près partout. En outre, la crise sanitaire imputable à l’irruption de la COVID-19 et les épisodes traumatisants de confinement collectif ont, semble-t-il, conduit à remettre en question, au moins partiellement, l’idéal d’une vie dans les espaces centraux, en raison de la maximisation des opportunités d’interactions sociales qui en fait la richesse et qui devient, en temps de pandémie, un risque structurel de santé publique.

La COVID-19 sonne-t-elle le glas du retour de l’économie en ville et ravivera-t-elle un urbanisme fordiste jugé plus hygiéniste – mais pourtant moins écologique ? Rappelons en effet que la périurbanisation, avec sa dépendance aux énergies fossiles comme aux déplacements motorisés et ses immenses besoins en ressources foncières, bien que compatible avec une mitigation des risques sanitaires, ne l’est pas avec l’horizon tout aussi urgent de la transition écologique des territoires. Or cette nécessité de la transition écologique et de la décarbonation des villes a été plébiscitée par les Français lors des dernières élections municipales de mars et juin 2020. Entre le soutien institutionnel au centre, la poursuite de la périurbanisation fordiste, la vulnérabilité sanitaire des villes et l’injonction écologique de la société, comment évoluera le retour de l’économie en centre-ville dans les années à venir ? Seules les pratiques spatiales des populations urbaines permettront de répondre à cette question – et à ses incertitudes pour nos centres-villes comme pour nos banlieues.


[1] Voir à ce sujet la note « Villes moyennes, entre imaginaires et complexité », publiée par La Fabrique de la Cité en juin 2020 : https://www.lafabriquedelacite.com/publications/les-villes-moyennes-entre-imaginaires-et-complexite/

[2] Il s’agit ici d’une catégorisation des théories de la base économique, dans lesquelles les activités de « base » sont celles qui assurent la spécialisation d’un territoire sur le socle de ses avantages comparatifs. Ces activités s’opposent aux activités non-basic, activités ordinaires que l’on trouve dans tout type d’espace, et qui ne correspondent à aucune spécialisation. Le passage de l’anglais au français introduit une ambiguïté, « basique » pouvant être confondu en français avec l’idée de « commun », ce qui n’est pas le cas de la version angliciste qui insiste justement sur la spécificité des « activités de base » (celles de la spécialisation, à l’opposé des activités communes).

[3] https://www.cnbc.com/2018/12/03/ikea-moves-into-manhattan-with-its-first-city-center-store-in-2019.html

[4] Voir le point de vue d’expert publié par La Fabrique de la Cité le 4 octobre 2019 « Le commerce et la ville : vers un changement radical des logiques d’aménagement ? » :https://www.lafabriquedelacite.com/publications/le-commerce-et-la-ville-vers-un-changement-radical-des-logiques-damenagement-entretien-avec-philippe-dugot/

[5] https://www.capital.fr/entreprises-marches/a-limage-dikea-les-grandes-enseignes-se-rapprochent-des-centres-villes-1337270

[6] http://theconversation.com/ikea-et-les-geants-de-la-distribution-peuvent-ils-sauver-les-centres-villes-116624

[7] https://www.lagazettedescommunes.com/621124/de-la-peripherie-saturee-au-centre-des-grandes-villes-lexode-des-grandes-enseignes/

[8] Voir à ce sujet R. Languillon, 2020, E-commerce, la révolution numérique déconstruit-elle les villes ?, Objectif Grand Paris, n°29, pp. 120-124. URL : https://fr.calameo.com/read/0032483362f83faadcaa3

[9] Voir également la conférence que Pascal Madry a donnée à La Fabrique de la Cité le 27 février 2020 lors de l’événement « Rez-de-ville et commerces : le grand bazar ? ». URL : https://www.lafabriquedelacite.com/actualites/rez-de-ville-et-commerces-le-grand-bazar/

[10] https://www.lagazettedescommunes.com/621124/de-la-peripherie-saturee-au-centre-des-grandes-villes-lexode-des-grandes-enseignes/

[11] https://www.lagazettedescommunes.com/621124/de-la-peripherie-saturee-au-centre-des-grandes-villes-lexode-des-grandes-enseignes/

[12] https://www.lesechos.fr/industrie-services/conso-distribution/le-commerce-de-centre-ville-se-rebiffe-992631

[13] Source : INSEE, 2016

[14] Il s’agit de la fédération pour la promotion du commerce spécialisé.

[15] https://www.procos.org/images/procos/presse/2019/procos_palmares_2019.pdf

[16] https://www.citylab.com/life/2019/08/vacant-storefront-tracker-law-nyc-retail-rent-control/595294/

[17] https://www.bloomberg.com/news/articles/2019-07-25/new-york-doubles-down-on-tracking-empty-storefront-problem

[18] https://www.metropolitiques.eu/Le-retour-des-tours-dans-les.html; Geoffroy Mollé, doctorant de Manuel Appert, a également mis en lumière ces phénomènes pour l’immobilier résidentiel : https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01952695/file/Colloque%20Ville%20de%20demain%20Toulouse.pdf

[19] https://www.metropolitiques.eu/Le-retour-des-tours-dans-les.html

[20] https://www.ladepeche.fr/2019/07/25/tour-occitanie-un-bond-de-geant,8330271.php

[21] https://www.lesechos.fr/industrie-services/immobilier-btp/occitanie-une-tour-a-la-hauteur-des-ambitions-de-toulouse-1122740

[22] Bien que de taille moyenne, Malmö est toutefois la troisième ville de Suède en termes démographiques.

[23] Véronique Le Goaziou, Ville | Les politiques de la ville, Encyclopedia Universalis.

[24] Pierre Gilbert, L’effet de légitimité résidentielle : un obstacle à l’interprétation des formes de cohabitation dans les cités hlm, Sociologie, vol. vol. 3, no. 1, 2012, pp. 61-74.

[25] Gabriel Fauveaud, « Photographie de Hanoi : L’essor des « condos » dans le monde », in Bretagnolle A., Le Goix R. et Vacchiani Marcuzzo C. (dir.), Métropoles et mondialisation, La documentation Photographique, n° 8082, 2011.

[26] https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/545422/stat-schl-montreal

[27] https://www.lapresse.ca/maison/immobilier/201902/15/01-5214924-forte-demande-pour-les-condos-de-luxe.php

[28] Renaud Le Goix et Ludovic Halbert, revue Urbanisme n°384, « La ville financiarisée », https://hal-enpc.archives-ouvertes.fr/hal-00793967

[29] Cöen A., Languillon R., Simon A. et Zaiter S., 2020, Financialisation and participation in the metropolisation dynamics of European listed property companies, Journal of European Real Estate Research. URL : https://www.emerald.com/insight/content/doi/10.1108/JERER-10-2019-0035/full/html?skipTracking=true

[30] Par valeur assurantielle, il s’agit ici de l’impact positif que l’espace et les politiques associées ont sur l’accroissement des valeurs immobilières réelles (et non seulement nominales) sur le long terme.

[31] C’est ainsi le cas de la politique Action cœur de ville, mise en place en décembre 2017 par le Ministère de la cohésion des territoires dans 222 communes centrales d’aires urbaines petites et moyennes. https://www.cohesion-territoires.gouv.fr/programme-action-coeur-de-ville

[32] Nima Aftim et Raphaël Languillon-Aussel, « Terre gentrifiable et coalition de croissance : la relocalisation de l’université de Perpignan au service d’intérêts privés ? », Métropolitiques, 10 mai 2017. URL : https://www.metropolitiques.eu/Terre-gentrifiable-et-coalition-de-croissance-la-relocalisation-de-l-universite.html

[33] Voir Bidou-Zachariasen, C. (dir.), 2003, Retours en ville. Des processus de « gentrification » urbaine aux politiques de « revitalisation » des centres, Paris, Descartes et Cie, page 10.

[34] Voir le compte-rendu de l’ouvrage qu’en fait la géographe Cynthia Ghorra-Gobin, spécialiste des phénomènes de métropolisation en Amérique du Nord : https://www.persee.fr/doc/ahess_0395-2649_1993_num_48_4_279183_t1_0971_0000_002(consulté en juillet 2020).

[35] Sur la crise des villes moyennes, voir la note de La Fabrique de la Cité de juin 2020 : « Les villes moyennes, entre imaginaires et complexité » : https://www.lafabriquedelacite.com/publications/les-villes-moyennes-entre-imaginaires-et-complexite/

[36] Voir le site du Ministère de la cohésion des territoires pour plus d’informations : https://www.cohesion-territoires.gouv.fr/programme-action-coeur-de-ville(consulté en juillet 2020).

[37] Aurélien Delpirou, 2019, Action cœur de ville : une réponse en trompe-l’œil à la crise des villes moyennes ?, Métropolitiques. URL : https://www.metropolitiques.eu/Action-coeur-de-Ville-une-reponse-en-trompe-l-oeil-a-la-crise-des-villes.html

[38] https://www.lsa-conso.fr/new-york-fait-toujours-le-show,309216

[39] https://www.citylab.com/solutions/2019/09/retail-vacancy-business-public-space-culturehouse-boston/597724/

[40] https://www.lafabriquedelacite.com/actualites/les-fractures-de-la-mobilite-dans-les-territoires-francais-aux-sources-des-crises-actuelles/

[41] Voir la vidéo « Jacques Lévy – Les Français et les fractures de la mobilité dans les territoires » mise en ligne par La Fabrique de la Cité le 27 mars 2019 : https://www.lafabriquedelacite.com/publications/37053/

[42] https://books.openedition.org/editionscnrs/9401?lang=fr

[43] Mariette Sagot, « Gentrification et paupérisation au cœur de l’Île-de-France. Évolutions 2001-2015 » (rapport), Institut Paris Région, mai 2019, 84 p.

[44] https://jean-jaures.org/nos-productions/les-gilets-jaunes-revelateur-fluorescent-des-fractures-francaises

[45] https://www.rtl.fr/actu/conso/va-t-on-vers-la-fin-de-la-grande-distribution-7797522882

[46] https://www.theatlantic.com/notes/2019/05/dead-malls-everywhere/588970/

[47] https://www.lagazettedescommunes.com/609235/urbanisme-commercial-la-fin-de-la-folie-des-grandeurs/

[48] https://www.lagazettedescommunes.com/559149/une-ville-forte-commercialement-en-peripherie-le-sera-aussi-en-centre-ville/

[49] http://www.valtolosa.com/

[50] http://www.valtolosa.com/le-projet-dates.html

[51] https://www.gardaremlamenude.com/blog/pages/accueil

[52] https://www.lemonde.fr/economie/article/2019/07/26/un-nouveau-revers-pour-le-projet-de-centre-commercial-val-tolosa-pres-de-toulouse_5493709_3234.html

[53] Le Goix R., 2016, Sur le front de la métropole. Une géographie suburbaine de Los Angeles. Paris : Publications de la Sorbonne.

[54] Il faut veiller à distinguer la valeur assurantielle du point de vue de l’industrie des assurances et la valeur assurantielle géographique telle que la définissent les sciences humaines et sociales et les sciences économiques. Pour les premières, la valeur assurantielle est la valeur d’un bien en regard de la perte assurable de ce dernier. Elle s’appuie souvent sur le coût de remplacement ou de reproduction du bien assuré, en fonction des nouvelles normes de construction à la date de l’évaluation. Pour les secondes, la valeur assurantielle d’un bien est celle que l’on peut espérer en obtenir lors d’une vente ultérieure au bout de plusieurs années, permettant, entre autres, de financer sa fin de vie et sa dépendance. Il s’agit donc d’un pari sur l’évolution future de la valeur du bien, dans un système économique libéral où le financement de la vieillesse repose essentiellement sur les individus eux-mêmes.

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La Fabrique de la Cité est le think tank des transitions urbaines, fondé en 2010 à l’initiative du groupe VINCI, son mécène. Les acteurs de la cité, français et internationaux, y travaillent ensemble à l’élaboration de nouvelles manières de construire et reconstruire les villes.

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