Rénovation énergétique : stratégies pour un changement d’échelle avec les villes moyennes
Les enjeux de la rénovation énergétique de l’habitat sont majeurs, multiples et croissants :
- Les seuls logements (hors bâtiments tertiaires) représentent près de 30% de la consommation d’énergie finale de la France. Le parc français[1] étant parmi les plus énergivores de l’UE (HCC 2020), il implique à la fois de fortes importations de pétrole et de gaz, ainsi qu’une contrainte importante sur le « pic électrique » français, déjà de loin le plus élevé d’Europe (bilan électrique RTE 2019, p.19-20).
- Autre conséquence, plus de 22% des ménages sont en situation de précarité énergétique : ils dépensent plus de 8% de leur revenu pour le chauffage et/ou souffrent du froid (Onpe 2023), voire résident dans des logements indignes (dangereux et/ou sans confort).
- Enfin, une part importante du parc énergivore et dégradé reste vacant sur de longues durées, avec des impacts lourds sur l’attractivité des centres des villes petites et moyennes, ainsi que sur la sobriété foncière, y compris dans les zones détendues (Etude Dreal GE).
Au regard de ces enjeux, quelles politiques de rénovation énergétique sont menées en France et avec quels résultats ? Quelles spécificités des programmes conduits dans les villes moyennes ? Quelles stratégies efficaces au regard des différents types d’habitats et de propriétaires ?
Afin de répondre à ces questions, cette note présente les principaux types de programmes mis en œuvre en France ainsi que leur utilisation dans les villes moyennes[2], avant de détailler cinq exemples locaux aux résultats très supérieurs à la moyenne nationale et d’en tirer les enseignements généraux. Ceux-ci peuvent fournir des pistes pour contribuer au nécessaire changement d’échelle dans le rythme des rénovations énergétiques performantes[3].
Dans une première partie, nous présentons les principaux types de soutiens aux rénovations énergétiques ainsi que les données sur les résultats actuels en France et dans les villes moyennes. Nous avons pour cela réalisé une étude des volumes de rénovations énergétiques performantes aidées dans 62 agglomérations « moyennes » de 8 régions.
Dans la seconde partie, nous détaillons les modalités et résultats de plusieurs exemples de réussites dans différents types de territoires, à travers une analyse des principaux « facteurs clés » expliquant leurs résultats très supérieurs à la moyenne nationale :
- Rendre les réhabilitations globales de maisons accessibles pour les propriétaires occupants et rentables pour les bailleurs, avec les exemples de la Vallée de la Bruche et de Redon.
- Accompagner la « bascule du vote » dans les grandes copropriétés, avec les exemples de Mulhouse et de Chalon-sur-Saône.
- Mettre en œuvre et compléter les outils coercitifs contre l’habitat indigne, avec l’exemple de Valenciennes.
Ces exemples ont été choisis dans la mesure où ils ont fait l’objet d’une évaluation approfondie ou d’une étude ciblée et ne présentent pas de spécificités significatives en termes de « facteurs externes » favorables au développement des rénovations énergétiques[4]. Leur spécificité majeure relève donc pour l’essentiel de la politique menée localement, qui est très différenciée de la moyenne nationale.
A partir des enseignements tirés de ces exemples et des autres évaluations réalisées dans ce domaine, nous proposons dans une troisième partie les perspectives pour un changement d’échelle des rénovations énergétiques performantes, à la fois en termes de soutiens publics directs, mais également d’articulation avec d’autres politiques publiques. Dans ces conditions, nous verrons que les bénéfices de ce changement d’échelle peuvent être majeurs, en particulier pour les villes moyennes.
Les principaux programmes de rénovation énergétique
En France, trois grands ensembles de programmes de rénovation énergétique peuvent être distingués, à la fois en termes de cibles (types d’habitat et de propriétaires) et de dispositifs d’intervention (aides et outils coercitifs) : les programmes centrés sur l’habitat individuel, les programmes visant les copropriétés et les opérations de lutte contre l’habitat indigne.
Les programmes centrés sur l’habitat individuel et l’énergie
La politique d’amélioration de l’habitat privé est portée au niveau national par l’Agence nationale de l’habitat (Anah), qui soutient localement des mises en œuvre différenciées de cette politique, selon les hiérarchies de problématiques et les ressources spécifiques des territoires. Au centre de cette politique, le programme « Habiter mieux » aide et accompagne les travaux des ménages aux revenus modestes depuis 2010.
Les aides ont été renforcées en 2013, puis complétées en 2018 par une aide aux travaux « simples » dont le gain énergétique est inférieur à 25%. Cette aide « Agilité » a été intégrée en 2020 aux aides Ma Prime Rénov’ (MPR) qui ont remplacé le Crédit d’impôt transition énergétique (CITE).
L’aide Habiter Mieux aux travaux dépassant 25% de gain énergétique a été renommée « Sérénité » et s’est recentrée depuis 2021 sur les travaux dépassant 35% de gain énergétique, avec un plafond de travaux subventionnés passé de 20 000 € à 30 000 € puis 35 000 € (en 2023). Les aides Ma Prime Rénov « simples » étant le plus souvent limitées à des changements de chauffage et n’étant pas pilotées localement, elles ne relèvent pas des programmes décrits ici, même si nous verrons qu’elles sont à prendre en compte en tant que concurrent des aides aux rénovations performantes.
Le programme national Habiter Mieux/Sérénité (qui est devenu en 2024 le pilier « parcours accompagné » de Ma Prime Renov) est mis en œuvre à travers des conventions entre l’Anah et les co-financeurs et maîtres d’ouvrages de programmes locaux (EPCI, communes ou Départements). Ces programmes d’intérêt général (PIG) ou Opérations d’amélioration de l’habitat (Opah) s’appuient sur des opérateurs accompagnant gratuitement les ménages dans leurs projets de travaux et ciblent également souvent les mono-propriétés de propriétaires bailleurs, mais avec des modalités d’interventions très différentes que nous détaillerons plus loin. S’agissant des propriétaires occupants, les principales modalités de soutiens récentes sont les suivantes :
Note : Les propriétaires « Très Modestes » (TMO) ont un revenu net inférieur à 16 000 €/an pour 1 personne (22 000 €/an en Idf) et les « Modestes » (MO) un revenu inférieur à 21 000 €/an pour 1 personne (27 000 €/an en Idf) en 2023. Les aides aux travaux « lourds » concernent les logements dont l’indice de dégradation est élevé et nécessitant également des travaux « hors énergie » (ex. réfection de l’électricité et des sanitaires, en plus de l’isolation des murs et des toitures).
A l’échelle nationale, les volumes de rénovations énergétiques Sérénité sont plutôt en régression depuis 2017 et le développement des aides aux travaux « simples ». Le rythme national reste inférieur à 1% du parc éligible par an, ce qui est environ 2 fois inférieur aux objectifs à long terme (environ 2% du parc par an afin d’atteindre 60% du parc rénové de manière performante en 30 ans).
Périmètre de l’enquête « villes moyennes »
Le périmètre « villes moyennes » de cette note couvre les pôles urbains de 40 000 à 140 000 habitants non inclus dans la couronne d’une plus grande agglomération, soit environ 100 unités urbaines allant de Mont-de-Marsan (40 000 habitants) à Besançon (140 000 habitants). Ce périmètre représente bien le « cœur » des villes moyennes quelle que soit la définition retenue, avec près de 7,5 M d’habitants[7] « entourés » par environ 4 M dans les agglomérations « moyennes-hautes » (> à 140 000 habitants mais hors métropoles) et 3,5 M dans les agglomérations de 20 à 40 000 habitants. Sur ce périmètre, la totalité des 62 villes moyennes de 8 régions ont été étudiées, hors Ile de France (peu concernée au regard de l’étendue de sa couronne) et régions d’outre-mer (par les rénovations énergétiques).
Par ailleurs, nous n’avons pas pu étudier Auvergne-Rhône Alpes, Centre-Val de Loire et PACA (n=26) dont les bilans régionaux et locaux étaient indisponibles ou peu détaillés[8], sachant que les données disponibles en ligne sur les programmes Anah sont inaccessibles depuis l’été 2023.
S’agissant des agglomérations moyennes étudiées, le rythme des rénovations performantes d’occupants modestes est supérieur d’un tiers à la moyenne nationale (à parc éligible égal) :
Les soutiens à l’amélioration globale des copropriétés
Suite au constat des difficultés croissantes touchant les grandes copropriétés d’après-guerre[9], des dispositifs visant leur redressement se sont développés depuis 1994, en particulier les « opérations programmées d’amélioration de l’habitat – copropriétés dégradées » (Opah CD) puis les plans de sauvegarde (PDS).
Ces dispositifs sont encadrés et financés par l’Anah mais sont initiés et portés localement. Leurs objectifs sont multiples et concernent à la fois l’amélioration du bâti, la réduction des impayés de charges ou encore la revalorisation immobilière.
Pour les copropriétés les plus en difficulté (environ 15 %[10]), des interventions lourdes sont déployées sur un volume de copropriétés plutôt limité. Dans la précédente décennie, 4000 à 7000 logements par an ont été engagés dans des opérations qui durent entre 6 et 10 ans[11] et mobilisent des subventions pour l’ensemble des copropriétaires, des procédures coercitives (voir partie « locatif indigne ») et des dispositifs d’accompagnement gratuit pour le bénéficiaire (diagnostics techniques, appui à la gestion).
Pour les copropriétés « fragiles[12] » et celles sans difficulté en termes d’impayés de charge, le dispositif « Ma Prime Rénov’ Copros » propose depuis janvier 2021 une même subvention (25%) pour tous les propriétaires (occupants et bailleurs) s’engageant dans des rénovations permettant plus de 35% de gain énergétique conventionnel. MPR Copros remplace les aides Habiter Mieux, qui étaient ciblées sur les seuls propriétaires occupants modestes (souvent très minoritaires dans les copropriétés) :
Dans ce cadre, le volume des rénovations énergétiques aidées augmente depuis l’élargissement des aides aux syndicats à l’ensemble des copropriétés Pour autant, le rythme national reste inférieur à 0,5% du parc éligible par an, soit encore 4 fois inférieur aux objectifs à moyen terme (environ 2% par an pour d’atteindre 60% du parc rénové de manière performante avant 2050). Le rythme constaté sur les agglomérations moyennes étudiées est encore très inférieur à ce rythme national, qui est à ce jour principalement porté par les grandes agglomérations.
Plusieurs grandes agglomérations ont en effet été sensibilisées plus tôt à cette problématique suite aux interventions menées sur des copropriétés en forte difficulté dans les quartiers de rénovation urbaine. Toutefois, des dynamiques s’amorcent dans certaines agglomérations moyennes, sachant que pour ces opérations les engagements d’aides publiques ne sont constatés que 2 à 4 ans après l’émergence des projets.
Les opérations sur le locatif dégradé ou indigne
Un troisième ensemble d’outils d’intervention cible les mono-propriétés (maisons ou petits immeubles) de bailleurs privés, au sein d’opérations de « Renouvellement Urbain » (Opah-RU) ou de volets dédiés de programmes plus larges de type PIG.
Afin de soutenir les travaux des bailleurs privés hors copropriétés, le dispositif « Louer abordable », a été remplacé en 2022 par « Loc’Avantages » qui propose 15 à 65% de réduction d’impôt sur les revenus locatifs en échange d’une décote de 15 à 45% sur le loyer moyen de la commune (vs. 30 à 85% d’abattement sur les revenus locatifs avant 2022). Ces aides fiscales peuvent être cumulées avec des aides aux travaux modulées selon la dégradation initiale du logement.
Sur le volet coercitif, le gel des loyers des « passoires thermiques » (logements dont le DPE est classé F ou G) a été étendu en 2022. Ce gel sera suivi par le déploiement progressif de l’interdiction de location des logements les plus énergivores, qui devrait concerner les locations classées G à partir de 2025 puis F à partir de 2028 et E à partir de 2034. Sachant que cette interdiction ne devrait en réalité pas concerner les logements des copropriétés (sauf vote des travaux à la majorité des copropriétaires).
S’agissant de l’habitat indigne, différents moyens de coercition peuvent être utilisés par les Agences Régionales de Santé (notamment l’arrêté d’insalubrité[13]), les maires (notamment l’arrêté de péril et la mise en conformité au règlement sanitaire départemental – RSD) et/ou les caisses d’allocations familiales (la conservation des allocations logement).
Pour les arrêtés d’insalubrité et de péril, la suspension des loyers peut être complétée par des amendes (en cas de non-exécution des et/ou de relocation des logements), ainsi que par diverses procédures pouvant aboutir à des expropriations, notamment l’opération de restauration immobilière. Malgré des enjeux majeurs en termes de santé et de sécurité (notamment soulignés à Marseille[14]), l’habitat indigne reste un enjeu peu traité en dehors de certains territoires (ex. Nord et Seine-Saint-Denis[15]) et estimé par des indicateurs indirects.
Sur cet ensemble « bailleurs », le rythme national est plus de 10 fois inférieur aux objectifs à long terme de la France, même si ces des rénovations performantes se font souvent sans ces aides en zone tendue (en raison de l’écart entre les plafonds de loyer et les loyers de marché). S’agissant des agglomérations moyennes, le rythme est également insuffisant mais plus de deux fois supérieur au rythme national, avec près d’un tiers des agglomérations étudiées situées entre 0,4% et 1% de leur parc éligible rénové chaque année.
Quelques exemples de programmes très performants
Dans le cadre des programmes décrits plus haut, plusieurs territoires ont réussi à atteindre des rythmes de rénovations performantes 3 à 10 fois supérieurs à la moyenne nationale pour un ou plusieurs types d’habitats. Nous présentons ici les modalités et résultats de plusieurs de ces exemples de réussites dans différents types de territoires, à travers une analyse des principaux « facteurs clés » expliquant leurs résultats très supérieurs à la moyenne nationale.
Rendre les réhabilitations globales accessibles ou rentables
S’agissant des habitats individuels ou des petits immeubles en mono-propriété, les programmes menés dans une petite ville (Schirmeck-La Broque-Rothau) et dans une ville moyenne (Redon Agglomération) démontrent l’efficacité des politiques visant à rendre les rénovations globales accessibles (pour les propriétaires occupants) ou rentables (pour les propriétaires bailleurs).
Le soutien massif aux rénovations performantes dans la Vallée de la Bruche
Un premier exemple de programme particulièrement performant est celui porté par la Communauté de Communes de la Vallée de la Bruche. Cette opération d’amélioration de l’habitat concerne le « centre-bourg » de ce territoire, qui est constitué par quatre communes contigües de 7500 habitants. Les enjeux locaux en matière d’amélioration de l’habitat et d’attractivité sont importants : le parc est très ancien (42% des résidences principales datent d’avant 1946 contre 25% en France), le nombre d’habitants régresse et le taux de vacance est plutôt élevé (11% contre 8% en France).
Au-delà des aides aux travaux prévues par l’Anah, une majoration de 10 points du taux d’aide Anah est proposée à l’échelle départementale, ainsi que des aides complémentaires locales et départementales à hauteur de 15 à 23% des coûts de travaux, soit un complément pouvant atteindre 11 000 € pour les dossiers « énergie » en 2022 (en plus des 15 000 € moyens d’aide nationale) et 16 000 € (en plus des 30 000 € d’aide nationale) pour les dossiers « lourds ». D’autres aides complémentaires sont proposées, notamment par les caisses de retraites (subvention de 4000 € par retraité) et par Procivis (ex-Crédit immobilier de France), qui propose des avances de subventions et des prêts bonifiés sur le reste à charge).
Le programme mis en place a permis de multiplier par 3,5 le rythme national des rénovations performantes de maisons en général et par 20 le rythme national des rénovations « lourdes » (1,5% par an vs. 0,07%, voir tableau ci-dessus). Les gains énergétiques sont également plus élevés que la moyenne nationale (- 48% vs. – 42%), notamment en raison du poids important des travaux lourds.
Une enquête[16] auprès des bénéficiaires et des partenaires a permis de confirmer l’effectivité de ces gains (après un ou deux hivers) et le rôle majeur de la forte mobilisation des aides financières. En effet, sans les aides locales et départementales, le reste à charge des travaux lourds aurait été de 12 000 € supérieur par logement rénové (en moyenne).
Ces résultats ont également été favorisés par un effort pérenne d’information (espace de conseil ouvert toute la semaine et campagnes de communication) et la forte mobilisation des avances et prêts de Procivis. Sans la concurrence massive des travaux à « 1 euro » (peu coûteux mais bénéficiant d’importantes aides de MPR et/ou des CEE), les résultats auraient même pu être nettement supérieurs selon l’ensemble des acteurs interrogés, dans la mesure où de nombreux ménages ont préféré engager ces travaux moins performants mais aux restes à charge nettement moins élevés.
Les effets majeurs de la rentabilisation des rénovations lourdes des bailleurs
Sur ce même territoire, le rythme des rénovations de bailleurs est 15 fois supérieur à la moyenne nationale, avec un rythme de rénovation performante de 2% du parc potentiel par an, contre moins de 0,15% du parc des bailleurs en mono-propriété rénové chaque année à l’échelle nationale :
Pour les bailleurs, les aides conséquentes aux travaux (25% à 35% d’aides Anah + 12% d’aides locales en moyenne), ainsi que les défiscalisations permettent de rentabiliser des investissements avec travaux conséquents, y compris avec des loyers sociaux, dans un contexte où les écarts avec les loyers de marché sont limités (< à 1 €/m²/mois) et où les prix des biens sont réduits (autour de1500 €/m²).
A ces facteurs économiques majeurs s’ajoute une dynamique locale favorable, avec plusieurs investisseurs « habitués » au programme et un bon relais par les agences immobilières. Certains de ces investisseurs sont locaux et d’autres viennent de Strasbourg, où les rendements locatifs sont devenus moins intéressants (les loyers ont augmenté nettement moins vite que les prix).
Si les résultats de ce territoire sont très avancés, il est à noter que d’autres territoires démontrent ce même lien entre modalités de soutiens et résultats, y compris dans le même département[17].
La remobilisation des logements vacants par l’accession à Redon Agglomération
Redon Agglomération (67 000 habitants) a connu un déclin démographique qui s’est récemment stabilisé en lien avec l’amélioration de sa desserte ferroviaire vers les métropoles voisines de Nantes et Rennes. Pour autant, les logements vacants représentent plus de 10% du parc privé local, dont 5% sont vacants depuis plus de 2 ans. Dans ce contexte, l’agglomération a souhaité favoriser la remobilisation des logements vacants grâce à une prime « acquisition/vacance ».
Cette prime visait l’ensemble du territoire et les primo-accédants jusqu’au plafond de revenu « moyen » (6 000 €/an supérieur au plafond « modestes ») et était cumulable avec les aides de l’Anah pour les ménages modestes et très modestes[18]. Les logements concernés doivent être vacants depuis au moins 3 ans (vs. 1 an avant 2020) et le cumul des aides varie en raison des découpages administratifs singuliers de ce territoire, à cheval sur trois départements et deux régions (Pays de la Loire et Bretagne). Au-delà des aides Anah, les principales primes étaient de :
- 5000 € de l’EPCI pour les accessions dans des logements vacants depuis plus de 3 ans (vs. 2500 € avant 2020) + 1000 € pour les éligibles Habiter Mieux.
- 4000 € des Pays-de-la-Loire pour les travaux énergétiques des propriétaires occupants très modestes dépassant 45% de gain énergétique (mais pas de prime de la région Bretagne pour 2/3 des habitants).
Dans ce cadre, les rénovations énergétiques de logements vacants en accession ont concerné près de 150 logements en 6 ans, dont près de la moitié ont été remobilisés par des ménages modestes aidés par l’Anah. Plus globalement, le rythme des travaux « énergie » est également élevé et l’agglomération observe, comme pour la Vallée de la Bruche, une dynamique de ménages modestes qui s’installent sur leur territoire pour une accession avec travaux, dont près d’un quart dans les centres-bourgs.
Accompagner la « bascule de vote » dans les grandes copropriétés
Depuis l’exemple du programme MurMur de Grenoble (initié en 2011), plusieurs programmes locaux ont permis de multiplier par 3 à 5 le rythme des rénovations performantes des grandes copropriétés, notamment dans des agglomérations de grande taille (exemple de Mulhouse), mais également dans une agglomération de taille moyenne (exemple de Chalon-sur-Saône).
Le redressement des copropriétés à Mulhouse Alsace Agglomération
Mulhouse Alsace Agglomération (270 000 habitants) a inscrit depuis 2012 la rénovation des copropriétés comme priorité de sa politique du logement. L’agglomération compte en effet plus de 50 400 logements dans 3600 copropriétés dont 26 400 logements construits entre 1946 et 1993.
Différents programmes ont été engagés depuis sur les divers types de copropriétés, y compris un observatoire et un programme d’accompagnement. Au-delà des aides de l’Anah, l’agglomération et ses partenaires proposent différents moyens complémentaires :
- Un accompagnement à titre gratuit pour le bénéficiaire des copropriétés au stade du « pré-projet » par des experts indépendants de l’Agence Départementale de l’Information sur le Logement (ADIL) et de l’Agence locale de l’Energie, afin de les informer au mieux en amont du vote de l’assistance à maîtrise d’ouvrage (AMO), qui est également soutenue.
- Des aides aux travaux complémentaires pour les propriétaires occupants modestes (1000 € en copropriété fragile), complétées par une aide socle de la Région (jusqu’à 2500 €/logement) et du Département depuis 2022 (jusqu’à 2000 €/logement en quartier politique de la ville)
Grâce à l’ensemble de ces dispositifs, plus de 200 logements en copropriétés par an ont été engagés dans des rénovations performantes ces dernières années, soit près de 3 fois le rythme national[19] :
Les rénovations énergétiques des copropriétés au Grand Chalon
Le Grand Chalon (110 000 habitants) a engagé en 2016 un PIG « rénovation énergétique des copropriétés pilotes » centré sur les grandes copropriétés d’Après-guerre. L’agglomération compte plus de 400 copropriétés de ce type qui totalisent environ 10 000 logements, soit près de 20% du parc local. Un appel à projet a été largement diffusé auprès des copropriétés éligibles permettant de sélectionner 5 copropriétés (de 30 à 135 logements) sur 14 candidats.
En complément des aides Anah de l’époque (6000 à 11 000 € réservées aux occupants modestes et aux bailleurs conventionnant leur loyer), le programme proposait un accompagnement à titre gratuit par un opérateur et a permis d’ajouter de 4000 à 9000 € d’aides pour l’ensemble des logements :
- Une aide du Grand Chalon de 1000 à 2200 € pour tous les logements et de 1900 à 3300 € EPCI+Ville pour les copropriétaires non soutenus par une aide individuelle de l’Anah ;
- Une aide de la Région de 2000 à 4500 € pour tous les logements, conditionnée à l’atteinte du niveau Bâtiment Basse Consommation (BBC).
Ces aides pour tous les copropriétaires ont permis de faire « basculer » le vote en faveur de travaux ambitieux pour les 5 premières copropriétés (281 logements au total), qui avaient finalisé les travaux prévus en 2022. L’implication de syndics et de groupements de travaux ont depuis entraîné l’engagement de 11 autres copropriétés dont 5 ont engagé des travaux (312 logements) et 6 sont au stade de l’assistance à maîtrise d’ouvrage pour préparer des travaux (493 logements).
Au-delà des volumes de logement rénovés, les qualités des rénovations énergétiques réalisées sont également à souligner, avec 4 des 5 copropriétés « pilotes » (247 des 281 logements) ayant atteint le niveau BBC (96 kwh/m²/an dans cette zone), l’ensemble dans le cadre d’un contrat garantissant le niveau de performance énergétique défini (gains de 41% en moyenne). La qualité des travaux a impliqué un coût moyen total relativement élevé pour ce type d’immeuble (23 800 €/logement), mais le reste à charge est resté limité (12 500 €/logement) grâce à l’ensemble des aides mobilisées.
Les 5 autres copropriétés engagées ces deux dernières années l’ont été avec la nouvelle aide socle « MPR Copros », complétée par des aides aux travaux de l’EPCI de 10 à 15% pour les propriétaires occupants aux revenus modestes et intermédiaires (soit 1500 à 2250 €/logement).
Appliquer et compléter les outils coercitifs contre l’habitat indigne
Sur le territoire de Valenciennes métropole (200 000 habitants), le logement indigne est un enjeu prioritaire avec 8% de parc privé potentiellement indigne en moyenne (vs. 6% en France) et des quartiers dépassant 20% de locations indignes sur le corridor minier.
Constatant une faible efficacité des mesures incitatives seules, l’agglomération forme des référents « habitat indigne » dans chaque commune et propose depuis 2020 une assistance gratuite aux visites.
Les contrôles et procédures ont depuis fortement augmenté (de + 80% à + 500% selon les communes), avec plus de 180 logements contrôlés par an et quasiment autant de procédures engagées dont environ 50 procédures « graves » (danger imminent, arrêté d’insalubrité et de péril), soit près de 6 fois plus qu’à l’échelle nationale (environ 3000 arrêtés d’insalubrité et de péril par an sur 68 M d’habitants).
Suite à l’engagement de procédures, la principale difficulté dans ce domaine est le départ des occupants, qui ont alors l’occasion de changer de logement. Ces départs sont compréhensibles mais entravent la mise en œuvre des obligations de travaux, les logements étant considérés comme vacants[20]. Afin de répondre à cette impasse, la métropole a développé des conventions d’occupation précaire avec des bailleurs sociaux, ce qui permet de reloger en maintenant le bail et donc l’obligation de remise aux normes. En complément, l’agglomération a renforcé les aides Anah pour les investisseurs rachetant des biens sous procédure (avec une prise de contact au moment de l’acquisition et des aides jusqu’à 24 000 € supérieures au socle Anah) ainsi que les soutiens aux acquisition-amélioration par les bailleurs sociaux (jusqu’à 40 000 €/logement).
Avec l’ensemble de ces mesures, les résultats du territoire sur l’habitat indigne sont près de 10 fois supérieurs à la moyenne nationale :
- Les rénovations lourdes sont en forte augmentation: les rénovations lourdes de bailleurs privés sont passées de 20 à 32 logements par an et les acquisitions-améliorations de bailleurs sociaux sont passées de 3 à 80 logements entre 2019 et 2023. Ces rénovations concernent le plus souvent des logements vacants, dont une partie était concernée par une procédure (infraction au règlement sanitaire – RSD -, insalubrité ou péril).
- 15 à 25 logements sous arrêté d’insalubrité sont rénovés chaque année, dans la plupart des cas par de nouveaux acheteurs, mais sans loyer conventionné (et donc sans aide Anah). Les références nationales sont difficiles à préciser en la matière, mais les territoires de cette taille étant en moyenne concernés par moins de 8 arrêtés d’insalubrité par an et la majorité devenant vacants à long terme, les rénovations de logements sous arrêté y dépassent rarement 3 par an.
Plus globalement, sur 340 procédures engagées en 2 ans, seules 70 n’ont pas abouti pour cause de vacance du logement et près de 190 ont déjà abouti à une remise aux normes.
Quelles perspectives pour un changement d’échelle ?
Plusieurs enseignements peuvent être tirés de ces expériences territoriales (et d’autres similaires) dont les résultats sont très supérieurs à la moyenne nationale :
- Le rythme des rénovations performantes de maisons peut être multiplié par 3 à 4 si les restes à charge ne dépassent pas 10 à 15 000 € (pour les propriétaires modestes) et si les programmes prévoient un effort important et pérenne d’information du public.
- Les réhabilitations lourdes peuvent être multipliées par 5 à 20 si des aides complémentaires sont apportées (aux accédants ou aux bailleurs) et à condition que les loyers conventionnés soient proches du loyer moyen privé (pour les bailleurs)
- Les rénovations énergétiques des grandes copropriétés peuvent être multipliées par 3 à 5 grâce à la combinaison d’aides socles pour tous les copropriétaires et de soutiens complémentaires significatifs pour les propriétaires aux revenus modestes et moyens.
- Les sorties de situations d’insalubrité peuvent être multipliées par 10 lorsque les outils coercitifs sont appliqués et complétés par des suites systématiques aux signalements.
Il est à souligner que les expériences de réussites détaillées ici ont été menées dans des territoires sans facteur contextuel particulièrement favorable, ni en termes de parc (les résultats étant analysés au regard des parcs éligibles), ni en termes d’autres facteurs « externes » à la politique publique menée (ex. zone d’altitude ou bâti particulier), hormis un degré minimum de rigueur hivernale[21]. D’autres expériences similaires non détaillées dans cette note ont également obtenu des résultats approchant ces ordres de grandeur. Des politiques du même type peuvent donc obtenir des résultats similaires sur la plupart des territoires, aux conditions décrites ci-dessus.
Les évolutions nationales en cours reflètent ces constats, même si les changements sont modérés : les taux et plafonds de travaux prévus[22] « compensent » principalement la très forte inflation depuis fin 2020 (+21%[23] pour le bâtiment). De plus, la forte concurrence des travaux limités au changement du chauffage et centrés sur les pompes à chaleur (PAC) risque de réduire l’attractivité du pilier « accompagné », en particulier pour les ménages modestes et intermédiaires. En effet, leurs restes à charge sur des rénovations performantes d’environ 60 000 € vont demeurer supérieurs à 20 000 € et à 30 000 €, contre moins de 5000 € pour des travaux limités à l’installation d’une PAC air-eau.
Pour les copropriétés, la montée en puissance de MPR copropriétés a déjà été constatée en 2022 grâce à l’extension des aides « socles », mais les aides pour les ménages modestes sont devenues moins élevées qu’avant 2021 (ex. 10 000 € vs. 12 000 € pour un très modeste, alors que les coûts ont augmenté de 20%). Dans un contexte de fragilité économique, les risques de blocage des travaux ou, en cas de vote majoritaire, de remontée des impayés des propriétaires modestes sont croissants et pourraient être aggravés par la diffusion de l’habitat indigne exploité par des marchands de sommeil.
Les plus-values et bénéfices d’une montée en puissance des villes moyennes
Dans ce contexte, le changement d’échelle des rénovations énergétiques nécessitera encore des aides complémentaires pour les rénovations ambitieuses (dépassant les 50% de gains et 50 000 € de travaux[24]), ainsi qu’une meilleure couverture du territoire par les opérations programmées pour sécuriser l’accompagnement des ménages.
En effet, sans accompagnement amont systématique et indépendant des entreprises de travaux, les fraudes déjà massives sur les opérations « simples[25] » risquent de s’étendre aux aides « performance ».
Or, la seule installation de systèmes de chauffage dans des logements peu isolés peut entraîner une hausse des factures (en passant du fioul ou du gaz au chauffage électrique) y compris en l’absence de fraudes, tandis que les rénovations performantes entraînent le plus souvent un gain de plus de 50% sur les factures énergétiques des ménages[26].
Par ailleurs, l’enjeu de la remobilisation des logements vacants, majeur dans de nombreuses agglomérations de taille moyenne, nécessite le plus souvent de faciliter les rénovations performantes afin de mieux maîtriser les ressources foncières tout en attirant de nouveaux habitants.
Le potentiel d’accélération des rénovations de copropriétés, notamment celles construite après-guerre et avant les premières réglementations thermiques, est considérable pour la plupart des agglomérations moyennes.
Parmi les pistes identifiées pour le concrétiser, il pourrait être envisagé de compléter les nouvelles aides MPR Copros par des soutiens à l’accompagnement en « amont » des travaux, ainsi que par des aides complémentaires aux propriétaires aux revenus modestes et moyens. Cela permettrait aux villes moyennes de renforcer leur attractivité, tout en évitant la création de nouvelles copropriétés en difficultés d’impayés suite à des travaux trop coûteux pour une partie des copropriétaires de bonne foi.
Enfin, les villes ont un rôle majeur de contrôle et de suivi des immeubles déjà signalés, les cas de relocations de logements pourtant non-conformes voire insalubres étant fréquents. Les bénéfices d’un changement d’échelle dans la lutte contre l’habitat indigne sont majeurs, à la fois pour les populations concernées, mais également pour les systèmes de santé (en lien avec les maladies respiratoires, voir l’expertise collective Anses 2020), l’attractivité des quartiers et la sécurité des riverains.
Un lien fort avec la fiscalité, l’application des décisions de justice et l’aménagement du territoire
Pour gagner en efficacité, ces politiques publiques doivent être pensées en tenant compte de dimensions complémentaires qui relèvent principalement des compétences de l’Etat. Si elles ne sont pas l’objet de cette note, elles ne peuvent être occultées.
Il s’agit notamment de la fiscalité immobilière, qui est actuellement très favorable aux logements occasionnels et à la rétention foncière et pénalise en conséquence les réhabilitations de résidences principales par les bailleurs.
Ce frein est notamment majeur dans les zones touristiques et littorales, où même des soutiens très importants aux rénovations de bailleurs ont des effets limités au regard des rentabilités bien supérieures des locations occasionnelles ou à loyer non conventionné. Ce constat était déjà central dans l’évaluation du volet « bailleurs » du programme Habiter Mieux réalisée en 2017[27], alors que l’attractivité et la diffusion des locations occasionnelles étaient bien moindres qu’en 2023.
Par ailleurs, la rénovation performante des logements vacants ne pourra se déployer largement qu’à condition que les emplois et les formations soient mieux répartis sur le territoire.
Or c’est l’inverse qui est soutenu à travers la métropolisation, qui aggrave les tensions du logement dans les grandes agglomérations et réduit la demande dans de nombreux autres territoires. Dans ces territoires détendus, les soutiens même élevés aux réhabilitations de logements vacants ne peuvent être mobilisés sans une perspective de développement d’emplois et/ou de formations à proximité, C’est pourquoi un rééquilibrage territorial des formations et des infrastructures publiques est à la fois nécessaire pour les problématiques de logement, d’accès aux services publics et de limitation des constructions[28].
Enfin, l’efficacité des politiques locales du logement est plus largement entravée par la très faible application des réglementations, y compris dans les territoires où les ARS et mairies signalent de nombreuses infractions. Les partenariats avec les services de police/justice restent peu développés et les poursuites et condamnations restent rares[29] et les amendes très peu dissuasives : moins de 20 000 € le plus souvent contre des amendes encourues allant de 80 000 à 300 000 € par logement et des gains frauduleux qui peuvent se compter en millions d’euros[30]. Même pour les rares condamnés, l’infraction reste très rentable et relève donc d’une quasi-incitation à la fraude. Afin d’accompagner les efforts des collectivités dans la lutte contre l’habitat indigne et les locations illégales, les sanctions devraient être au moins deux fois supérieures aux gains frauduleux et les moyens de police-justice indexés sur les territoires les plus efficaces en la matière[31].
De multiples leviers doivent donc être actionnés pour améliorer la qualité des logements et l’efficacité de l’action publique. Des exemples existent qui démontrent le potentiel d’accélération qu’une action territoriale résolue peut concrétiser, et que l’intervention de l’Etat peut catalyser.
[1] Selon les Comptes du logement 2022, le parc résidentiel français est composé de 37,7 millions de logements dont 31 M de résidences principales. Sur cet ensemble, 17,7 M (57%) sont des logements occupés par leur propriétaire (dont 14 M sont des maisons individuelles) et 13,2 M par des locataires, dont 5,5 M dans le parc social. Les logements collectifs sont concentrés à 72% dans les unités urbaines de plus de 100 000 habitants qui regroupent 48% des résidences principales (Insee 2022)
[2] Dans le cadre du programme de travail de La Fabrique de la Cité, l’objectif est de mieux documenter ce type de territoire, qui n’apparaît pas dans les catégories des bilans de l’Anah et reste peu étudié par rapport aux métropoles.
[3] Au sens de la moyenne haute des rénovations soutenues par Ma Prime Rénov’ Sérénité : gains énergétiques d’au moins 50% et travaux d’au moins 30 000 € sur trois postes importants (ex. isolation des murs, fenêtres et chauffage). Ces rénovations permettent d’atteindre le niveau BBC « bâtiment basse consommation » (entre 65 et 105 kwh/m²/an selon les zones pour le chauffage, l’eau chaude, la climatisation et l’éclairage – hors électroménager), le plus souvent en 2 étapes.
[4] D’autres exemples de réussites sont plus difficiles à analyser en raison de facteurs contextuels favorables, comme par exemple le Trièves (Isère). Ce territoire rural a mis en place en 2015 une intervention aux résultats très supérieurs à la moyenne (déjà observables dans l’évaluation des PTRE /écrire l’acronyme /de 2017), mais dans un contexte assez spécifique de plateau d’altitude (où les enjeux d’isolation sont majeurs) et d’une dynamique locale ancienne sur les questions de l’isolation
[5] Depuis janvier 2023, le plafond de travaux est passé à 35 000 € et depuis octobre 2023, le taux de subvention est passé de manière « exceptionnelle » à 50% pour les modestes et à 65% pour les très modestes.
[6] Précédemment de 10%, la prime a été remplacée mi-2022 par des CEE (très variables selon les travaux et la période), qui devrait être intégrés à l’aide versée directement par l’Anah en 2024. S’ajoutent une prime de 1500 € pour les sorties de « passoires » (étiquettes F ou G) ou pour l’atteinte de la basse consommation (BBC) depuis 2020.
[7] Ces 101 agglomérations cumulent environ 7,5 M d’habitants sur leur périmètre géographique d’unité urbaine et environ 9 M d’habitant sur leur périmètre administratif d’intercommunalité.
[8] Certains bilans régionaux sont en revanche très complets et détaillés à l’échelle des programmes locaux, en particulier le bilan CRHH de la Bretagne et les bilans Anah des Pays de la Loire
[9] Dans la plupart des quartiers dits d’« habitat social » ou « prioritaires », des grandes copropriétés privées sont situées à côté du parc social, avec un bâti similaire mais souvent davantage d’occupants très modestes et d’impayés de charges.
[10] Source : FILOCOM 2013 (ANAH/DGALN)
[11] Geste/Anah (2019) Évaluation nationale des Opah copropriétés et des plans de sauvegarde
[12] Situées dans un quartier du Nouveau Plan national de Rénovation Urbaine (NPNRU) ou dont le taux d’impayés par rapport au budget est supérieur ou égal à 8% (mais ne cumulant pas d’autres problématiques majeures les classant « en difficulté »)
[13] Les effondrements du 5 novembre 2018 ont causé 8 morts et l’évacuation de 360 immeubles.
[14] Ces deux départements concentrent plus de 20% des arrêtés d’insalubrité (environ 2000 par an hors urgence ponctuelle 1311-4) pour 6% de la population nationale, voir N. Desquinabo (2021) L’évaluation dans les politiques complexes, Revue Française d’Administration Publique n°177 et l’étude d’impact de la loi Élan (2018) p. 343 et suivantes.
[15] Les données sur le parc privé potentiellement indigne (PPPI) sont traitées en croisant le classement « cadastral » de la qualité des logements (qui date souvent des années 1970) et le revenu des occupants (des années récentes). Ces données estiment un potentiel mais n’identifient pas les logements anciens ayant subi depuis des dégradations et/ou des divisions.
[16] Evapol (2023) Evaluation de l’Opah-RU Centre-bourg de la Vallée de la Bruche 2016-2022
[17] L’autre territoire du département proposant des soutiens ambitieux – l’Alsace Bossue-Saverne – atteint également des résultats nettement plus élevés que la moyenne nationale, avec par exemple 210 logements de propriétaires occupants modestes « Sérénité » en 2021 pour environ 90 000 habitants, soit plus de 3 fois le rythme national. A l’inverse, les autres territoires du même département ont une politique locale moins ambitieuse et des résultats proches du rythme national.
[18] Il est à noter qu’en dehors des Opah, les accédants modestes ne sont pas éligibles aux aides Sérénité en cas d’utilisation d’un prêt à taux zéro, ce qui est un frein problématique mais un argument pour engager une opération programmée.
[19] A noter toutefois que le parc éligible national inclut également un peu plus de 2 M de logements dans les copropriétés d’avant 1945 (vs. 5 M entre 1946 et 2000) dont le potentiel de rénovation performante est moins important (notamment en raison des contraintes urbanistiques et/ou patrimoniales des petites copropriétés souvent situées dans les centres).
[20] Depuis l’arrêt « Mathieu » du Conseil d’État (CE 15 avril 2015 Mathieu no 369548), les logements déclarés vacants ne peuvent plus être soumis aux obligations de travaux des arrêtés d’insalubrité, le propriétaire étant considéré comme libre de le laisser vacant et dégradé. Pour autant, l’expérience des territoires pratiquant de nombreux contrôles démontre que ces logements sont en réalité souvent reloués, tout en étant déclaré vacant de manière mensongère.
[21] Plusieurs territoires moins exposés au froid ont également atteint des rythmes élevés de rénovation performante en lien avec des politiques ambitieuses, par exemple dans l’Hérault, la Vendée ou le Finistère (pour les maisons) ou en Ile de France (pour les copropriétés et l’habitat indigne). Ils ne sont pas détaillés ici dans la mesure où nous ne les avons pas étudiés de manière directe ou qu’il s’agit de métropoles (ex. Brest) ou de territoires spécifiques (ex. Yvelines et Seine-Saint-Denis).
[22] Au 1er janvier 2024, il est prévu dans le nouveau pilier « parcours accompagné » de MPR des soutiens pour les propriétaires modestes et très modestes de 60 et 90% (dont CEE) de 40 000 € (deux sauts de classe de DPE) et 55 000 € (trois sauts de classe énergétique, équivalent aux travaux « lourds »). Ces modalités nationales s’approchent des soutiens qui existaient déjà en 2022 dans les territoires « avancés » comme la Vallée de la Bruche (32 à 46 000 € pour la plupart des travaux permettant un saut de deux à trois classes). mais restent encore inférieures en euros constants.
[23] Insee – indice des prix de l’entretien-amélioration des bâtiments https://www.insee.fr/fr/statistiques/serie/010546547
[24] La question centrale reste celle des enveloppes qui seront proposées/imposées aux territoires (qui ont toujours été fortement limitées pour les travaux lourds)
[25] Le taux de fraude sur les opérations soutenues par des CEE va de 20 à 50% selon le Bilan CEE p.17-20 et l’UFC
[26] Gains effectifs attestés dans la plupart de nos évaluations ainsi que dans l’étude Ademe “Perf In Mind”, 2021
[27] Par exemple, des soutiens locaux très élevés à Nice (> à 35% du coût des travaux en plus des aides nationales) ou en Charentes Maritimes avaient des résultats « moyens » en raison de l’écart déjà trop important entre les loyers de marché (notamment touristiques) et conventionnés (y compris intermédiaires), alors que le Bas-Rhin (hors Strasbourg), les Landes ou la Dordogne obtenaient des résultats 2 à 4 fois supérieurs malgré des aides locales significatives mais inférieures (15% le plus souvent), en raison d’un écart entre loyer de marché et loyer conventionné de 1 à 2 €/m²/mois contre un écart de 8 à 12 €/m²/mois en moyenne à Nice ou sur d’autres littoraux.
[28] Voir France Stratégie (2019) La répartition territoriale des emplois publics et (2022) les villes moyennes, un pilier durable de l’aménagement du territoire, ainsi que notre note « Quelle stratégie pour un logement abordable et durable » (2023) pour des données sur la surconcentration des emplois et formations et des propositions pour un meilleur rééquilibrage territorial.
[29] Environ 90 condamnations par an en lien avec les logements non-conformes ou indignes en 2014-2018 selon l’étude d’impact de la loi Élan p. 343 et suivantes (2018) et la note de jurisprudence de l’ANIL (2014).
[30] Par exemple, la ville très concernée de Roubaix n’a connu que 2 condamnations sur environ 50 cas signalés en 10 ans, dont une amende de 20 000 € couvrant moins de 10% des gains réalisés par deux associés d’une SCI dont un chirurgien connu ayant loué plusieurs logements insalubres sur plusieurs années.
[31] Voir l’exemple des moyens de police-justice déployés depuis 2018 en Seine-Saint-Denis et l’intérêt des mesures de confiscation systématique dans N. Desquinabo (2021) L’évaluation dans les politiques complexes. Les cas de la lutte contre l’habitat indigne et du traitement des copropriétés en difficulté, Revue Française d’Administration Publique n°177
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La Fabrique de la Cité
La Fabrique de la Cité est le think tank des transitions urbaines, fondé en 2010 à l’initiative du groupe VINCI, son mécène. Les acteurs de la cité, français et internationaux, y travaillent ensemble à l’élaboration de nouvelles manières de construire et reconstruire les villes.