Rénover vite et bien les passoires thermiques, c’est possible !

Marie Dégremont, directrice des études de La Fabrique de la Cité, s’est entourée des experts Nicolas Desquinabo, expert en évaluation des politiques publiques, Camille Defard, responsable du Centre Energie à l’Institut Jacques Delors et Thierry Laureys, expert en développement local dans la coopérative belge Corenove.

Le constat

Les logements représentent 30 % de la consommation d’énergie finale en France et 11 % des émissions de gaz à effet de serre. Plus de 22% des ménages sont en situation de précarité énergétique : ils dépensent plus de 8% de leur revenu pour le chauffage et/ou souffrent du froid (Onpe 2023), voire résident dans des logements indignes. Une part importante du parc énergivore et dégradé reste vacant sur de longues durées, avec des impacts lourds sur l’attractivité des centres des villes petites et moyennes, ainsi que sur la sobriété foncière, y compris dans les zones détendues.

Des initiatives locales réussies

Effectuer des rénovations performantes est donc souhaitable du point de vue individuel et du point de vue collectif. Des exemples de réussites existent, que Nicolas Desquinabo a analysés pour La Fabrique de la Cité dans la note Rénovation énergétique : stratégies pour un changement d’échelle avec les villes moyennes :

• La Vallée de la Bruche et Redon, qui démontrent l’intérêt de rendre les réhabilitations globales de maisons accessibles pour les propriétaires occupants et rentables pour les bailleurs,
• Mulhouse et Châlons-sur-Saône, qui s’appuient sur l’accompagnement de la « bascule du vote » dans les grandes copropriétés,
• Valenciennes, qui souligne le rôle des outils coercitifs et de leur mobilisation dans la lutte contre l’habitat indigne.

C’est lorsque ce sujet est une priorité politique locale que la rénovation accélère plus qu’ailleurs, lui donnant plus d’ampleur et plus d’efficacité. Ces initiatives locales ont d’autant plus d’impact qu’elles sont appuyées par le cadre national des aides à la rénovation ainsi que des incitations fournies par le cadre européen.

Le cadre européen

Camille Defard a rappelé cet effet d’entraînement et de mise en cohérence que peut jouer l’action européenne. L’initiative, la mise à l’agenda et l’harmonisation des ambitions est un moyen d’engager collectivement les Etats membres dans la rénovation. Mais ces lignes directrices doivent être renforcées : plus concrètes, mieux appropriées par les citoyens notamment. Elles peuvent s’appuyer sur la mobilisation des citoyens et associations qui coopèrent à l’échelle européenne.

Le cas de la coopérative wallonne Corénove

Thierry Laureys, administrateur délégué de la coopérative wallonne Corénove, s’inscrit à la croisée de ces réflexions sur l’action locale et le cadre européen. Selon lui, la moitié des démarches de rénovation sont interrompues parce qu’elles sont trop complexes à engager du point de vue administratif. Il faut donc guider les ménages dans chaque étape, en leur détaillant chacun des enjeux, apports de la rénovation et en pilotant pour eux le chantier de bout en bout. Thierry Laureys a également souligné le besoin d’un financement abordable et accessible, par exemple sous la forme de prêts à taux fixes de longue durée, associés au bâtiment et non aux ménages emprunteurs.